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Qu’est-ce que l’aversion aux pertes et comment y faire face

Morningstar|Publié le 09 février 2022

Qu’est-ce que l’aversion aux pertes et comment y faire face

Au début de la soirée, les gens ont tendance à miser leurs jetons à la table de roulette très prudemment. (Photo: 123RF)

Personne n’aime perdre de l’argent. Les études démontrent que nous ressentons les pertes deux fois plus intensément que les gains, comme l’ont dit Daniel Kahneman et Amos Tversky en 1979, «les pertes sont plus tragiques que les gains». Autrement dit, si nous perdons 100 dollars, nous ressentons cette perte plus fortement qu’un gain de 100 dollars. Ce comportement s’appelle «l’aversion aux pertes» et il est dicté par la manière dont nous autres êtres humains prenons des décisions. Ce n’est pas notre faute, c’est juste dans notre nature.

Ce n’est pas la même chose que l’aversion aux risques

L’aversion aux pertes diffère de l’aversion aux risques, c’est-à-dire la tendance qu’ont les gens à préférer les résultats peu incertains à ceux qui le sont beaucoup, même si dans le deuxième cas le résultat moyen est égal ou supérieur en termes de valeur monétaire au résultat obtenu dans le premier. 

«Ce n’est pas vraiment que les gens n’aiment pas prendre de risque», dit Dan Kemp, directeur des investissements mondiaux à Morningstar Investment Management. «Ce que les gens n’aiment pas, c’est perdre quelque chose. Nous souffrons d’aversion aux pertes et vous savez de quoi je parle si vous avez déjà fréquenté un casino. Au début de la soirée, les gens ont tendance à miser leurs jetons à la table de roulette très prudemment, en évitant de perdre leur argent trop vite. Mais à la fin de la soirée, quand il ne leur reste que quelques jetons en poche, ils ont tendance à faire des paris plus risqués. Alors, les gens qui avaient une aversion au risque au début de la soirée quand ils avaient beaucoup de sous en poche deviennent avides de risque quand ils ont perdu cet argent, car ils essaient de récupérer leurs pertes. C’est exactement la même chose avec les placements.»

L’aversion aux pertes peut vous nuire

Il a été démontré que les investisseurs sont plus susceptibles de vendre des actions gagnantes dans le but d’«enregistrer des bénéfices», tout en ne voulant pas accepter la défaite en cas de pertes importantes. Quand les gens voient qu’une action ou qu’un fonds est en train de dégringoler, ils ressentent le besoin de limiter les dégâts. Cela peut ainsi les amener à vendre des placements qui ont à peine perdu de la valeur. Mais pareillement, s’ils perdent de gros montants d’argent, ils sont normalement très enclins à s’accrocher à leur action ou à leur fonds. Ils ne veulent pas vendre à ce stade-là, en espérant qu’ils récupèreront leur valeur de départ. C’est pourquoi l’aversion aux pertes peut vraiment nuire aux investisseurs, non seulement quand ils enregistrent de petites pertes, mais aussi quand ils refusent d’enregistrer de grosses pertes.  

Philip Fisher, investisseur américain dans les actions et fameux auteur de l’ouvrage Common Stocks and Uncommon Profits (Actions ordinaires, profits extraordinaires), a écrit: il n’existe pas d’autre raison unique pour laquelle les investisseurs aient perdu plus d’argent qu’en conservant un titre dont ils ne voulaient pas dans l’espoir de pouvoir le vendre et rentrer au moins dans leurs frais.  

Différencier les mauvaises décisions des mauvais résultats

Le regret joue également un rôle dans l’aversion aux pertes. Il peut nous amener à ne pas être capables de distinguer entre une mauvaise décision et un mauvais résultat. Nous regrettons un mauvais résultat, comme une série de rendements faibles d’un titre en particulier, même si nous avions choisi ce placement pour toutes les bonnes raisons. Dans ce cas, le regret peut nous amener à prendre une mauvaise décision de vente, comme liquider une société solide quand elle touche un creux au lieu d’y augmenter notre participation.

Comment y faire face

Il y a des façons d’éviter les mauvaises décisions. Dan Kemp suggère que l’une des meilleures choses à faire, c’est d’arrêter d’examiner son portefeuille. Plus l’on regarde son portefeuille et plus l’on est susceptible d’être conscient des hauts et des bas, et plus il est probable de se faire piéger par l’aversion aux pertes. « Si vous avez une bonne stratégie, que vous êtes un ancien conseiller, que vous avez diligemment mis sur pied une stratégie vous-même, ou que quelqu’un d’autre gère votre portefeuille, arrêtez d’y regarder aussi souvent », dit-il. «Vous devez vous livrer à des réexamens périodiques. Il est tout naturel de vouloir s’assurer que la personne qui s’occupe de votre argent convienne, ou que le risque associé aux fonds dans lesquels vous investissez soit adéquat. Mais il est beaucoup plus facile d’effectuer cette évaluation sur une période plus longue que sur un court laps de temps.»