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Des planifications à revoir pour l’inclusion des gains en capital

Dany Provost|Édition de la mi‑juin 2024

Des planifications à revoir pour l’inclusion des gains en capital

Chez les personnes qui ne sont pas actionnaires d’une société, l’augmentation se fera sentir à la vente de biens dont la valeur est importante. (Photo: 123RF)

Dans le budget fédéral du 16 avril dernier, il a été annoncé que le taux d’inclusion des gains en capital passerait à 66,66%, à l’exception des premiers 250 000$ chez les particuliers, qui demeureraient à 50%. Plusieurs planifications de retraite sont à revoir à cause de cette mesure et certains éléments clés doivent être pris en considération. 

Les personnes qui ne sont pas dans les affaires 

Chez les personnes qui ne sont pas actionnaires d’une société, l’augmentation se fera sentir à la vente de biens dont la valeur est importante. Ces biens prennent généralement la forme d’un immeuble, qu’il soit une résidence secondaire, un bien à usage personnel ou un immeuble à revenus. 

Or, l’effet de la mesure sera de l’ordre de 8% à 9% sur le montant du gain en capital qui excédera 250 000$. Par exemple, si un gain en capital de 750 000$ était généré, les 500 000$ excédentaires seraient inclus à raison de 16,67 points de pourcentage de plus (66,67% au lieu de 50%), soit 83 333$, dans le revenu imposable de l’année de la vente. À un taux d’imposition de 50%, par exemple, l’effet net serait de l’ordre de 42 000$. 

La résidence principale n’est pas touchée par ce nouveau taux d’inclusion, étant donné l’exonération de gain en capital sur la vente de cette catégorie d’actif. 

Cela dit, il est raisonnable de penser que, à moins de valeurs particulièrement élevées, les ajustements à apporter à la planification de la retraite devraient être relativement modestes pour cette clientèle. 

Les personnes qui sont dans les affaires 

Ici, la question est un peu plus complexe. La principale raison est l’absence du palier de 250 000$ dans les sociétés par actions. Ces dernières paieront ainsi un impôt additionnel sur les gains en capital dès le premier dollar. L’inclusion supplémentaire atteindra alors 16,67 points de pourcentage sur tous les gains en capital. 

Certaines décisions particulièrement importantes devront être prises avec l’application des nouvelles règles.  

L’une d’elles a trait à la question fondamentale de la pertinence de créer ou non une personne morale avec son entreprise. En faisant fi d’autres considérations que celles d’ordre financier et fiscal, la constitution en personne morale sera bénéfique dans la mesure où les dépenses additionnelles créées par la présence d’une société, après impôts, sont plus que compensées par le fait de ne payer qu’un seul impôt (celui de la société), pendant une certaine période. 

Voyons un exemple pour illustrer ce point. 

Si les frais générés par la société (honoraires professionnels, assurances…) sont de 10 000$ par année et que le coût de la vie est de 100 000$ par année alors que les bénéfices nets, avant salaire, impôts et charges sociales, sont de 250 000$, la situation pourrait être la suivante : 

 Travail autonome Constitution en personne morale 
  Société Actionnaire 
Bénéfices avant impôts 250 000 $ 240 000 $ S/O 
Salaire S/O (145 672 $) 145 672 $ 
Charges sociales (10 521 $) (7 402 $) (4 812 $) 
Impôts (90 479 $) (17 820 $) (40 860 $) 
Coût de vie (100 000 $) S/O (100 000 $) 
Investissement 49 000 $ 69 106 $ 0 $ 

Si, au lieu d’investir, la société versait immédiatement le montant résiduel de 69 106$ à son actionnaire, ce dernier paierait possiblement 30 777$ en impôts et en charges sociales supplémentaires, ce qui lui laisserait un montant net pour investir de 38 329$ (69 106$ – 30 777$). Cette situation serait nettement déficitaire par rapport à celle du travailleur autonome, la grande différence venant des frais de 10 000$. 

Cependant, si le montant de 69 106$ était investi par la société et décaissé dans plusieurs années, la conclusion pourrait être inversée. C’est ici que le taux d’inclusion vient affecter les calculs en allongeant la période de détention nécessaire pour que la constitution en personne morale en vaille la peine.  

Par exemple, une période de détention de quelque 20 ans pourrait passer à 25 ans avec les règles actuelles. Il est toutefois possible que la situation fasse en sorte que la constitution d’une personne morale ne soit jamais judicieuse, toujours sous réserve qu’elle ne soit motivée que par ses aspects fiscaux et financiers. 

En clair, la modification du taux d’inclusion des gains en capital ne devrait pas changer énormément les planifications de retraite des personnes qui ne sont pas dans les affaires. Pour les autres, des simulations personnalisées sont nécessaires pour en connaître les effets réels.