PROFIL D'INVESTISSEUR. Un des pionniers de la gestion de portefeuille de FNB au Québec, Guy Lalonde, accueille ...
PROFIL D’INVESTISSEUR. Un des pionniers de la gestion de portefeuille de FNB au Québec, Guy Lalonde, accueille favorablement les nouveaux fonds innovateurs, même s’il n’y a pas recours. En l’approche indicielle et la rotation sectorielle, il considère avoir trouvé la recette gagnante depuis longtemps. Coup d’oeil sur sa carrière.
Pour tout investisseur, les crises économiques représentent une précieuse occasion d’apprentissage : les uns parce qu’ils apprennent de leurs propres erreurs, et les autres, plus futés, parce qu’ils apprennent de l’imprudence des premiers. Guy Lalonde dit faire partie du deuxième groupe.
Conseiller en placement, gestionnaire de portefeuille et premier vice-président à Financière Banque Nationale, il commence à travailler en finance au début de la vingtaine. Il est alors représentant inscrit. Sa première semaine de travail dans une firme de courtage commence un 19 octobre, «LE» 19 octobre, celui du krach de 1987. «J’ai tout vu débouler des premières loges, dit-il. C’est une bonne leçon dès le début. Ça donne une appréciation et un respect pour le risque.»
Guy Lalonde se considère chanceux de n’avoir pas eu de clientèle – et les soucis qui viennent avec – à ce moment-là. Constatant l’ampleur des dommages qui peuvent découler d’une telle crise, surtout dans les portefeuilles mal conçus pour gérer le risque, il a pris des notes. Il a convenu, par exemple, qu’il était important de toujours considérer les risques possibles, et pas seulement les rendements, qui viennent avec un portefeuille donné. «Ç’a été une bonne éducation, dit M. Lalonde. Cette expérience-là m’a suivi toute ma carrière et m’a montré que la meilleure approche consiste à éviter les erreurs coûteuses.»
Un premier contact
En 1992, commençant à s’ennuyer de la vente de produits financiers, Guy Lalonde fonde la société d’investissement Techno, une aventure dans laquelle il se lance avec son père. C’est là qu’il commence à faire de la gestion de portefeuille. «C’est ça qui attisait vraiment mon intérêt», dit-il.
Il y reste jusqu’en février 2003, moment où il se joint à Financière Banque Nationale, à Pointe-Claire. Il assure que sa précédente firme ne se portait pas mal, mais comme c’était une société fermée, il ne pouvait pas faire de démarchage. Il trouvait aussi que le travail était plutôt solitaire. Il fait donc le saut. Son expérience à la société d’investissement Techno l’a toutefois bien préparé à tirer parti des FNB, qui commençaient alors tout juste à apparaître et à se multiplier.
«La raison pour laquelle j’étais à l’affût des FNB, c’est que mon père et moi avions misé sur une stratégie de rotation sectorielle, explique-t-il. Plutôt que choisir entre une banque et une autre, par exemple, nous réalisions que c’était peut-être plus payant de choisir entre les banques et les autres secteurs.»
À cette époque, les FNB sectoriels sont apparus aux États-Unis. State Street était un des joueurs importants. Leur promesse originale : accéder à différentes industries – surtout américaines – à peu de frais. Dès son arrivée à Financière, Guy Lalonde commence donc à recourir aux FNB pour construire ses portefeuilles dans l’optique de tirer parti de leur liquidité, mais aussi de leur faible coût. Rien à voir avec les fonds communs. «Tout dollar qui n’est pas payé au fournisseur va dans la poche du client, dit-il. En quelque sorte, c’est un rendement garanti de ne payer que 0,25 % de frais plutôt 2,25 %.»
À ce moment-là, l’offre de fonds n’est pas aussi abondante et variée qu’aujourd’hui. Néanmoins, Guy Lalonde découvre qu’elle reste suffisante pour construire des portefeuilles entiers. En utilisant des fonds canadiens, et parfois américains, il réussit à construire des portefeuilles convenablement diversifiés.
Aujourd’hui, son équipe au sein de Financière Banque Nationale, Gestion Sigma, gère plus de 560 millions de dollars (M $) d’actifs ; 85 % de cette somme est investie en FNB.
Fusionner pour mieux gérer
En 2005, Christian Lamarre a vent de la stratégie de Guy Lalonde. C’est lui qui avait démarré la succursale de Financière Banque Nationale où ils travaillaient tous les deux. «Il gérait 170 M $, sa « business » était bien établie, raconte Guy Lalonde. Par contre, ça faisait plusieurs tours de carrousel qu’il faisait avec des gestionnaires qui devaient tous être bien bons, sauf qu’en cours de route, la chaîne débarquait. Ils n’arrivaient pas à livrer ce qu’ils promettaient.»
Autrement dit, des vedettes qui passaient de héros à zéro. Un phénomène que connaissait bien Guy Lalonde. Depuis des années déjà, il était familier avec les recherches démontrant que les gestionnaires actifs avaient de la difficulté à reconduire leur performance. Au top une année, ils se retrouvaient au bas de la liste 12 mois plus tard.
«Si on regarde les gestionnaires qui sont dans le premier quartile en matière de rendements, il n’y en a jamais plus que 20 % qui sont là quatre ans plus tard, et Christian voulait évacuer cette dynamique de sa pratique», dit Guy Lalonde. En 2005, Christian Lamarre et lui regroupent donc leurs pratiques sous le nom de Gestion Sigma. Son approche, celle de la gestion indicielle, était tout indiquée. «Il n’y a pas de mauvaise surprise. On n’essaie pas d’avoir complètement raison, mais on n’a jamais complètement tort.»
C’est pourtant un aspect de la gestion indicielle qui était beaucoup critiqué à l’époque. Les détracteurs avançaient qu’un gestionnaire était voué à sous-performer, puisqu’il achetait l’indice moins les frais. Une affirmation qui n’était pas tout à fait vraie.
«En achetant plusieurs indices, on se diversifie, et on obtient un rendement fiable avec la plus faible volatilité possible. Ça, c’est mieux que le TSX. Si on sait que l’on ne surperformera pas un indice donné, on sait aussi qu’on ne le sous-performera pas de 4 %, 5 % ou 6 %», explique Guy Lalonde. Une approche qui résonne avec sa clientèle.
«Les clients ont vécu des mésaventures avec d’autres gestionnaires. Ils se sont fait dire « Tel gestionnaire, ne manque pas ça », et ils ont été déçus. C’est pour ça que je ne me suis jamais préoccupé de ce que pensait l’industrie de mon approche : je mets mes clients en premier.»
Pour le père de deux jeunes enfants, aujourd’hui âgé de 56 ans, c’est un principe fondamental. «Notre succès est basé sur les meilleures pratiques et le respect de nos clients. Quand tu parles de ce que tu fais à tes enfants, ça, c’est important.»
Nouveaux développements, même stratégie
Depuis 2003, l’offre de FNB s’est beaucoup développée. On trouve aujourd’hui des fonds de gestion alternative, des fonds équipondérés, des fonds à faible volatilité, des fonds gérés activement. «Il y a aussi beaucoup de fonds thématiques, dit Guy Lalonde. Il y en a un sur le commerce en ligne, par exemple, qui vient de sortir. C’est la nouvelle saveur du mois.»
Parmi toutes les nouveautés, il y a certes de belles innovations et beaucoup de développements positifs, convient Guy Lalonde. «C’est un écosystème vivant et créatif.» Il se réjouit que beaucoup de fonds soient maintenant domiciliés au pays. Pour un investisseur qui veut acheter le S&P 500, par exemple, cela fait un casse-tête (et des frais) en moins : la conversion monétaire. «Mais, dans l’ensemble, nous avons gardé notre mouture initiale», dit-il.
Il continue, comme il le fait depuis le début, de se servir des fonds indiciels abordables et ultrasimples qui donnent un accès transparent à des catégories d’actifs, comme les actions canadiennes, l’or, ou les obligations à long terme. «Le reste, soit la construction et la gestion du portefeuille, on s’en charge.»