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Le CELI d’Étienne Charest: un emprunt et de l’audace

Jean Décary|Publié le 03 Décembre 2021

Le CELI d’Étienne Charest: un emprunt et de l’audace

En mars 2020, Étienne Charest a décidé de faire un emprunt étudiant de 15 000$ et d’en investir une partie dans son CÉLI et dans un compte non enregistré. (Photo: courtoisie)

PLEINS FEUX SUR MON CELI est une rubrique où des investisseurs individuels partagent avec nous leurs bons et mauvais coups en investissement tout en soumettant leur portefeuille à l’analyse d’un pro.

(Illustration: Camille Charbonneau)

 

 

Nom : Étienne Charest

Âge : 25 ans

Profession : représentant aux services de la perception dans une compagnie d’assurance

Valeur du CÉLI : 17 000$

Stratégie : FNB et titres individuels

Bon coup : avoir emprunté pour investir en avril 2020 lors du recul des marchés

Mauvais coups : s’être laissé tenter par les PAPE (premiers appels publics à l’épargne) et avoir investi dans des titres spéculatifs (penny stocks)

Objectif : croissance du portefeuille pour vivre un jour de ses investissements

Son conseil à l’investisseur qui commence : lire, pratiquer avec des logiciels de simulation et prendre des décisions rationnelles (et non émotionnelles)

 

Comme pour Obélix et la potion magique, Étienne Charest a rapidement été initié au monde de l’investissement. «Mon père et mon grand frère ont tous deux travaillé dans une banque. On discutait souvent de placements en famille.» Sa technique au CÉGEP de l’Assomption en comptabilité et gestion va sceller définitivement son intérêt pour les finances et la Bourse.

«Je me rappelle du cours de gestion de portefeuille. J’étais fasciné par les fluctuations des cours du marché.» C’est tout naturellement qu’il complétera par la suite un baccalauréat en administration (option finances) de l’Université du Québec à Trois-Rivières.

Le jour même de ses 18 ans, convaincu du potentiel du CELI, son paternel ouvre avec lui un compte et y cotise le montant maximal. «Mon frère avait eu droit à une automobile pour sa graduation. Moi j’ai opté pour le CELI», dit-il bien conscient de la chance qu’il a eue. Ce n’est que trois ans plus tard, vers la fin de ses études, qu’il se mettra à gérer activement l’un de ses CELI.

Mais ni son parcours académique ni la sagesse de ses proches ne l’immuniseront contre ses premières gaffes comme investisseur. «Au contraire, ce qui est paradoxal, c’était parfois des choix d’actions qui m’avaient été suggérés par eux», relate-t-il en riant. Il va se frotter à la réalité du milieu boursier avec des titres spéculatifs comme Lite Access Technologie (LTE.V, 0,13 $) et BeWhere Holding (BEW.V, 0,28 $) et y engloutira quelques milliers de dollars. «Ils sont encore dans mon compte et ils risquent d’y mourir.»

Le repli boursier causé par la pandémie sera pour lui une occasion de se faire la main et de repartir sur de meilleures bases. «Je n’ai pas connu 2008 comme investisseur, alors en mars 2020 c’était la première fois que je vivais une correction boursière. C’était un événement unique et je voulais en tirer profit.» Il décide alors de faire un emprunt étudiant de 15 000 $ et d’en investir une partie dans son CÉLI et dans un compte non enregistré.

Pour se garder une certaine marge de sécurité, il optera pour un panier d’actions en investissant dans des fonds négociés en Bourse (FNB). «Avec le recul, je considère cela comme l’un de mes bons coups», dit celui qui a vu ses placements croître de façon significative. Tout son portefeuille fait maintenant dans les six chiffres.

Étienne Charest continue de s’instruire et de peaufiner son style d’investisseur quelque peu hybride. C’est à ses yeux un mélange de «swing trading» (à plus courte échéance) et d’investissement de croissance, auxquels se greffent aussi des placements de type valeur (titres matures qui versent des dividendes) et de l’investissement passif.

Des livres tels que Beating the Street de Peter Lynch et Misbehaving de Richard H. Thaler l’ont influencé beaucoup dans son cheminement d’investisseur. Il est également reconnaissant du travail de vulgarisation effectué par le journaliste de Radio-Canada, Gérald Fillion. Il louange aussi les talents de communicateur de Pierre-Yves McSween. «Il m’a enseigné un cours au CÉGEP et a été une source d’inspiration, à la fois comme prof et auteur.»

M. Charest poursuit des objectifs financiers: avant ses 45 ans, il voudrait avoir une valeur nette d’un million de dollars ; et, à plus long terme, il aimerait que son portefeuille génère assez de revenus pour subvenir à ses besoins futurs. D’ici là, il n’oublie pas qu’outre les actions et leurs fluctuations, il y a aussi la vie. Il continuera donc à parfaire son élan sur les tertres de golf, ses ouvertures aux échecs et sa cuisine asiatique.

 

Dans l’œil d’un pro

«J’aime beaucoup son approche articulée autour d’un cœur, composé de FNB, et de satellites, c’est-à-dire les quelques titres individuels de qualité qui apportent un peu de piquant au portefeuille», commente Luc Girard, gestionnaire de portefeuille chez Noël Girard Lehoux, Valeurs mobilières Desjardins. Ce dernier fait cependant abstraction des petites actions moribondes qui croupissent dans les bas fonds du compte.

Essentiellement axé vers le Canada (56%) et les États-Unis (41%), M. Girard souligne que le portefeuille de M. Charest gagnerait à augmenter son exposition au marché international. «Il pourrait améliorer sa diversification géographique aisément à l’aide de FNB ou de fonds communs de placement mondiaux.» Surtout, remarque-t-il, que le marché international est moins cher et plus attrayant à l’heure actuelle que celui de l’Oncle Sam.

M. Girard observe que les dix principaux secteurs d’activités sont présents dans le CELI. Il constate toutefois une surpondération du poids des titres technologiques qui représente plus de 42% du portefeuille. «C’est beaucoup. Les technologies pèsent déjà lourd dans le S&P 500 américain — soit environ 27%.» Une façon d’alléger cette exposition serait de diminuer sa participation dans Lightspeed Commerce (LSPD, 70,06$) qui constitue près du quart du portefeuille. «C’est une belle société, mais ça va prendre quelques années encore avant qu’elle ne soit profitable.»

Il met en garde M. Charest contre le risque des pertes sèches, qui le privent de l’espace CELI et d’argent pour investir. «C’est tentant les gros coups, mais on devrait privilégier les coups sûrs et laisser les intérêts composés faire leur travail. C’est encore plus vrai dans un compte enregistré.» Et l’emprunt comme effet levier en Bourse? «C’est dangereux et ça reste du cas par cas. Ce n’est définitivement pas pour tout le monde, en fait ce n’est pas pour la très grande majorité des gens.» Pour ceux qui optent pour cette méthode, cela doit être fait avec parcimonie et en connaissance de cause selon le gestionnaire de portefeuille.

 

*Les ratios de frais de gestion des FNB d’Étienne Charest : VSP | 0,09%, XIU | 0,18%, QQC | 0,20%, ZDJ | 0,26%, XRE | 0,61%

 

***

 

Si vous souhaitez vous aussi partager avec les lecteurs de Les Affaires votre stratégie d’investissement dans votre CÉLI et faire analyser votre portefeuille par un pro, écrivez-nous à denis.lalonde@groupecontex.ca

 

Le CELI d’Étienne Charest (valeur approximative de 17 000$)

Titres Symboles % du portefeuille
Lightspeed Commerce LSPD.TO 23,39%
FNB Vanguard S&P 500 Index (en devise canadienne) VSP.TO 18,98%
FNB iShares S&P/TSX 60 Index XIU.TO 13,13%
FNB Invesco Nasdaq 100 Index (en devise canadienne) QQC.TO 12,73%
FNB BMO Dow Jones Industrial Average (en devise canadienne) ZDJ.TO 9,8%
FNB iShares S&P/TSX Capped REIT Index XRE.TO 5,79%
Banque Royale du Canada RY.TO 5,43%
Alimentation Couche-Tard ATD-B.TO  4,19%
BeWhere Holding BEW.V  3,3%
Lite Access technologies LTE.V  1,53%
Espèces  —  1,73%
Total  — 100%