Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires

Lorsque deux familles (voire plus) ne font qu’une

Vikram Barhat|Édition de la mi‑novembre 2023

Lorsque deux familles (voire plus) ne font qu’une

(Photo: 123RF)

La combinaison de deux familles, d’un point de vue émotionnel et organisationnel, nécessite parfois une adaptation de taille. Ajoutez à cela les complexités financières de l’équation « à toi, à moi et à nous » et vous vous trouverez sur un terrain propice à d’acrimonieux désaccords.

Les familles recomposées sont confrontées à des défis uniques en matière de planification successorale. Voici un aperçu des défis à relever et des mesures à prendre pour éviter les litiges, protéger les actifs contre les créanciers et résoudre les problèmes affectifs.

 

Difficultés et complexité de la répartition du patrimoine dans les familles recomposées

Selon Terry Zavitz, conseillère financière et présidente de Zavitz Insurance & Wealth à London (Ontario), la planification testamentaire et successorale des familles recomposées présente des difficultés particulières, étant donné qu’il faut tenir compte de deux ou trois unités familiales individuelles, voire plus.

Elle cite les éléments suivants comme étant les plus importants:

  • Les intérêts du conjoint survivant et de sa famille par rapport à ceux du conjoint et de la famille précédents.
  • Les obligations légales en matière de droit de la famille et de soutien aux personnes à charge.
  • La dynamique affective qui peut compliquer le processus de prise de décision et conduire à des différends familiaux.
  • La complexité des lois sur la succession et la famille, qui répondent à un mandat provincial et varient en fonction de la province de résidence du défunt et celle où les biens immobiliers et autres actifs sont domiciliés.

 

Une bonne planification financière peut atténuer bon nombre de ces problèmes. Le processus commence par l’établissement d’un inventaire de l’actif et du passif et d’une liste des droits de propriété et des désignations de bénéficiaires.

En outre, il est essentiel de tenir compte des « obligations légales, comme les conventions d’actionnaires et les ententes de divorce ou de séparation, pour s’assurer qu’elles sont toutes transmises au destinataire prévu et que le testament est en corrélation avec toutes ces ententes, afin d’éviter les litiges juridiques et de garantir que la distribution de la succession prévue est effective », explique Terry Zavitz. 

Retenir les services de professionnels de la succession expérimentés peut assurer une planification exhaustive. Quelqu’un qui « comprend la complexité du droit successoral, familial et fiscal, et qui peut informer à l’avance le liquidateur successoral sur la répartition globale de la succession et sur la dynamique familiale », ajoute-t-elle.

La désignation d’un liquidateur impartial, capable de gérer les dynamiques familiales difficiles, peut aussi s’avérer bénéfique.

 

Considérations juridiques propres aux familles recomposées au Canada

Lors de l’élaboration de leur plan successoral, les particuliers doivent tenir compte des aspects juridiques propres aux familles recomposées au Canada.

Bien que chaque province ait son propre ensemble de lois successorales auxquelles il faut se conformer, il existe certaines constantes valables pour tous. Ainsi, « le conjoint a droit à la part qui lui revient en vertu de la législation sur le droit de la famille, les personnes à charge doivent être prises en charge et les accords prénuptiaux et entre conjoints précédents doivent être respectés », affirme Terry Zavitz.

« Il est de plus essentiel de faire appel à des personnes spécialisées dans les questions de planification financière complexes afin de s’y retrouver et de s’assurer que les volontés exprimées sont légalement acceptées dans la province de résidence ainsi que dans la province où se trouvent des biens immobiliers ou d’autres biens durables, qui sont régis par les lois successorales de la province où les biens sont situés », souligne Terry Zavitz.

Cela peut nécessiter de faire appel à des conseillers ou des planificateurs financiers, des notaires ou des avocats.

 

Stratégies de gestion des conflits potentiels 

Il est impératif d’anticiper et de gérer les éventuels conflits entre les beaux-enfants et les enfants biologiques sur l’héritage et la répartition des biens. 

Il doit s’agir d’une approche de communication ouverte entre tous les membres de la famille, afin de comprendre leurs attentes et leurs inquiétudes, puis d’aborder ces questions au fur et à mesure que des décisions sont prises en application du testament et du plan, dit Terry Zavitz.

« Si les membres de la famille sont jeunes, le plan doit être communiqué à l’avance à l’administrateur de la succession, ainsi qu’aux tuteurs désignés », précise-t-elle, ajoutant qu’une communication ouverte peut permettre d’éviter des surprises désagréables et d’éventuels litiges successoraux au moment du décès.

Cette approche proactive devient encore plus cruciale si l’on considère la perspective de trois intérêts concurrents ou plus dans la succession, ce qui augmente considérablement la probabilité d’un conflit et d’un litige ultérieur, processus qui n’est pas seulement « coûteux » financièrement, mais qui prend aussi beaucoup de temps et qui risque de briser ce qui était auparavant une unité familiale heureuse qui fonctionnait bien.

 

Outils financiers pour protéger les membres d’une famille recomposée

L’utilisation de fiducies dans le cadre de la planification successorale est devenue une stratégie efficace. « On peut faire appel aux fiducies de conjoint pour subvenir aux besoins du conjoint survivant tout en préservant les actifs des enfants issus de relations antérieures, ce qui permet d’éviter d’éventuels conflits futurs portant sur ces actifs », dit Terry Zavitz.

La fiducie en faveur du conjoint est un moyen de prendre soin de votre nouveau conjoint et de vous assurer que vos biens iront à vos propres enfants au lieu d’être exposés aux risques liés aux réclamations d’autres personnes, aux décisions de votre conjoint ou à une mauvaise planification.

L’assurance vie est un autre outil de planification successorale essentiel dans le cadre d’une famille recomposée. « L’assurance vie peut aider à égaliser la succession tout en garantissant que les articles de grande valeur comme les biens immobiliers et les participations dans des entreprises iront aux bénéficiaires prévus, que les personnes à charge seront financièrement pourvues, et elle pourra aussi être utilisée pour régler les derniers droits de succession », note Terry Zavitz.

Il est essentiel de noter que « les actifs détenus conjointement sont transmis au propriétaire survivant, ce qui peut ou non correspondre aux objectifs globaux de distribution de la succession », prévient Terry Zavitz. « La rédaction d’une ‘lettre de souhaits’, bien qu’elle ne soit pas juridiquement contraignante, peut aider l’exécuteur testamentaire ainsi que les membres de la famille à comprendre vos souhaits et le raisonnement qui sous-tend certaines décisions. »

 

Tenir les choses à jour

Selon Terry Zavitz, il faut revoir et mettre à jour régulièrement le testament et le plan de succession en général, au moins tous les cinq ans, ou plus souvent si des changements interviennent dans la famille, afin de s’assurer qu’ils restent pertinents et effectifs.

Elle recommande également de créer et de tenir à jour un document de synthèse de la succession, qui pourrait être d’une grande utilité pour l’exécuteur testamentaire. Veillez à inclure les éléments suivants dans le document :

  • L’actif et le passif;
  • Les numéros de comptes bancaires et l’emplacement des banques;
  • Les noms des avocats, comptables, planificateurs financiers et autres professionnels ayant une connaissance de la succession;
  • Les identifiants et mots de passe importants;
  • L’emplacement des documents importants;
  • Les noms des médecins et l’emplacement des dossiers médicaux.

 

Ces mesures peuvent garantir que tous vos proches seront pris en charge le moment venu.