EXPERT INVITÉ. Plusieurs conjoints de fait pensent qu'après un certain temps de vie commune, ils sont pratiquement...
EXPERT INVITÉ. Plusieurs conjoints de fait pensent qu’après un certain temps de vie commune, ils sont pratiquement dans la même situation que les conjoints mariés. Mais d’où vient donc cette fausse perception ?
Je suis toujours étonné de voir à quel point une certaine confusion existe dans l’esprit de plusieurs en ce qui a trait aux droits et aux obligations des conjoints de fait par rapport aux personnes mariées. Ce n’est pas la première fois que j’écris sur le sujet, mais je vais continuer à taper sur le clou… il faut éclaircir certaines choses.
Je pense que cette confusion vient du fait que dans plusieurs lois, on ne fait pas de distinction entre les époux et les conjoints de fait. C’est vrai. Mais ce n’est souvent vrai que dans certaines situations. Les choses peuvent être très différentes selon que l’on est ensemble, qu’on se sépare ou encore que la mort nous sépare.
On vit ensemble
Les lois fiscales obligent les conjoints de fait à déclarer leurs revenus comme les conjoints mariés. Ça veut notamment dire que les revenus du couple doivent être considérés dans le calcul des prestations pour enfants. Dans ce cas, les prestations pour les personnes monoparentales sont plus élevées que les familles en couple et on comprend qu’il s’agit d’une fraude de se «déclarer» comme célibataire alors qu’on est en couple.
Après 12 mois de «vie maritale», on est un couple fiscal. Point. Reste à savoir si vous vivez maritalement selon les critères que les tribunaux ont établis au fil des années. Vous pouvez très bien demeurer à des adresses différentes et être considérées comme des personnes en couple.
On se sépare (et on reste bien vivant)
C’est ici que le plus de monde est mélangé. Rien ne doit être partagé entre les conjoints de fait. Chacun part avec ses affaires, ses comptes de banque, ses fonds de pension, ses immeubles, etc. Les conjoints ne se doivent rien, à moins d’une cause exceptionnelle d’enrichissement injustifié.
Évidemment, si les conjoints de fait sont légalement copropriétaires d’un bien comme un immeuble, ils auront droit, chacun, à leur part. Mais les conjoints ne sont pas traités différemment des étrangers.
Il ne faut pas mélanger, ici, le droit des enfants à une pension alimentaire. C’est un droit des enfants, pas des conjoints.
Il n’y a qu’une seule façon de se protéger comme conjoint de fait, et c’est la suivante :
Signer une entente de vie commune, notariée.
Ce sont des mots magiques pour les conjoints de fait. Pas encore assez populaires, ces ententes peuvent contenir tout ce que les conjoints veulent – tant, évidemment que ça ne nuit pas à l’ordre public.
On peut y trouver, par exemple, des clauses qui reproduisent les règles du patrimoine familial ou du régime matrimonial. Mais pas nécessairement non plus. L’important est d’avoir ce document qui indique, de façon précise, comment le couple veut gérer la situation en cas de séparation.
Inutile de préciser que ce document devrait être produit lorsque le couple est en bonne relation. Sinon… bonne chance !
La mort nous sépare
Ici, plusieurs lois traitent également les conjoints de fait au même titre que les conjoints mariés. Par exemple, le Régime de rentes du Québec accorde, au conjoint de fait survivant, les mêmes droits que les conjoints mariés. C’est la même chose pour les régimes de retraite chez l’employeur ou encore les prestations de la CNESST. Dans ces cas, la durée de vie maritale est de 36 mois (12 mois pour les régimes de retraite sous juridiction fédérale).
Je pense que la plus grande source de confusion est ici. Celle qui mène à penser qu’il n’y a pas de différence entre les conjoints mariés et de fait. C’est vrai… dans ce que je viens d’écrire : il faut mourir. Et encore…
Lorsqu’on meurt sans testament, les conjoints de fait ne sont pas reconnus. Quand on dit que, sans testament, les biens de la succession sont dévolus à 2/3 aux enfants et 1/3 au conjoint, il s’agit du conjoint marié (ou uni civilement). Pour les conjoints de fait, la succession va à 100 % aux enfants. Si on n’a pas d’enfants, elle va aux parents et aux frères et soeurs. Rien au conjoint.
Vous comprenez l’importance du testament. Facile de régler ce problème.