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CELI: vous pourriez payer des impôts sur vos profits

Morningstar|Publié le 22 septembre 2023

CELI: vous pourriez payer des impôts sur vos profits

Si un investisseur prévoit négocier activement des actions dans son CELI, il serait prudent de consulter un avocat-fiscaliste averti avant toute opération importante ou fréquente, dans le but de comprendre et de limiter les risques. (Photo: 123RF)

Un compte d’épargne libre d’impôt (CELI) est un outil utile pour mettre de l’argent de côté après avoir fixé des objectifs à court et à long termes. Les Canadiens peuvent contribuer pour un certain montant annuellement et assurer ainsi la croissance de leurs actifs libres d’impôt avec leurs CELI. Cependant, le CELI comporte certaines restrictions qui visent à éviter les abus et les manipulations du régime.

Par exemple, le day trading est interdit en ce qui concerne les CELI. Une décision judiciaire récente a adressé un message clair aux investisseurs utilisant leurs CELI pour les opérations fréquentes: vous devrez peut-être payer des impôts sur vos profits.

Dans le cadre de cette décision, la Cour canadienne de l’impôt a déterminé qu’un investisseur, dont le CELI avait connu une hausse considérable, passant de 15 000$ à plus de 617 000$ en trois ans seulement, était coupable de day trading dans ce régime.

Les investisseurs doivent savoir comment éviter les opérations interdites sous forme de day trading avec leurs CELI et les conséquences s’ils n’y parviennent pas.

 

Qu’est-ce qui est considéré comme du day trading dans un CELI?

Malheureusement, il n’y a pas de test disponible dans la Loi de l’impôt sur le revenu pour déterminer les cas de day trading, car il s’agit d’une détermination factuelle. «L’ARC estime généralement que le day trading a lieu quand il y a un grand volume d’opérations et que la période entre l’achat et la vente de titres individuels est relativement courte, se terminant souvent en une seule journée», explique Matt F. Trotta, vice-président, Planification fiscale, de la retraite et successorale, chez CI Global Asset Management, à Calgary, en Alberta.

Pour déterminer si un investisseur exerce des activités commerciales, l’ARC évalue de nombreux facteurs, y compris la fréquence des opérations, les titres négociés, les compétences en placement, le temps passé à négocier et l’intention de revendre à profit.

«Puisque les CELI sont habituellement prévus comme étant libres d’impôt, l’apparence d’une entreprise imposable par un CELI offre la possibilité d’augmenter les recettes fiscales et l’ARC continuera d’y jeter un œil», dit Trotta.

Même s’il n’existe aucun critère ou seuil définitifs pour établir les activités de placement qui représentent des «activités de placement régulières», «l’ARC classe toutefois les activités comme la négociation de devises étrangères, la vente d’options et la négociation excessive de valeurs mobilières dans la catégorie des activités commerciales», dit David J. Rotfleisch, fiscaliste à la Rotfleisch & Samulovitch Professional Corporation, à Toronto.

Le day trading, ajoute-t-il, est groupé au sein des activités de négociation excessive de titres en raison de la fréquence à laquelle les investisseurs négocient des valeurs mobilières à l’intérieur de leurs CELI.

Il se pourrait qu’à la suite du dossier récent impliquant Ahamed v. the King, l’ARC choisisse d’examiner les CELI d’encore plus près.

 

Qu’est-ce qu’un «placement admissible» dans un CELI?

Les placements admissibles dans un compte d’épargne libre d’impôt (CELI) sont les mêmes que ceux admissibles dans un régime enregistré d’épargne-retraite (REER).

Tel que décrit dans la Loi de l’impôt sur le revenu et ses règlements, cela comprend l’argent comptant, les CPG et autres dépôts, la plupart des titres cotés à une bourse de valeur désignée, les fonds communs de placement et les fonds distincts, les obligations, les titres de créance d’une société cotée en bourse et ceux qui ont une cote de catégorie investissement, entre autres.

Selon la définition qu’a adoptée l’ARC quant au placement admissible, le commerce d’actions est normalement accepté. Cependant, «le problème est le risque que les day traders soient qualifiés de gestionnaires d’une entreprise de négociation à même leurs CELI», dit Rotfleisch.

De plus, certaines institutions financières qui administrent des CELI peuvent avoir des politiques internes qui limitent davantage les types de placements admissibles.

En ce qui a trait au day trading, «la négociation fréquente de nombreuses valeurs spéculatives, qui seraient autrement des placements admissibles, peut être un signe de l’exploitation d’une entreprise de day trading», indique Trotta.

Également, d’un point de vue fiscal, il existe des placements interdits — tels que les placements dans les dettes ou les actions d’une société dont l’investisseur est propriétaire à au moins 10% — qui pourraient entraîner de graves pénalités fiscales s’ils étaient identifiés dans le CELI d’un investisseur.

 

La ligne entre les placements légitimes et le day trading

Le but de l’investissement est d’obtenir des gains et, de préférence, des gains élevés. Cela est vrai pour le CELI, tout comme pour tous les autres instruments d’épargne. Pour les investisseurs ayant des placements sur une plus longue période, inutile de s’en faire. «Ce qui n’est pas raisonnable et est inquiétant, c’est lorsque les stratégies [d’investissement] sont évaluées sur une base horaire, quotidienne ou même hebdomadaire, et les activités de négociation sont importantes», affirme Trotta.

Puisque les CELI sont conçus pour demeurer relativement passifs, il faut porter une attention particulière à la fréquence des opérations effectuées dans ces comptes. «Quoique tout gain élevé ou taux de croissance élevé puisse attirer l’attention de l’ARC, l’ampleur des activités est très importante, particulièrement si des valeurs spéculatives représentent un élément considérable du portefeuille d’un CELI», souligne Trotta.

Les points de référence clés devraient donc être le temps, les efforts et les compétences que la personne alloue au développement de son portefeuille, plutôt que la simple croissance des fonds.

«À mon avis, les investisseurs ne devraient pas s’inquiéter simplement s’ils ont des placements admissibles pour un CELI et que ces placements ont connu une croissance rapide», assure Trotta.

Rotfleisch se plaint que puisque les CELI sont conçus spécialement pour permettre aux Canadiens d’accroître leurs économies par l’obtention d’un revenu de placement libre d’impôt, punir ceux qui négocient à même leurs CELI est une mise en application erronée de la politique fiscale. «Il ne devrait pas y avoir d’interdiction de la négociation de titres ou de la participation à tout placement admissible», argumente-t-il.

«Les investisseurs supportent déjà les risques accrus de perdre la totalité de leur contribution à leur CELI en négociant des titres, contrairement à ceux qui optent pour des placements plus conservateurs et plus sûrs.»

Pire, les lois actuelles sont plus susceptibles de nuire aux jeunes investisseurs que d’empêcher les spéculateurs d’expérience de faire un mauvais usage du système, ajoute-t-il.

Les institutions financières devraient en faire plus pour avertir les investisseurs des risques de leur participation active aux placements de CELI. «Très souvent, elles n’ont pas informé correctement les investisseurs», prétend Rotfleisch.

Si un investisseur prévoit négocier activement des actions dans son CELI, il serait prudent de consulter un avocat-fiscaliste averti avant toute opération importante ou fréquente, dans le but de comprendre et de limiter les risques.

 

Franchir la ligne: à quoi s’attendre?

Si on découvre que quelqu’un mène une entreprise de day trading avec un CELI, la principale conséquence sera la perte de la nature libre d’impôt du CELI. «Tous les revenus et les gains seraient imposés à titre de revenus d’affaires (lesquels sont davantage imposés qu’aux taux des gains en capital), en plus des pénalités et de l’intérêt potentiels si ces revenus sont ajoutés à la déclaration de revenus d’une année précédente lors d’une année subséquente», prévient Trotta.

Il pourrait y avoir des sanctions pécuniaires additionnelles en cas de litige infructueux, en plus des frais de représentation associés aux processus de règlement de différend et de litige.

«Si l’ARC effectue un contrôle fiscal ou réévalue un contribuable, il est probable qu’elle ait recueilli assez de preuves pour justifier sa position contre ce contribuable», dit Trotta.

Même si, en fin de compte, les constats de l’ARC se révélaient inexacts durant le processus de vérification ou à la Cour de l’impôt, «le différend peut être coûteux et le contribuable aurait pu l’éviter en recevant des conseils à l’avance», dit Trotta.

 

Un texte de Vikram Barhat, traduit par Mélanie Pilon.

 

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