Il est particulièrement important, en période d’incertitude, de se montrer intelligent avec son argent, assure Mme Mander, et de donner la priorité à la résilience de la dette et, en fin de compte, de s’assurer que sa base financière soit sécurisée avant de chercher à la développer. (Photo: La Presse Canadienne)
Toronto — Les investisseurs canadiens qui ont traversé une année 2022 tumultueuse feront face à une incertitude supplémentaire au cours de l’année à venir, dans un contexte de risque de récession accru, de taux d’intérêt plus élevés, d’inflation persistante, de nervosité du marché boursier et de chute libre du marché immobilier.
Des professionnels de l’investissement et des experts en finances personnelles estiment que la façon la plus facile de faire fructifier son argent cette année est de garder les choses simples.
Le moment est bon pour investir en Bourse, maintenant que les prix ont beaucoup baissé, en particulier pour les personnes qui ont du temps devant elles, fait valoir Michelle Hung, experte en investissement et autrice de The Sassy Investor.
«Investir dans certains grands fonds indiciels larges comme l’indice S&P 500, l’indice composé S&P/TSX et les fonds de dividendes de haute qualité est bon pour la croissance monétaire à long terme», affirme-t-elle.
«Il y a une bonne valeur [dans ces produits] avec des entreprises qui versent des dividendes réguliers et ont un potentiel de croissance modeste et sont moins volatiles que, par exemple, les entreprises technologiques. Les actions des banques canadiennes entrent dans cette catégorie. Il est toujours bon de les avoir dans son portefeuille.»
Mme Hung suggère également d’inclure certaines options de placement plus sûres, comme les certificats de placement garanti (CPG). Les deux principales caractéristiques des CPG sont la durée et le taux d’intérêt.
«Certains CPG paient plus de 5% par an», souligne-t-elle.
Mme Hung ajoute qu’avec des taux d’intérêt plus élevés, les produits à revenu fixe, tels que les obligations, sont maintenant de meilleures options d’investissement que n’importe quand dans la dernière décennie.
Les liquidités ne sont plus honnies
En ce qui a trait aux marchés boursiers, Carol Schleif, chef des placements de la division américaine Family Office à la Banque de Montréal, s’attend à ce qu’ils passent de la nervosité aux échanges à l’intérieur d’une fourchette donnée, alors que les investisseurs s’installent dans la nouvelle normalité des taux d’intérêt plus élevés. Un marché lié à une fourchette donnée survient lorsque le prix des actifs financiers comme les actions ou les matières premières se négocie dans une fourchette relativement étroite pendant une période prolongée.
«Il existe des moyens d’équilibrer les risques d’investir dans des actions. Il faut être diversifié dans les capitalisations boursières, les endroits et les industries. Il faut surveiller les coûts et les volumes de transactions. Il faut adopter une attitude à long terme et utiliser la moyenne d’achat et le rééquilibrage à son avantage», précise-t-elle.
Favoriser la liquidité en ce moment n’est pas une mauvaise idée, ajoute Mme Schleif.
«Les liquidités ne sont plus considérées comme des déchets. De nombreux conseillers intègrent les liquidités dans les recommandations d’allocation d’actifs — alors qu’elles n’ont jamais été considérées comme une classe d’actifs à part entière. Les investisseurs peuvent être payés pour être patients», note-t-elle.
Les liquidités dans un portefeuille de placement donnent une marge de manœuvre en période d’incertitude financière.
En considérant le marché boursier comme un véhicule pour créer de la richesse, Diana Orlic, gestionnaire de portefeuille et conseillère en patrimoine chez Richardson Wealth, affirme qu’il est important de tenir compte de l’étape de la vie dans laquelle on se trouve.
«Les jeunes veulent en fait de terribles marchés, parce que ce sont eux qui achètent et qu’ils veulent acheter à bas prix», explique-t-elle.
«Pour ceux qui sont établis et qui ont une bonne valeur nette, je pense que c’est le moment idéal pour revoir son portefeuille. Ceux qui ont des gains doivent les prendre. S’il y a des choses avec lesquelles on n’est pas à l’aise, il est maintenant temps de faire une mise au point.»
Mme Orlic affirme préférer actuellement les marchés canadiens pour les actions des matières premières, des matériaux et des services aux collectivités et les marchés américains pour les actions des services financiers et des soins de santé.
Les actions technologiques ont été malmenées en 2022, et même si Mme Orlic ne s’attend pas à ce qu’elles soient les leaders des prochains mois sur le marché, elle n’a pas de perspective négative sur ce secteur.
«Je pense qu’il y a encore de la place pour la croissance (dans ce groupe). Mais est-ce que (la technologie) fonctionnera comme les années précédentes? Je pense que cela reste à voir.»
Actifs plus risqués
Pour les personnes à la recherche d’occasions d’investissement moins conventionnelles, Mme Hung croit que le marché des cryptomonnaies vaut toujours la peine d’être examiné, car les véhicules plus populaires, comme le Bitcoin et l’Ethereum, tenteront de reprendre pied après une année 2022 difficile.
«J’ai un œil sur la cryptomonnaie maintenant qu’elle est si peu appréciée. Ce n’est pas pour tout le monde, mais pour ceux qui peuvent supporter des risques plus élevés, c’est une classe d’actifs à surveiller», explique-t-elle.
L’immobilier est un bon investissement tant qu’on ne met pas tous ses œufs, ou la plupart, dans ce panier, prévient Mme Orlic.
«Si tous les actifs d’un investisseur sont dans l’immobilier, un problème pourrait se présenter si certains immeubles de placement ne se portent pas bien ou si les gens ne paient pas. A-t-on les liquidités nécessaires pour les maintenir pendant les périodes difficiles? A-t-on les liquidités pour le maintenir si les taux d’intérêt augmentent et les coûts hypothécaires augmentent?»
Mme Schleif souligne que les droits miniers, les terres agricoles, le vin et l’art sont des investissements alternatifs à considérer. Il est cependant crucial d’obtenir de bons conseils pour sélectionner les bons investissements alternatifs et comprendre leurs implications fiscales, prévient-elle.
Lorsqu’elle recherche des occasions d’investissement, Parween Mander, conseillère financière et coach financière, exhorte les gens à ne pas être impulsifs au milieu de tout le bruit, qui s’est vraiment intensifié pendant la pandémie de COVID-19.
«Je pense que nous devons rester conscients du rôle des médias sociaux et des conseils en finances personnelles qui encouragent les gens à profiter des marchés immobiliers et boursiers actuels et à investir parce que les choses sont moins chères», juge-t-elle.
«Des conseils comme acheter un bien immobilier pour le transformer en logement à louer sur Airbnb, se lancer dans la cryptomonnaie ou sélectionner des actions particulières sont des conseils très dangereux, parce que certaines personnes pourraient croire qu’ils sont de bons conseils pour eux simplement parce que c’est un “bon moment pour investir”.»
Il est particulièrement important, en période d’incertitude, de se montrer intelligent avec son argent, assure Mme Mander, et de donner la priorité à la résilience de la dette et, en fin de compte, de s’assurer que sa base financière soit sécurisée avant de chercher à la développer.