CONSEIL À L'ENTRÉE. Il n'a jamais été aussi simple de bâtir un portefeuille ...
CONSEIL À L’ENTRÉE. Il n’a jamais été aussi simple de bâtir un portefeuille diversifié soi-même, à peu de frais, grâce aux fonds négociés en Bourse (FNB). Encore faut-il s’y prendre correctement ; la simplicité ne veut cependant pas dire que l’investisseur est à l’abri des erreurs.
Comme les fonds communs, les FNB contiennent un ensemble de titres. Il peut être passif et reproduire un indice boursier ou géré activement par un gestionnaire de portefeuille. Comme pour les actions, il peut être échangé à n’importe quel moment de la séance boursière, alors qu’un fonds commun s’échange une seule fois par jour, explique Jean-Philippe Cadieux, directeur principal des Solutions d’investissement à Banque Nationale Investissements. Toutefois, le FNB s’échange en nombre entier d’unités, et pas en dollars, comme pour les fonds communs. Par exemple, on peut acquérir 80 unités, mais pas 80,5 unités.
L’investisseur autonome passe ses ordres d’achat et de vente sur un compte de courtage en ligne, comme il le fait pour des actions. Jean-Philippe Cadieux invite les investisseurs à fixer un prix limite lors de ces transactions pour éviter qu’elles se fassent à un moment où la valeur marchande est désavantageuse.
La facilité avec laquelle on peut effectuer des transactions ne doit pas vous conduire à abuser des bonnes choses. Lorsqu’on multiplie les transactions, on multiple aussi les frais, prévient le spécialiste. Un des avantages du FNB est de pouvoir acquérir un panier de titres et donc d’éviter les frais de transactions qu’il faudrait débourser pour acheter plusieurs titres boursiers.
Rester concentré sur ses objectifs
D’ailleurs, les FNB ne devraient pas être utilisés pour faire de la spéculation, croit Jay Aizanman, conseiller stratégique chez Desjardins Global Asset Management. «Ce sont des produits d’investissement, et comme pour tout produit d’investissement, l’investisseur doit regarder ses objectifs, recommande-t-il. C’est la question la plus importante qu’il doit se poser.»
La construction du portefeuille doit ainsi répondre à ces objectifs, tout en tenant compte des risques tolérés par l’investisseur. Ce dernier doit au préalable déterminer son profil d’investisseur et sa tolérance au risque. Qu’il investisse de façon autonome ou qu’il soit conseillé par un professionnel, l’épargnant ne doit jamais négliger cette étape. «Connaissez-vous comme investisseur», plaide Jay Aizanman. Par exemple, une personne qui épargne en vue d’acheter une maison ne devrait pas prendre les mêmes risques qu’un jeune professionnel qui prépare sa retraite.
Une fois ses objectifs déterminés, l’investisseur choisira ses FNB parmi trois grandes catégories. Le FNB à gestion passive vise à répliquer un indice connu, comme le Dow Jones ou le TSX. Le FNB à gestion active, pour sa part, est supervisé par un gestionnaire. Ce type de FNB est avantageux quand l’indice ciblé est relativement facile à battre, comme les indices d’obligations d’entreprises. Le FNB factoriel réplique, pour sa part, des indices basés sur des règles. Le iShares Canadian Dividend Aristocrats (CDZ) est un exemple de FNB factoriel. Son principal critère est de sélectionner les grandes sociétés canadiennes qui ont augmenté leurs dividendes au cours d’au moins quatre des cinq dernières années.
Jean-Philippe Cadieux croit que la personne qui fait ses premiers pas dans l’univers des FNB devrait commencer par les FNB à gestion passive, qui procurent une grande exposition au marché à faible coût. Si plusieurs experts jugent qu’une exposition indicielle est suffisante, le directeur principal ne croit pas qu’on devrait s’y limiter si notre profil et notre tolérance au risque le permettent, car ce serait passer à côté d’occasions de rendement, selon lui. En regardant du côté de la gestion active, on peut aller chercher des orientations plus précises, par exemple, un FNB dans lequel le gestionnaire ne sélectionne que certaines actions canadiennes afin d’obtenir un rendement supérieur aux indices de cette catégorie.
Enfin, l’investisseur pourrait compléter son portefeuille avec les FNB factoriels, pour miser sur un secteur d’activité précis, ou sur des thèmes comme le développement durable. Par contre, il serait très risqué de construire son portefeuille uniquement avec des FNB factoriels : ce serait concentrer le risque sur une petite partie du marché, sans la diversification nécessaire à un portefeuille complet, pointe Jean-Philippe Cadieux.
Il est possible de bâtir un portefeuille d’investisseur entièrement composé de FNB. «L’univers des FNB est assez large pour que presque tous les investisseurs puissent bâtir un portefeuille entier», estime Jay Aizanman.
Derrière le nom
Le nom du FNB donne certaines informations sur son contenu, mais il ne dit pas tout. Deux fonds ayant une domination semblable pourraient être plus différents que leur nom ne le laisserait croire, prévient Jay Aizanman. Un émetteur de FNB peut avoir sélectionné certains titres, alors qu’un autre émetteur aura probablement effectué un autre choix, même si l’objectif est proche. Aussi, un FNB d’actions canadiennes peut détenir les titres sous-jacents directement tandis qu’un autre pourrait s’y exposer par le biais de produits dérivés. «C’est pourquoi on doit comprendre précisément ce qu’on achète», précise Jay Aizanman.
Ce travail de recherche, facilité par les documents mis à disposition par les émetteurs de FNB, peut aussi permettre à l’investisseur de vérifier son exposition à des titres qu’il cible, ou au contraire qu’il veut éviter.
Éviter les erreurs
Les FNB indiciels permettent de s’exposer à un large panier de titres, mais il y a parfois des limites à l’effet de diversification qu’ils procurent. Par exemple, le secteur financier et les ressources naturelles pèsent lourd dans le S&P/TSX à Toronto tandis que le secteur de la santé est peu présent. Pour le marché des États-Unis, le S&P 500, bien qu’il contienne plus de 500 grandes sociétés, est en fait fortement influencé par quelques entreprises. «À elles seules, de cinq à dix sociétés influencent beaucoup le S&P 500», met en garde Jay Aizanman.
Si votre portefeuille contient plusieurs FNB, il vous faudra également le rééquilibrer ponctuellement. L’idée est de vérifier que la répartition de votre portefeuille correspond toujours à vos objectifs. Cet exercice devrait être fait au moins une fois par an.
L’investisseur devrait se méfier des idées fausses au sujet de la liquidité. «Souvent, on entend dire qu’il faut éviter les FNB qui sont échangés en faible volume, pointe Jay Aizanman. C’est faux : on devrait plutôt surveiller le volume échangé dans les sous-jacents», c’est-à-dire les titres qui sont représentés dans le FNB. En effet, un FNB détenant des titres liquides, comme les actions de grandes sociétés, atteindra plus facilement son objectif de refléter un indice, car le gestionnaire du FNB pourra facilement effectuer des modifications. Par contre, si le FNB détient des titres peu souvent échangés, «le gestionnaire aura de la difficulté à refléter vraiment le prix réel des sous-jacents», pointe Jay Aizanman.
Les investisseurs autonomes devraient également se tenir loin des FNB à effet de levier. Ces produits financiers peuvent multiplier les gains… mais aussi les pertes. «Le levier est un instrument très sophistiqué, souligne Jay Aizanman. Même les investisseurs institutionnels évitent ce genre de leviers, car ils ne sont pas faits pour des portefeuilles bâtis pour le long terme.»
Il est possible de se lancer dans le monde des FNB sans payer le prix de ses erreurs. Les comptes d’essai, que propose la majorité des courtiers à escompte, permettent de se familiariser avec ce véhicule financier en effectuant des transactions fictives.