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Les favoris des experts

Dominique Beauchamp|Édition de la mi‑octobre 2020

EN MANCHETTE. Les montagnes russes boursières que nous avons vécues ont de quoi donner le tournis.

EN MANCHETTE. Les montagnes russes boursières que nous avons vécues dans la foulée de la pandémie ont de quoi donner le tournis, si bien qu’il est difficile de s’y retrouver dans ce marché mouvementé. À titre d’inspiration, nous avons demandé à quatre gestionnaires de partager leurs meilleures suggestions de titres à considérer dans un contexte empreint d’incertitude.



David Caron

Gestionnaire de portefeuille principal, Industrielle Alliance, assurance et services financiers

Chacun à sa façon, les trois choix de David Caron devraient tirer leur épingle du jeu dans le monde post-COVID-19, selon le gestionnaire de portefeuille qui croit que leurs actions surpasseront le marché d’ici 12 mois.


CAE peut redécoller avant ses clients

CAE, 19,66 $

Ratio cours/bénéfices : 32,5 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : – 78,3 %

Le formateur de pilotes est un bon choix pour profiter de la reprise progressive du transport aérien, sans assumer autant de risque que comportent les titres des transporteurs, croit David Caron. Déjà, le nombre de vols par jour a doublé depuis avril, bien qu’ils soient toujours environ 20 % inférieurs au sommet de février 2020.

Le potentiel de CAE réside dans l’effet qu’aura sur ses marges un éventuel retour à la normale du taux d’utilisation de ses centres de formation. «Au pire de la pandémie, ces centres étaient utilisés à seulement 20 %. Cette proportion est depuis passée à 40 % et devrait tendre vers le taux de 70 % d’avant le coronavirus», entrevoit le gestionnaire de portefeuille de Québec.

CAE devrait aussi bénéficier de l’externalisation, par les sociétés aériennes, de la formation de leurs pilotes, une tendance qui a commencé avant la pandémie et qui devrait s’accélérer puisque les transporteurs doivent réduire leurs coûts. «CAE mène des discussions avec plusieurs transporteurs et devrait rafler des parts de marché», ajoute le financier. Étant donné l’importance de la division civile pour CAE, la reprise aurait un effet majeur sur le redressement des bénéfices. En attendant que l’industrie aérienne regagne de l’altitude, la société de Montréal est en bonne posture financière. CAE dégage des flux de trésorerie libres malgré le recul des revenus. Le carnet de commandes de sa division de formation pour l’industrie de la défense, qui lui procure 43 % des revenus, devrait aussi se regarnir à mesure que les gouvernements raviveront les projets mis en suspens.

L’évaluation de l’action est conforme à la moyenne des cinq dernières années, ce qui en fait un titre «peu cher» pour miser sur une remontée des revenus et des bénéfices, selon lui.

 

ATS Automation profite de son virage santé

ATA, 17,41 $

Ratio cours/bénéfices : 17,7 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : – 28,3 %

L’automatisation est en vogue dans cette ère numérique, mais ATS Automation s’y consacre depuis 1978. Autrefois ballottée par les cycles économiques, la multinationale ontarienne s’est diversifiée en 2011 dans le secteur des sciences de la vie, qui représente désormais plus de la moitié de ses revenus.

Cette stratégie l’a bien servie, signale David Caron. «Malgré l’impact de la pandémie sur les fabricants, les revenus du premier trimestre ont fléchi d’à peine 4 % tandis que les marges sont restées solides grâce à la croissance de 6 % de cette division.»

De surcroît, ATS pourrait profiter de la pandémie puisque sa cliente américaine Tessy Plastics est un des fournisseurs d’Abbott Laboratories (ABT, 144,44 $ US) pour la fabrication de trousses de tests de dépistage. Un premier contrat de 65 millions de dollars (M$) accordé en avril pour fabriquer deux chaînes de production de 10 millions de trousses par mois pourrait être le début d’autres commandes, estime le gestionnaire. «Puisque le secteur de la santé contribue à stabiliser les revenus lorsque l’économie flanche, ATS pourra accélérer la croissance de ses revenus lors de la reprise au lieu de seulement reprendre le terrain perdu», prévoit le financier.

Les divisions des sciences de la vie et du nucléaire, qui sont en croissance, représentent de 60 % à 65 % des revenus et du carnet de commandes, souligne le gestionnaire. Elles importent donc plus que celle du transport, qui doit se rationaliser en Europe et en Asie malgré le boom des investissements dans les véhicules électriques. «Dans l’immédiat, cette nouvelle restructuration laisse à penser que le transport prendra plus de temps que prévu à récupérer, mais la rationalisation devrait aider les marges à moyen terme», nuance David Caron.

La relocalisation des chaînes d’approvisionnement devrait aussi lui être favorable. Certaines entreprises réintègrent certaines étapes de fabrication tandis que les gouvernements veulent rapatrier la confection d’équipements médicaux de protection. «Ce phénomène est plus difficile à quantifier, mais il constitue un vent de dos», dit-il. Le titre d’ATS est aussi de moitié moins chèrement évalué (10 fois le bénéfice d’exploitation) que celui du géant américain Rockwell Automation (ROK, 219,99 $ US), qui a pourtant davantage souffert de la récession.

 

Open Text est bien positionnée pour le télétravail

OTEX, 56,74 $

Ratio cours/bénéfices : 13,9 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 46,5%

La gestion de documents numériques et d’échanges de données améliore la productivité et la gouvernance des entreprises. L’adoption massive du télétravail accentue la tendance favorable pour ces deux spécialités d’Open Text.

L’achat judicieux de l’américaine Carbonite, pour 1,4 milliard de dollars américains (G$ US), en novembre, positionne aussi particulièrement bien la société ontarienne pour la forte demande d’archivage sécurisé de données sur le nuage, soutient David Caron. «Open Text n’a pas la gloire ou la croissance d’un Zoom Video Communications, par exemple. Néanmoins, l’entreprise canadienne est un fournisseur important dans une industrie résiliente», ajoute le gestionnaire de portefeuille.

La société est plus mûre que les vedettes technos de l’heure, mais ses revenus récurrents (79,5 % des revenus) lui procurent des flux de trésorerie libres annuels de 900 M$ US.

Après un long passage à vide, la croissance interne devrait prendre du mieux, grâce à un nouvel effort de recherche et de développement de 2 G$ US et à l’élargissement de l’équipe des ventes et à d’autres initiatives de ventes croisées, entrevoit David Caron.

Open Text est un acquéreur actif et rentable, comme Constellation Software (CSU, 1520,04 $), mais son titre est nettement plus abordable. Le ratio cours/bénéfice de 13,9 fois le bénéfice prévu dans 12 mois est presque moitié moindre.

La société de Waterloo dispose de ressources financières de 1,8 G$ US pour financer sa stratégie d’acquisitions, mais son PDG reste discipliné, préférant le rendement sur le capital investi et les marges à la croissance rapide.

La société a élargi son terrain de chasse à l’analyse de données et aux services TI, si bien que son pipeline potentiel de candidates est bien garni.

 

Philippe Hynes

Président, Tonus Capital

Le gestionnaire a choisi trois titres encore sous-évalués et susceptibles de s’apprécier davantage au moment où la Bourse pourrait connaître un changement de leadership qui profiterait aux titres retardataires.


Recettes illimitées est bien positionnée pour la pandémie et la reprise

RECP, 10,86 $

Ratio cours/bénéfices : 11,4 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 121,3 %

Le franchiseur de St-Hubert, Chalet Suisse, Harvey’s, East Side Mario’s et The Keg a beaucoup souffert des mesures de confinement, mais il devrait ressortir de la pandémie moins meurtri que d’autres restaurants, pense Philippe Hynes. Les deux tiers de ses profits proviennent des redevances versées par les franchisés, une source de revenus qui a été plus stable que celles d’autres groupes de restauration, fait valoir le gestionnaire de portefeuille.

La chaîne St-Hubert, par exemple, a vu ses revenus reculer de moins de 10 % au printemps, puisque les commandes à emporter et la livraison ont profité du confinement à la maison.

L’entreprise a aussi appuyé financièrement ses franchisés pour survivre à la pandémie en offrant le report de redevances et l’aide directe aux loyers. Les bénéfices que la société tire de la vente en épicerie de produits affichant la marque de certaines de ses enseignes ont aussi doublé.

Tout le secteur de la restauration serait mis à mal à nouveau l’an prochain si la COVID-19 faisait encore des siennes après l’échéance des plans d’aide gouvernementaux. Recettes illimitées devrait néanmoins mieux s’en sortir tout en profitant davantage d’un éventuel retour des clients aux restaurants avec service aux tables, que ce soit dans trois mois, six mois ou un an. Plusieurs établissements indépendants risquent de fermer leurs portes, ce qui diminuera l’offre, ajoute-t-il.

L’évaluation du titre est bon marché. Il s’échange à un multiple de 7 fois le bénéfice d’exploitation prévu en 2021, comparativement à celui de 10,5 fois pour le franchiseur Groupe d’alimentation MTY (MTY, 35,69 $) et à la moyenne de 9,5 fois pour l’ensemble des restaurants à l’ambiance décontractée.

Ce ratio abordable offre un bon rapport risque/rendement au moment où les investisseurs ont des attentes élevées pour les vedettes boursières. «Si Recettes revenait à son évaluation historique de 9 fois, son titre pourrait doubler», illustre Philippe Hynes.

 

Le groupe de concessionnaires Penske Automotive profite déjà de la reprise

PAG, 48,18 $ US

Ratio cours/bénéfices : 9,1 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 34,8 %

Mieux connu pour ses 321 concessionnaires de voitures de luxe aux États-Unis et en Europe, Penske a mieux résisté que prévu à la pandémie parce que les ventes d’automobiles ont repris du tonus plus vite qu’on ne l’aurait pensé.

«L’automobile remplace le transport en commun pour plusieurs travailleurs, tandis que d’autres ont besoin d’un véhicule parce qu’ils déménagent en banlieue», explique Philipe Hynes.

En même temps, l’arrêt des chaînes de production des constructeurs a diminué les stocks d’autos neuves, ce qui diminue les réductions offertes par les concessionnaires. Penske Automotive Group bénéficie aussi du manque de voitures usagées, ce qui a soulevé les prix de 15,8 % depuis un an en août.

Résultat : son titre a déjà doublé par rapport au creux du printemps, mais il reste dans le rouge depuis le début de l’année.

En soi, cela lui confère un bon potentiel si on imagine que les concessionnaires devraient réaliser d’autres bonnes affaires lorsque les automobilistes rapporteront leur voiture louée au printemps prochain, dit-il. Penske n’a pas récupéré toutes ses pertes en Bourse parce que les négociations interminables pour le Brexit retardent encore le redressement attendu en Grande-Bretagne, où 133 de ses 176 concessionnaires européens sont établis.

Encore dirigé par Roger Penske, une icône du milieu automobile qui détient 44 % des actions, le dirigeant est aussi un bon répartiteur de capital dont tous les actionnaires devraient bénéficier. Le groupe pourrait rétablir dès cet automne le dividende suspendu au printemps, croit d’ailleurs Philippe Hynes.

Plus fondamentalement, la société devrait tirer parti du réinvestissement judicieux de ses profits ces dernières années, notamment le virage dans le segment des voitures usagées.

Évalué à 9 fois le bénéfice prévu en 2021, le titre mérite de se négocier à un multiple dans le haut de la fourchette de ses semblables, qui oscille entre 9 et 15 fois, soutient le gestionnaire.

 

mdf commerce veut accélérer sa croissance au bon moment

MDF, 8,55 $

Ratio cours/bénéfices : n.d.

Variation prévue des bénéfices en 2021 : n.d.

L’ex-Médiagrif s’est rebaptisée afin de tourner la page sur la diversification décevante dans les sites grand public LesPAC et Jobboom, de créer un sentiment d’appartenance chez les employés et de prendre un nouveau départ.

Recentrée sur ses plateformes de commerce unifié et d’appels d’offres depuis un an, la nouvelle mdf commerce dispose aussi de fonds fraîchement récoltés de 15 M$ pour financer ses investissements et réaliser des achats ciblés.

L’achat, en novembre 2019, de la montréalaise kCentric Technologies, de Montréal, a apporté 600 clients, surtout des États-Unis. Sa solution k-eCommerce, conçue pour les environnements Microsoft Dynamics et SAP Business One, facilite les ventes et le paiement en ligne des entreprises de taille moyenne. L’achat d’une plateforme américaine pour les appels d’offres gouvernementaux compléterait bien MERX, une filiale canadienne de mdf, entrevoit Philippe Hynes. «Bien qu’une partie de l’engouement actuel pour le commerce en ligne ne soit pas soutenable, l’entreprise est en bonne posture pour ajouter de nouveaux clients à sa plateforme canadienne de commerce en ligne, qui sert déjà IGA, Sports Experts et la SAQ.»

Si la société de Longueuil réalise la croissance interne et par acquisition promises, son titre devrait attirer de nouveaux investisseurs intéressés par un rare acteur du Web encore sous-évalué, explique le gestionnaire de portefeuille.

Si, par contre, le nouveau PDG Luc Filiatreault ne réussissait pas à rétrécir le fossé d’évaluation entre son titre et son industrie d’ici trois à cinq ans, mdf pourrait alors tomber dans l’oeil d’acquéreurs, croit le président de Tonus Capital.

Même si la comparaison est extrême, Philippe Hynes donne en exemple le chouchou canadien à forte croissance, mais déficitaire, Shopify (SHOP, 966,50 $). Ce titre s’échange à un multiple de 35 fois les revenus par rapport à 1,8 fois pour mdf, qui dégage des profits et des flux libres positifs. Fraîchement entrée en Bourse, BigCommerce Holdings (BIGC, 78,55 $ US) s’échange à un multiple de 39 fois les ventes prévues dans 12 mois.

 

Kim Chafee

Gestionnaire de portefeuille, Actions canadiennes, Addenda Capital

La gestionnaire d’actions canadiennes a choisi trois titres de qualité et bon marché en fonction de leur valeur intrinsèque. Les trois entreprises offrent en plus un bon rapport risque/rendement dans un contexte macroéconomique turbulent.

 

Groupe CGI redevient bon marché dans l’ombre des titans du Web

GIB.A, 90,36 $

Ratio cours/bénéfices : 16,8 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 16,5 %

Pendant que les géants du Web volent la vedette et explosent en Bourse, d’autres fournisseurs bon marché tombent dans l’ombre. Groupe CGI est l’un de ces doyens que le mouvement haussier n’a pas soulevés, car sa croissance plus modeste perd l’intérêt des investisseurs plus avides de gains rapides.

Le recul de son action depuis le début de l’année a creusé un énorme fossé par rapport au bond de 24 % de l’indice Nasdaq à saveur techno. Pourtant, la société-conseil en TI aide aussi les entreprises à réduire leurs coûts grâce à la numérisation et à l’optimisation de leurs processus, rappelle Kim Chafee.

Pendant que les chouchous technologiques ont de fortes attentes à satisfaire, la résilience des résultats de CGI pendant la pandémie est passée un peu inaperçue, si bien que son évaluation est inférieure à ses semblables, renchérit la gestionnaire de Toronto. En même temps, CGI conserve tous ses attributs : de solides flux de trésorerie disponibles, un bilan sain et une répartition disciplinée de son capital, ajoute-t-elle.

Son titre a donc le potentiel de renouer avec une évaluation plus proche de celle de ses semblables et de la valeur intrinsèque qu’Addenda lui attribue.

À moyen terme, CGI offre aussi un heureux mélange de croissance interne, d’acquisitions et de rachats d’actions, trois stratégies que la société dose en fonction de la conjoncture du moment. «CGI est un exemple de titre de qualité offrant une évaluation attrayante et dont les caractéristiques défensives nous plaisent dans l’environnement actuel», conclut Kim Chafee.

 

Wheaton Precious Metals est un bon moyen d’investir dans le refuge de l’or

WPM, 64,62 $

Ratio cours/bénéfices : 36,8 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 27,0 %

Wheaton Precious Metals, qui investit dans des gisements en échange de redevances sur la production, est un choix plus prudent pour miser sur le retour de l’or en tant que réserve de valeur. La société profite de l’appréciation du métal précieux qui gonfle les revenus qu’elle reçoit sans assumer aucun des risques de l’exploitation des mines.

Depuis plusieurs mois, le rendement négatif que procurent les taux après inflation redore l’attrait de l’or au moment où les gouvernements s’endettent pour sauver l’économie. «Puisque ces circonstances persisteront, il est raisonnable de croire que le cours du métal jaune restera autour du cours actuel, procurant de bons revenus aux 20 mines de Wheaton dans 11 pays qui produisent à bas coût», explique Kim Chafee.

L’entreprise de Vancouver a aussi investi dans neuf autres gisements en voie d’être mis en valeur. Les avantages bien connus de ce modèle d’affaires font en sorte que les sociétés de redevances aurifères ne sont plus bon marché par rapport à leur valeur intrinsèque, mais Wheaton serait un titre intéressant à considérer si son cours faiblissait, soutient la gestionnaire.

Kim Chaffee préfère Wheaton à la pionnière des redevances Franco-Nevada (FNV, 185,78 $) parce qu’elle investit strictement dans les gisements d’or et d’argent alors que la deuxième s’est diversifiée dans le pétrole ces dernières années.

 

Le fournisseur d’électricité Emera verse un bon dividende durable

EMA, 55,25 $

Ratio cours/bénéfices : 18,6 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 8,6 %

Le fournisseur d’électricité de la Nouvelle-Écosse coche plusieurs des cases de la liste des critères valorisés par l’analyse fondamentale d’Addenda Capital. Au moment où les taux sur les obligations gouvernementales sont à 0,55 %, son rendement du dividende de 4,5 % est très attrayant. De plus, la société s’est engagée à l’augmenter de 4 % à 5 % par année.

Ce rythme est plus modéré que par le passé parce que Emera préfère arrimer les versements à la croissance de ses flux de trésorerie afin de renforcer la pérennité du dividende. Ainsi, le groupe répartit son capital de façon à financer les investissements de 7,5 G$ US prévus sur deux ans, sans trop augmenter la dette, tout en versant un dividende élevé et durable, indique Kim Chafee.

En 2015, Emera a fait une importante incursion en Floride, où la population (et par le fait même la demande en électricité) est en croissance. Tampa Electric lui procure les deux tiers de ses bénéfices, précise la gestionnaire de portefeuille.

Emera n’a pas été aussi rapide que d’autres à réduire l’intensité de ses émissions de carbone, si bien qu’elle reçoit moins l’accolade de la part des investisseurs attentifs à la responsabilité sociale de leurs placements. Ce retard confère au titre un certain potentiel de rattrapage. Les investissements dans les énergies solaire et éolienne ainsi que la transition du charbon au gaz naturel qu’effectuent ses centrales devraient éventuellement hausser sa cote auprès de cette cohorte de plus en plus nombreuse.

 

Cimon Plante

Premier VP et gestionnaire de portefeuille, Financière Banque Nationale

Cimon Plante se tourne vers trois cas d’exception. Dans des industries durement frappées par la COVID-19, ces entreprises devraient tirer leur épingle du jeu pendant la pandémie et profiter de leur stratégie différenciée lors du retour à la normale.

 

Ulta Beauty émergera embellie de la pandémie

ULTA, 225,74 $ US

Ratio cours/bénéfices : 25,8 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 211,0 %

Avec des revenus de 6,7 G$ US le principal détaillant de cosmétiques peut s’appuyer sur ses forces pour traverser la tempête et rafler des parts de marché une fois que la pandémie sera maîtrisée, croit Cimon Plante.

D’ailleurs, son modèle omnicanal a permis de conserver une bonne partie des ventes pendant le confinement. Bien que le bénéfice ait chuté de 80 % au deuxième trimestre, les ventes ont atteint 70 % de leur total d’un an plus tôt.

Une Américaine sur cinq détient la carte de fidélité d’Ulta Beauty, et les adolescentes de l’ère Instagram sont des consommatrices que le marchand peut fidéliser tôt. «Les ventes en ligne gagnent du terrain, mais dans le segment des produits de beauté, les clientes aiment bien pouvoir essayer les produits dans les zones de beauté d’Ulta. D’ailleurs, 84 % du temps, le panier compte un article que la cliente achète pour la première fois», explique le gestionnaire de portefeuille.

Ulta Beauty pourrait aussi récupérer les parts de marché des détaillants qui ne survivront pas à la pandémie, entrevoit Cimon Plante, qui précise que 90 % des 1 264 boutiques d’Ulta se situent à l’extérieur des centres commerciaux.

Son titre a plongé de 304 $ US à 124 $ US de février à mars, avant de rebondir de 82 %. L’action se négocie tout de même au même point qu’en 2016. Pourtant, le bénéfice de 2019 était 69 % plus élevé que celui de trois ans plus tôt. «Je ne dis pas que le bénéfice de 11 $ US par action de 2019 reviendra demain, mais si l’on se projette sur 24 à 36 mois, on peut imaginer que le détaillant aura retrouvé sa rentabilité d’avant la COVID-19», explique le financier.

 

Hyatt Hotels devrait se distinguer dans une industrie mise à mal

H, 54,49 $ US

Ratio cours/bénéfices : 175,7 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 55,0 %

Qui sait quand les touristes rempliront les hôtels de nouveau, mais Cimon Plante fait le pari que le modèle d’affaires de Hyatt a l’avantage dans un secteur éprouvé. Le gestionnaire a aussi bon espoir que les voyageurs d’affaires en Amérique du Nord seront plus nombreux à vouloir reprendre contact en personne après une trop longue période de rencontres virtuelles.

Les séjours d’affaires, autres que les congrès, représentent le quart des revenus de Hyatt. «Ce segment pourrait éventuellement réserver de belles surprises une fois que les travailleurs se seront lassés des réunions vidéo», selon lui.

Dans l’intervalle, l’hôtelier continue de se transformer de propriétaire en gestionnaire d’hôtels, une stratégie amorcée en 2018. En faisant ce pivot, il a vendu des actifs de 1 G$ US l’an dernier. Ce modèle, qui a fait le succès de Marriott, exige moins de capitaux et permet à l’entreprise de se concentrer sur son savoir-faire.

Pour accélérer sa croissance, Hyatt compte aussi acheter et revendre des hôtels après les avoir transformés à son image, tout en conservant le contrat de gestion. Ce mode de fonctionnement requiert toutefois des investisseurs prêts à acquérir les hôtels. Cimon Plante croit que la qualité et le tarif moyen plus élevé de la gamme des chambres de la marque Hyatt attireront des acheteurs en quête de bons rendements financiers. «Maintenant que les banques centrales ont signalé que les taux demeureront faibles plus longtemps, l’immobilier devrait rester une option attrayante pour les gros investisseurs», ajoute le gestionnaire.

Hyatt bénéficie d’une capacité d’emprunt de 3,6 G$ US, soit environ 36 mois de liquidités. L’échéance moyenne de ses dettes est de cinq ans. Cette situation financière est amplement adéquate pour surmonter les difficultés pandémiques de son industrie, souligne-t-il.

 

Colliers International ressortira gagnante de la COVID-19

CIGI, 89,84 $ US

Ratio cours/bénéfices : 14,6 fois

Variation prévue des bénéfices en 2021 : + 188,3 %

Le courtier immobilier commercial attire l’oeil du gestionnaire de portefeuille. La diversité de ses marchés et de ses services l’outille bien pour surmonter la pandémie et retrouver sa forte croissance par la suite, selon lui.

Colliers International est en effet présente dans 68 pays, où elle génère de plus en plus de ses revenus de la gestion immobilière, une spécialité qui inclut même les services de consultation en ingénierie d’immeubles. «La société canadienne assure la gestion de deux milliards de pieds carrés. Ce virage a grandement élargi la taille de son marché tout en lui procurant des occasions de ventes croisées», explique Cimon Plante.

Ce modèle d’affaires, peu gourmand en capital, lui fournit aussi une source de revenus plus stable que les commissions de courtage. Les honoraires représentent environ la moitié de ses revenus.

La COVID-19 a fait chuter le nombre de transactions, mais le courtier a pu amortir le choc en réduisant ses coûts variables. Aux yeux de Cimon Plante, Colliers est un bon moyen détourné de mettre le pied dans immobilier commercial à moindre risque au moment où les autorités monétaires de la planète veulent garder les taux bas pour stimuler l’économie.

Le gestionnaire aime aussi le fait que les intérêts du PDG sont alignés avec ceux de l’ensemble des actionnaires, puisque Jay Hennick détient 40 % des actions.

Le titre a plongé de 59 % au pire de la chute boursière du printemps et s’échange au même cours qu’il avait en 2018, alors que ses perspectives à long terme ont peu changé.

Contrairement à ce que l’on croit, le courtage immobilier est encore très fragmenté, indique Cimon Plante. Les cinq plus gros acteurs ont ensemble à peine 20 % du marché, ce qui laisse beaucoup de potentiel d’expansion.