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Incident: quatre documents à régler rapidement

Claudine Hébert|Édition de la mi‑mars 2024

Incident: quatre documents à régler rapidement

Selon une enquête menée par l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), près d’un adulte sur deux au pays n’a pas encore rédigé de testament. (Photo: 123RF)

L’inflation rogne déjà assez notre portefeuille, voici quelques éléments financiers que l’on a avantage à régler dès à présent pour nous éviter — ainsi qu’à nos proches — des tracas inutiles en cas d’incident.

 

1. L’assurance invalidité

 

Avoir des assurances auto et habitation ainsi qu’une bonne couverture médicale si on voyage à l’extérieur du Québec, c’est bien. « Se constituer un portefeuille en matière d’assurances de personnes, c’est encore mieux », soutient le planificateur financier Dany Provost, qui est aussi l’auteur du livre As-tu réglé ça? S’occuper de ses affaires avant que le trouble commence, publié aux éditions Saint-Jean en 2021.

Selon lui, l’assurance invalidité, qu’on appelle aussi assurance salaire, est l’une des plus importantes protections que tout adulte sur le marché de l’emploi devrait détenir. « Particulièrement si on est travailleur autonome », précise ce professionnel de la firme SFL Expertise, qui est aussi collaborateur pour le journal Les Affaires et son pendant web, LesAffaires.com.

Selon l’Association canadienne des compagnies d’assurance de personnes (ACCAP), un peu moins de 60 % de la population active au Québec détiendrait actuellement ce type de protection. Sur ces personnes assurées, plus de 85 % étaient couvertes par une assurance collective au travail. Les autres détenaient une assurance individuelle.

L’assurance invalidité, qui coûte en moyenne de 1 % à 3 % du salaire annuel, permet généralement de remplacer entre 60 % et 85 % de notre salaire normal pour une période déterminée advenant que l’on soit temporairement incapable de travailler ou invalide de façon permanente à la suite d’une blessure ou d’une maladie.

L’Autorité des marchés financiers (AMF) recommande toutefois d’être vigilant et de bien lire les clauses des contrats des produits d’assurance invalidité proposés. Dans un rapport publié en 2021, l’AMF affirmait qu’une demande d’indemnité sur cinq présentée par les assurés auprès des assureurs est refusée. « La majorité de ces refus (60 %) sont notamment liés à des limitations ou à des exclusions, à des maladies préexistantes ou encore au non-respect de la définition des ententes », peut-on lire dans le document.

 

2. L’assurance vie

Autre outil financier qui permet de protéger les siens : l’assurance vie. « Dès que nous avons une famille, en l’occurrence des enfants mineurs à charge, l’assurance vie est vivement recommandée. Cette protection permet à nos proches de maintenir leur train de vie au cas où on décède. D’ailleurs, elle permet de couvrir nos frais funéraires si nous ne détenons pas de préarrangements à cet effet », avise Dany Provost. Évidemment, il ne faut pas oublier d’indiquer le nom du bénéficiaire sur sa police. « Autrement, le montant de l’assurance sera partagé entre les héritiers légaux (enfants et parents) », précise l’expert financier.

Selon l’ACCAP, près de 22 millions de Canadiens disposaient d’une assurance vie en 2021, la couverture totalisant plus de 5 milliards de dollars, soit l’équivalent de 442 000 $ par ménage. « Plus on commence jeune à cotiser pour ce type de police, plus le coût de la prime est avantageux », note le planificateur. Généralement, le coût de la prime mensuelle varie d’une quinzaine à une centaine de dollars en fonction de l’état de santé, de l’âge, du sexe et du type d’emploi.

 

3. Le testament

Prendre des décisions financières éclairées, c’est aussi planifier sa succession. Selon une enquête menée par l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), près d’un adulte sur deux au pays n’a pas encore rédigé de testament. Cette statistique frôlerait même les 80 % chez les jeunes adultes de 18 à 35 ans. Bien que la majorité des Canadiens âgés de 65 ans et plus possèdent un testament (95 %), l’ACFC soutient que plus de la moitié d’entre eux n’a pas mis à jour le document au cours des cinq dernières années. Ce qui, soutient l’agence, pourrait ne plus refléter leurs volontés. La rubrique « Combien ça coûte », publiée à la page 31, est justement consacrée aux divers coûts liés à la rédaction du testament et autres documents juridiques, tels que le mandat de protection et la procuration.

À ce propos, selon l’ACFC, moins de deux adultes sur cinq disposeraient d’un mandat de protection permettant de confier à une personne de confiance la gestion de son argent, de ses biens et de ses affaires en cas d’inaptitude. Ce nombre fond même à moins d’une personne sur dix chez les adultes de moins de 35 ans.

 

4. Contrat de vie commune

De tous les pays du G7, le Canada est l’endroit où l’on compte la plus grande proportion de couples en union libre (23 %). C’est aussi au Québec que la

popularité de ce type d’union est la plus répandue, avec deux couples sur cinq. « Malheureusement, plus de la moitié de ces couples en union libre croit à tort détenir le même statut légal que les couples mariés », observe Hélène Belleau, professeure à l’Institut national de la recherche scientifique et titulaire de la Chaire argent, inégalités et société (INRS-Chambre de la sécurité financière). Une confusion, dit-elle, qui peut avoir des conséquences désastreuses en cas de séparation.

Dans le cadre de ses recherches, Hélène Belleau a découvert qu’un conjoint de fait sur deux croit que le partage des biens au moment d’une rupture se fait à parts égales, et deux sur cinq pensent que le conjoint moins fortuné a droit de demander une pension pour lui-même ou elle-même. « Erreur dans les deux cas », dit-elle.

D’où l’importance d’établir un contrat de vie commune, soutient le planificateur financier Dany Provost. Ce document juridique, qui peut être signé devant notaire ou deux témoins, permet aux deux conjoints de préciser la contribution de chacun pour l’hypothèque, le loyer, les factures et autres dépenses. Il permet aussi de partager les biens équitablement en cas de rupture.

Dans leur livre L’amour et l’argent. Guide de survie en 60 questions (Éditions Remue-ménage, 2017), Hélène Belleau et Delphine Lobet indiquent la procédure à suivre aux couples qui optent pour la formule devant témoins. « On s’assure d’abord que les initiales de chacun figurent sur toutes les pages du contrat et que tous les paragraphes et les pages sont numérotés », soulignent les autrices. Les signatures des deux témoins (si possible des gens hors de la famille) doivent apparaître sur la dernière page.

Elles signalent que les témoins ne sont pas tenus de connaître le contenu du contrat. « Néanmoins, insistent-elles, ils doivent être présents pour la signature des conjoints. » Ils pourront ainsi en attester l’authenticité si l’union tourne au vinaigre.

Précisons que ce contrat ne remplace aucunement le testament ou le mandat de protection. « Il peut, malgré tout, être contestable par un des deux signataires », concède Hélène Belleau. Pour cette raison, indique-t-elle, il est souvent plus simple et bien moins risqué de se marier. « Un mariage minimaliste peut coûter moins de 100 $ et être tout à fait valide », mentionne la professeure. Pour célébrer un mariage, il suffit d’être en présence de deux témoins et d’un bénévole (un membre de la famille, un proche ou ami) qui répondra aux conditions et au formulaire accessible en ligne sur le site du Directeur de l’état civil », avise-t-elle.

 

Tout dans le même tiroir

Bien entendu, il ne suffit pas de détenir tous ces documents pour mettre à l’abri les gens qu’on aime. « Encore faut-il qu’ils soient bien rangés en ordre dans un coffre ou un tiroir fermé à clé afin que nos proches n’aient pas à “revirer la maison à l’envers” pour les retrouver en cas de pépin », conseille Dany Provost. L’expert financier recommande d’ailleurs d’utiliser ce même coffre ou tiroir pour y loger les relevés de placement, les coordonnées des professionnels qui veillent sur nos actifs, les mots de passe pour accéder à nos documents, sans oublier les directives pour nos funérailles. Du moins, si on souhaite en avoir.