EXPERT INVITÉ. Aux dernières nouvelles, Berkshire Hathaway disposait d'une encaisse record de 122,4 G$ (il s'agit...
EXPERT INVITÉ. Aux dernières nouvelles, Berkshire Hathaway disposait d’une encaisse record de 122,4 G$ (il s’agit bien de milliards !). Cela représente une hausse de 10,5 G$ depuis le début de l’exercice 2019. Cette situation n’est pas nouvelle : l’encaisse de la société atteignait déjà la jolie somme de 86,4 G$ à la fin de 2016. Si les conditions restent inchangées, cette encaisse continuera d’augmenter, car la société dégage près de 5,0 G$ de flux de trésorerie libres par trimestre.
L’encaisse dont disposait Berkshire Hathaway au 30 juin dernier représente près du quart de la capitalisation boursière de la société. À mon avis, elle explique en partie le fait que le titre de Berkshire Hathaway n’a pas mieux performé que l’indice S&P 500 au cours des cinq dernières années.
De nombreux observateurs sont déçus par le niveau d’encaisse élevé de Berkshire Hathaway. Comment Warren Buffett, l’oracle d’Omaha et possiblement le plus grand investisseur des temps modernes, peut-il rester assis sur une telle montagne d’encaisse alors que les marchés boursiers continuent de s’apprécier ? La question lui a d’ailleurs été posée lors de l’assemblée des actionnaires de la société en mai dernier : «Pourquoi ne pas avoir investi cette encaisse dans un fonds indiciel du S&P 500 ?»
Buffett a répondu que Charlie Munger et lui «aiment avoir beaucoup de liquidités disponibles pour pouvoir agir rapidement. Les occasions sont peu fréquentes et nous espérons qu’elles se présenteront éventuellement». Quant à Munger, il a dit : «Ce n’est pas un péché d’avoir beaucoup d’encaisse.»
Dans un environnement où les taux d’intérêt sont presque nuls et où les marchés boursiers continuent de bien performer, la tentation est forte d’investir, même si les rendements offerts ne sont guère attrayants. On constate d’ailleurs que de nombreuses entreprises ont augmenté leur endettement au cours des dernières années. Les rares sociétés qui disposent d’un fort niveau d’encaisse font souvent l’objet de fortes pressions pour l’investir ou la verser à leurs actionnaires sous forme de dividendes ou de rachats d’actions. Ce n’est peut-être pas un péché de disposer de beaucoup d’encaisse, mais c’est généralement mal vu.
De notre côté, nous avons toujours privilégié les titres de sociétés qui disposent d’une généreuse encaisse.
À mon avis, un dirigeant d’entreprise doit posséder au moins trois qualités pour bien réussir : il doit à la fois être prudent et alerte. Il ne doit pas hésiter à investir lorsque de véritables occasions se présentent. Il doit rester indépendant d’esprit, c’est-à-dire prêt à agir différemment des autres lorsque cela lui semble la chose à faire. Il me semble que c’est précisément ce que font Buffett et Munger en accumulant l’encaisse dans les coffres de Berkshire Hathaway.
Ces trois qualités se transposent très bien à l’investisseur. Même si la pression est forte de minimiser son encaisse, un bon investisseur demeure prudent et investit celle-ci seulement lorsqu’il décèle de véritables occasions. Il ne se laisse pas influencer par la hausse des marchés boursiers et reste patient, dans l’attente d’occasions.
Le but ultime de l’investisseur est d’obtenir de bons rendements sans prendre trop de risque. C’est le même objectif que devraient avoir le propriétaire et le dirigeant d’une entreprise. Il est vrai que l’investisseur cherche à battre les marchés dans leur ensemble, mais sur une longue période, pas nécessairement chaque trimestre et chaque année.
J’estime que disposer d’encaisse en portefeuille est une bonne chose à faire en attendant de dénicher des occasions d’investissement intéressantes. Il est d’ailleurs important de souligner qu’une correction des marchés boursiers n’est pas nécessairement requise pour que des occasions se présentent ; elles peuvent survenir à tout moment dans certains secteurs ou des titres spécifiques.