«Aritzia et Sleep Country sortiront gagnants de la pandémie»
Dominique Beauchamp|Édition de la mi‑novembre 2020À PORTEFEUILLE OUVERT. LES AFFAIRES – Votre firme mise sur les PME qui offrent un fort potentiel de croissance.
À PORTEFEUILLE OUVERT.
LES AFFAIRES – Votre firme mise sur les PME qui offrent un fort potentiel de croissance. Quelles sont leurs perspectives ?
Nicolas Chevalier – Nous assistons à une renaissance des petites capitalisations qui ne se reflète pas dans les indices repères à cause de la chute du secteur de l’énergie au Canada et de l’ascension des GAFAM aux États-Unis. Les PME bien nichées et bien gérées offrent, en tout temps, le double potentiel de bénéfices croissants et d’une appréciation de cette capacité bénéficiaire, mais ces dernières années, les yeux des investisseurs étaient ailleurs. Depuis quelque temps, les gros investisseurs s’intéressent à nouveau aux PME pour capter des rendements additionnels maintenant qu’ils déjà ont fait le plein de placements passifs et alternatifs.
L.A. – Les chutes boursières de mars et de septembre ont-elles offert des occasions ?
N.C. – Nous avons profité des turbulences de mars et d’avril pour mettre à niveau nos portefeuilles en portant plus d’attention aux bilans et aux nouvelles perspectives de croissance. Deux paramètres nous ont guidés:les bénéficiaires de la COVID-19 à court et à long terme ainsi que les sociétés meurtries par la pandémie, mais assez solides pour sortir gagnantes de la crise. Par exemple, le confinement a devancé le plan d’affaires de Goodfood (FOOD, 8,92 $), qui élargit son offre à l’épicerie en ligne, densifie sa distribution et augmente la facture moyenne. Le détaillant de matelas Sleep Country (ZZZ, 23,94 $) et les boutiques de vêtements Aritzia (ATZ, 20,27 $) sont tous les deux en bonne posture pour vendre tant en ligne qu’en magasin et pour gagner des parts de marché. Les flux de trésorerie libres de Sleep Country devraient croître plus vite que les bénéfices parce que le marchand a terminé ses grosses dépenses en immobilisations. Aritzia pourrait aussi mettre la main sur de bons emplacements, à bon prix, que d’autres détaillants quitteront. Le fondateur Brian Hill détient aussi 40 % des actions, ce qui aligne ses intérêts à ceux des actionnaires. C’est un autre critère important dans nos choix de PME.
L.A. – Quels autres titres avez-vous achetés pendant la chute ?
N.C. – En mars, nous avons acheté des actions additionnelles du fabricant de planchers de composite pour les terrasses extérieures Trex Corp. (TREX, 77,65 $US) et du distributeur d’articles de paysagement SiteOne (SITE, 139,06 $US). Trex bénéficie du phénomène de la rénovation extérieure, mais aussi de l’intérêt pour ses planchers fabriqués à partir de sacs de plastique recyclés. Trex s’approprie déjà la moitié de ce segment, mais la part qu’occupe ce créneau dans l’industrie pourrait doubler de 15 % à 30 %, d’ici cinq ans. Le titre a rapidement doublé, nous avons donc encaissé certains gains en juillet.
L.A. – Quels titres avez-vous délestés lors du remaniement du printemps ?
N.C. – Nous avons vendu des sociétés qui nous semblaient moins bien positionnées qu’avant en fonction de la nouvelle conjoncture telle que l’exploitant des cinémas 3D Imax (IMAX, 11,82 $US), l’ingénieur-conseil endetté NV5 Global (NVEE, 61,92$US) et le fournisseur de composants aéronautiques et industriels Woodward (WWD, 88,36 $US).
L.A. – Les sociétés à forte croissance deviennent parfois chères, telle Kinaxis, qui vaut 123 fois ses profits. Comment gérez-vous cette situation ? N.C. – Quand nous analysons une entreprise, nous tentons de nous faire une tête sur la persistance de ses résultats et de projeter les bénéfices sur un horizon de quatre ans. Certaines entreprises obtiennent quand même des évaluations élevées au fil du temps. Nous réduisons alors notre position. C’est le cas pour Goodfood et du fournis-seur de logiciels Kinaxis (KXS, 214,65 $), au Canada, ainsi que de Trex et du fournisseur de logiciels infonuagiques pour les centres d’appel Five9 (FIVN, 163,35 $US), aux États-Unis.
L.A. — Vous détenez Richelieu et Tecsys depuis longtemps ? Comment ces placements ont-ils évolué ?
N.C. – Nous avons le grossiste Richelieu (RCH, 37,74 $) depuis son entrée en Bourse en 1993 et il a très bien performé depuis. En mars, nous avons ajouté au placement en croyant que la récession procurerait des occasions d’achat, mais le titre a surtout bien performé parce que la rénovation est robuste. Le fournisseur de logiciels de gestion de la chaîne d’approvisionnement Tecsys (TCS, 40,46 $) commence à profiter de son virage santé. Les hôpitaux américains reportent des procédures à cause de la COVID-19, mais il est clair que l’approvisionnement de fournitures critiques devient un élément durable pour le système américain de la santé.
À court terme, le coût de ce virage tempère les profits, mais une fois que l’équipe de vente élargie sera plus productive, la croissance des bénéfices devrait rattraper celle des revenus.