L'industrie émergente du cannabis a vite fait déchanter les investisseurs, que ce soit au chapitre des résultats ou ...
L’industrie émergente du cannabis a vite fait déchanter les investisseurs, que ce soit au chapitre des résultats ou de la qualité des produits. Dans cet environnement encore très volatil, nous nous attardons sur les perspectives de cinq producteurs qui ont attiré l’attention des investisseurs dernièrement.
CANOPY GROWTH
(WEED, 25,87 $)
Valeur boursière : 9,4 G$
Recul depuis un an : 58,1 %
Rendement total depuis trois ans : 386,7 %
Multiple des revenus prévus en 2020 : 7,9 fois
Cours cible moyen : 51,71 $
Maintenant que Constellation Brands (STZ, 193,96 $ US) a pris en charge la destinée de Canopy Growth, la doyenne de l’industrie aura sans doute des choix stratégiques à faire.
C’est au futur patron qu’incombera cette tâche, mais il est clair que le producteur de vins et de bières veut rentabiliser l’investissement réalisé au fort prix de 48,60 $ par action en août 2018.
Après avoir déprécié le quart de son investissement de 5 milliards de dollars dans Canopy Growth et délogé son fondateur, Constellation espère recruter un nouveau président d’ici la fin de l’année.
Canopy est en tête de l’industrie si l’on se fie à la récolte de 40 000 kg de marijuana du premier trimestre. Le producteur intégré verticalement est aussi présent dans quatorze pays, en Allemagne surtout, où des filiales fabriquent des médicaments à base de cannabis ou de ses extraits.
L’entreprise ontarienne vise toujours 1 G$ de revenus annuels totaux à la fin de 2020, mais Douglas Miehm, de RBC Marchés des Capitaux, doute que ce soit possible en raison de la demande imprévisible pour les boissons infusées et les produits comestibles à base de cannabis après leur lancement en décembre.
Canopy affirme avoir plus de 50 produits à offrir dès que Santé Canada donnera son feu vert aux nouvelles catégories.
Le modèle de M. Miehm ne prévoit pas de bénéfice d’exploitation avant 2022 à cause des coûts élevés de la croissance tous azimuts du producteur qui multiplie les acquisitions et les alliances pour rester au-devant de l’industrie.
Le récent plongeon du titre a ramené Canopy Growth dans une zone d’achat intéressante, estime néanmoins John Chu, de Desjardins Marché des capitaux.
Pour sa part, John Zamparo, de Marchés mondiaux CIBC, vient de réduire son cours cible de 50 à 45 $ à cause des retards dans l’ouverture de magasins en Ontario, entre autres.
«Canopy mérite une plus-value de 15 % par rapport à son industrie en raison de son encaisse de 2 G$, de son affiliation à Constellation et de la vaste étendue de ses activités», dit-il.
Ce cours cible équivaut à un multiple de 10 fois les revenus prévus d’ici la mi-2020, moins un escompte de 20 % qui reflète le risque que l’achat potentiel de l’américaine Acreage Holdings (ACRG.U, 5,80 $) tombe à l’eau.
CRONOS
(CRON, 10,42 $)
Valeur boursière : 3,6 G$
Recul depuis un an : 12,7 %
Gain depuis trois ans : 796,6 %
Multiple des revenus prévus en 2020 : 7,5 fois
Cours cible moyen : 18,25 $
Le petit producteur ontarien est chèrement évalué, mais il se positionne bien pour la future vague des produits dérivés de cannabis et de chanvre, selon ses partisans.
L’évaluation de 7,5 fois les revenus prévus reflète surtout la confiance que procure l’actionnariat de 45 % d’Altria (MO, 42,99 $ US). Le géant des cigarettes a l’option de prendre le contrôle de Cronos après y avoir investi 2,4 milliards de dollars.
D’autres partenariats sont aussi prometteurs à plus long terme, croit John Zamparo, de Marchés mondiaux CIBC.
«Cronos est déficitaire, mais son capital de 6 $ par action procure aux dirigeants la latitude d’adopter une stratégie à plus longue haleine», fait-il valoir.
Les dirigeants veulent faire de Cronos un fournisseur différencié de produits dérivés à valeur ajoutée tels que les crèmes et autres spécialités.
Des partenariats avec l’américaine Ginkgo Bioworks et l’israélienne Technion le placent à l’avant-plan des nouvelles molécules et des applications du cannabis, croit l’analyste.
Cronos vient aussi de prendre pied dans le créneau américain des cannabinoïdes, l’ingrédient actif du chanvre, avec l’achat de la marque bien en vue Lord Jones, dont les produits se retrouvent dans 1 000 points de vente, dont plus de 170 boutiques de cosmétiques Sephora.
M. Zamparo prévoit que les revenus de 56 millions de dollars de la société en 2019 grimperont à 252 M$ l’an prochain, puis à 430,7 M$ l’année suivante.
Il entrevoit un premier bénéfice d’exploitation de 100 M$ en 2021.
AURORA CANNABIS
(ACB, 4,82 $)
Valeur boursière : 5,0 G$
Recul depuis un an : 61,5 %
Rendement total depuis trois ans : 138,5 %
Multiple des revenus prévus en 2020 : 7,7 fois
Cours cible moyen : 9,50 $
Le producteur d’Edmonton a perdu des partisans après avoir raté ses propres objectifs de revenus en 2019 et avoir repoussé à 2020 son premier bénéfice d’exploitation.
Le chef de file souffre de l’ouverture trop lente de points de vente, surtout en Ontario et en Colombie-Britannique, ce qui lui a fait perdre des occasions.
Les revenus manqués surviennent au moment où la société accroît ses dépenses pour mettre en place la chaîne d’approvisionnement nécessaire aux nouveaux produits comestibles à base de cannabis prévus en 2020.
Sa santé financière soulève donc des questions puisque ses pertes d’exploitation et ses dépenses en capital équivalent à l’encaisse au bilan.
La société rétorque qu’elle a la marge de manoeuvre voulue après avoir vendu un intérêt dans une autre société de cannabis et avoir porté son financement bancaire à 360 M$. Elle repousse aussi certaines dépenses en immobilisations moins prioritaires.
Malgré ces pressions à court terme, Matt Bottomley, de Canaccord Genuity, juge que sa masse critique justifie une recommandation d’achat. Ses revenus de presque 100 millions de dollars au dernier trimestre sont 40 % supérieurs à ceux de son plus proche rival Canopy. Son modèle financier prévoit un premier bénéfice de 0,05 $ par action et des ventes de 777 M$ en 2020.
Douglas Miehm, de RBC Marchés des Capitaux, espère que la société Aurora se dénichera un partenaire externe, comme Canopy Growth et Cronos Group avant elle, pour l’épauler financièrement avant de faire le saut aux États-Unis.
L’investisseur activiste Nelson Peltz conseille le président d’Aurora à cet égard depuis le mois de mai, mais rien n’a transpiré jusqu’à maintenant. Les pertes d’exploitation et la chute du secteur en Bourse ralentissent peut-être le démarchage.
Pour sa part, John Zamparo, de Marchés mondiaux CIBC, aimerait voir un bilan plus solide, un partenaire et une percée américaine avant de revenir au titre.
L’achat récent de Hempco Food & Fiber, un transformateur de chanvre de Vancouver, dans un échange d’actions de 63,4 M$, donne peut-être un avant-goût de ses plans au sud de la frontière.
L’achat d’un producteur américain établi de plants de chanvre (une cousine du cannabis contenant peu de l’élément psychoactif) serait bien perçu, croit aussi M. Miehm.
ORGANIGRAM HOLDINGS
(OGI, 3,93 $)
Valeur boursière : 564 M$
Recul depuis un an : 42,4 %
Gain depuis trois ans : 51,7 %
Multiple des revenus prévus en 2020 : 2,4 fois
Cours cible moyen : 11,45 $
Malgré certains ennuis de production, le producteur du Nouveau-Brunswick gagne des adeptes.
Ses faibles coûts de production, de quelque 90 cents par gramme de fleur séchée, se démarquent notamment dans l’industrie.
«Organigram n’a pas la notoriété des grands producteurs, mais il est un bon opérateur comme en témoigne le bénéfice d’exploitation des quatre derniers trimestres», indique Greg Taylor, du Fonds d’occasions liées à la marijuana Purpose.
Le gestionnaire voit d’un bon oeil que le président depuis 2017, Greg Engel, compte une vingtaine d’années d’expérience dans l’industrie pharmaceutique.
La société a mené plusieurs projets au cours de la dernière année. Elle s’est associée en juin au concepteur de San Francisco du vaporisateur stylo PAX Era, qui utilise des cartouches de concentrés de cannabis.
Organigram dépense aussi 15 millions de dollars pour installer une chaîne automatisée de production de chocolat qui devrait entrer en service cet automne.
La société de Moncton a enfin investi 10 M$ dans la Hyasynth Biologicals, de Montréal, qui met au point un procédé de fabrication de cannabinoïdes purs à partir de souches de levures.
Son titre offre un bon rapport risque- rendement puisqu’il s’échange encore à un multiple «raisonnable» de 6,5 fois le bénéfice d’exploitation de 61,5 M$ prévu en 2020, note John Zamparo, de Marchés mondiaux CIBC, qui place son cours cible à 9 $.
Organigram n’a pas de partenaire stratégique, mais Rahul Sarugaser, de Raymond James, croit que le producteur serait une cible de choix pour tout acquéreur de l’industrie alimentaire ou pharmaceutique qui voudrait percer l’industrie du cannabis. Il fixe son cours cible à 11 $.
CURALEAF HOLDINGS
(CURA, 8,00 $)
Valeur boursière : 2,8 G$
Gain depuis un an : + 3140,0 %
Gain depuis trois ans : n.d.
Multiple des revenus prévus en 2020 : 2,5 fois
Cours cible moyen : 16,57 $
Le fournisseur émergent est l’un des acquéreurs les plus actifs de son industrie, aux États-Unis.
Pour financer son expansion, la société du Massachusetts a réalisé une émission de 400 millions de dollars en octobre 2018, après l’achat inversé d’une coquille déjà inscrite à la Bourse des valeurs canadienne CSE.
Malgré les restrictions fédérales, Curaleaf ambitionne d’élargir sa présence à plusieurs États américains dans les industries du cannabis, du chanvre et de tous leurs dérivés.
Sa gamme de produits inclut déjà les concentrés, les huiles, les gélules, les crèmes et les friandises.
En mai, Curaleaf a acheté le fabricant d’huiles Cura Partners, de Seattle, dans une transaction record pour l’industrie qui valait alors 949 M$ US, dans un échange d’actions.
En juillet, Grassroots, de Chicago, s’est ajouté pour 875 M$ US, dont 75 M$ US comptant.
Ces deux transactions attendent l’approbation des autorités.
Une fois ces achats conclus, Curaleaf sera présente dans 19 États et comptera 69 points de vente et un million de pieds carrés de superficie pour la culture du cannabis.
Greg Taylor, du Fonds d’occasions liées à la marijuana Purpose, a acheté des actions additionnelles au cours des derniers mois, car l’évaluation du titre lui semble relativement peu chère pour sa croissance rapide.
La société encore déficitaire vise des revenus d’un milliard de dollars américains en 2020, ce qui en ferait la plus importante dans son industrie au sud de la frontière, dit-il.
L’entreprise est contrôlée par le vice-président exécutif du conseil Boris Jordan, un investisseur américain qui a fait fortune en Russie. Il détient 30,5 % des actions et 82 % des droits de vote.
L’homme d’affaires russe Andrei Blokh détient aussi 28 % des actions.