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MTY: le retour en force du franchiseur demeure sous-estimé

Yannick Clérouin et Pierre-Olivier Langevin|Édition de la mi‑Décembre 2022

MTY: le retour en force du franchiseur demeure sous-estimé

(Photo: 123RF)

L’ART D’INVESTIR. Le franchiseur de restaurants Groupe MTY (MTY, 60,23 $) mérite non seulement que les investisseurs saluent la gestion financière exemplaire de ses dirigeants durant la pandémie, mais également son retour en force sur le front des acquisitions.

La plus récente bouchée prise par l’entreprise montréalaise, la chaîne américaine Wetzel’s Pretzels, constitue à notre avis une des acquisitions les plus prometteuses de son histoire.

À première vue, l’achat de 284 millions de dollars canadiens (M$CA) annoncé par MTY au début de novembre peut laisser certains investisseurs sur leur appétit. Or, lorsqu’on analyse la performance financière de la chaîne et ses perspectives de croissance dans le détail, il s’avère difficile de ne pas être enthousiaste.

La chaîne, fondée en 1994, exploite aujourd’hui 350 kiosques et enregistre un chiffre d’affaires d’environ 333 M $CA. Les établissements de Wetzel’s sont situés dans des lieux très fréquentés, tels les centres commerciaux, les amphithéâtres, les parcs d’attractions, comme Disneyland, les stations-service ou encore dans de grandes surfaces.

Fait assez impressionnant: les kiosques de Wetzel’s engrangent des ventes annuelles moyennes de 850 000$US (1,15 M $CA) et dégagent une marge bénéficiaire brute de… 80 %. La performance financière de Wetzel’s surpasse donc celle de la plupart des chaînes de MTY, dont celles qui exploitent des restaurants à service complet et vendent de l’alcool. Soulignons également que Wetzel’s a fait croître ses ventes comparables à chacune des dix années qui ont précédé l’éclosion du coronavirus en 2020.

La recette du succès de Wetzel’s est relativement simple:une seule enseigne, peu d’ingrédients et de fournisseurs, des collations faciles à préparer et des investissements minimaux requis pour ouvrir un nouveau kiosque. Un modèle qui se démarque de la plupart des autres restaurants exploités par MTY, lesquels requièrent habituellement un suivi plus assidu avec les franchisés, des investissements plus importants dans la décoration et les équipements, ainsi qu’une exécution plus complexe pour préparer les plats.

 

Fort potentiel d’expansion au Canada

Étant surtout concentrée sur le marché de la côte ouest des États-Unis, la chaîne pourra continuer d’ouvrir des restaurants au sud de la frontière à un rythme régulier pendant de nombreuses années. Wetzel’s a par ailleurs une présence modeste au Canada — elle exploite trois commerces dans les Prairies —, ce qui laisse entrevoir un fort potentiel d’expansion au pays.

Faut-il le rappeler, MTY bénéficie d’un avantage clé dans le créneau des foires alimentaires situées dans les tours de bureaux et les centres commerciaux. Grâce aux relations étroites qu’elle entretient avec les propriétaires de ces emplacements, la direction de MTY pourra accélérer l’expansion de Wetzel’s au Canada. Autre atout non négligeable de Wetzel’s:la nature de ses activités se révèle moins saisonnière que celles de certaines autres enseignes phares de MTY, dont la chaîne de friandises glacées Cold Stone. Considérant les perspectives de Wetzel’s, nous estimons que la direction de MTY paye une évaluation raisonnable pour cette chaîne.

 

Injustement sousévalué

Même si le titre de MTY a rebondi de plus de 30% depuis son creux de la dernière année touché à la mi-juin, il reste à notre avis nettement sous-évalué. Grâce à la saine gestion de ses finances et à l’ajout de deux chaînes d’envergure, l’entreprise présente un meilleur profil de risque (ajout de concepts complémentaires, diminution de la saisonnalité, etc.) et une plus faible concentration de ses revenus et bénéfices provenant de ses chaînes phares, dont Cold Stone et Papa Murphy’s, qu’avant le début de la pandémie.

Pourtant, l’action de MTY se négocie à un faible multiple de moins de 10 fois le bénéfice excluant les charges d’amortissement prévu dans la prochaine année. Si on fait exclusion de l’évaluation accordée au titre au plus fort de la pandémie en 2020, il s’échange encore à un ratio inférieur à son multiple moyen des cinq dernières années.

 

Un catalyseur au menu

En plus de la contribution des récentes acquisitions, MTY pourrait bénéficier d’un autre catalyseur dans la prochaine année: le retour de la croissance des ventes des établissements comparables (ouverts depuis plus d’un an). La direction de l’entreprise avait cessé de publier cet indicateur clé de la performance financière de ses restaurants dans les mois qui ont suivi l’éclosion de la COVID-19. Il était en effet inutile de publier ce baromètre lorsque des centaines de restaurants étaient fermés ou avaient des activités limitées.

Le PDG de MTY, Éric Lefebvre, s’était donné pour mission de donner un nouveau souffle à la croissance des ventes de ses restaurants, avant que la pandémie ne vienne bousculer ses priorités. En remettant l’accent sur l’amélioration du chiffre d’affaires des restaurants grâce à diverses initiatives (publicité, innovations au menu, etc.), MTY offrira aux investisseurs une autre raison de lui accorder une meilleure évaluation en Bourse. La relance des initiatives visant à donner un nouvel élan au chiffre d’affaires des restaurants existants se révèle nécessaire pour contrer le risque perpétuel d’essoufflement auquel sont confrontés les différents concepts de restaurant de MTY. Ce sera d’autant plus nécessaire dans les prochains mois, car l’entreprise sera forcée de ralentir le tempo des acquisitions pour digérer la grosse bouchée qu’elle vient de prendre.

 

Divulgation: les clients, associés et employés de Medici détiennent des actions de Groupe d’alimentation MTY.

 

EXPERTS INVITÉS

Pierre-Olivier Langevin est gestionnaire de portefeuille et associé chez Medici.
Yannick Clérouin est gestionnaire de portefeuille chez Medici.