L’industrie d’ici pourrait-elle répondre à la demande mondiale?
François Normand|Édition de la mi‑juin 2021Pompe à pétrole, Alberta (Photo: 123RF)
MANCHETTE. Même si la demande mondiale de pétrole diminuera après 2030, les économies de la planète, surtout celle des pays émergents asiatiques, auront quand même besoin de produits pétroliers durant encore des décennies. L’industrie canadienne veut répondre à cette demande, mais pourra-t-elle y arriver ?
« Notre industrie peut continuer à progresser à long terme, même s’il y a une diminution de la demande après 2030 », insiste en entrevue le président et chef de la direction de l’Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP), Tim McMillan.
Le Canada est le quatrième pays producteur de pétrole après les États-Unis, la Russie et l’Arabie saoudite. En 2020, la production canadienne a totalisé 4,46 millions de barils par jour (b/j), soit un peu moins qu’en 2019 (4,68 Mb/j), selon l’ACPP.
En 2035, l’organisme prévoit que la production canadienne pourrait atteindre 5,85 Mb/j. Pour atteindre cette cible, l’industrie canadienne devra composer avec deux défis de taille.
D’une part, elle doit désenclaver ses marchés d’exportation. Actuellement, 98 % des exportations canadiennes de pétrole brut sont destinées au marché américain, selon le ministère canadien des Ressources naturelles. Cela signifie accroître la capacité des capacités de transport jusqu’à la côte du Pacifique, pour ensuite acheminer le pétrole en Chine et en Inde, par exemple.
En juin 2019, Ottawa a d’ailleurs donné le feu vert à l’expansion du pipeline Trans Mountain (entre Edmonton, en Alberta, et Burnaby, en Colombie-Britannique), pour faire passer la capacité de 300 000 à 890 000 barils de pétrole par jour — la mise en service est prévue en décembre 2022. « L’expansion de Trans Mountain permettra une diversification des clients pour le pétrole canadien », affirme Tim McMillan.
D’autre part, l’industrie canadienne doit demeurer concurrentielle dans un contexte où la stratégie climatique du Canada imposera une taxe sur le carbone de plus en plus élevée pour les émetteurs de gaz à effet de serre (GES).
La taxe fédérale — dont la Cour suprême a approuvé la constitutionnalité en mars — devrait s’établir à 40 $ la tonne pour l’ensemble de 2021, selon les indications d’Ottawa en décembre. En 2030, la taxe devrait atteindre 170 $, soit plus de quatre fois son niveau actuel.
Cette taxe aura nécessairement une incidence sur les coûts de production de l’industrie. Pour l’instant, Tim McMillan demeure prudent en ce qui a trait aux répercussions potentielles sur l’industrie pétrolière. « L’augmentation substantielle de la taxe sur le carbone aura certainement un effet significatif sur les Canadiens et sur l’économie canadienne dans son ensemble, insiste-t-il, mais il est trop tôt pour prédire comment chaque secteur sera touché. »