(Photo: 123RF)
BLOGUE INVITÉ. Il y a une bulle dans les fonds indiciels! C’est l’affirmation-choc lancée récemment dans un article de Bloomberg qui compare la situation actuelle à celle des hypothèques à haut risque qui a mené à la crise financière de 2008. Wow, ça fait peur!
L’histoire n’est pas nouvelle et a été évoquée en 2017 dans cet article du New York Times, mais cette fois-ci plusieurs médias en ont parlé car ça vient de Michael Burry, un de ceux qui a su profiter de la crise de 2008. Dans les deux cas, l’alerte est donnée par des gestionnaires actifs qui estiment que les marchés n’évaluent pas correctement les titres de petites capitalisations, car trop de capitaux sont dirigés vers les titres de grosses capitalisations, sans égard à leurs évaluations.
Certes une sous-évaluation de certains titres de petite capitalisation est possible, mais dans l’ensemble, l’effet se doit d’être marginal et n’affectera pas significativement la valeur de la très vaste majorité des actifs.
La popularité des fonds indiciels a explosé au cours des dernières années, mais ça ne veut pas dire que ça crée une bulle dangereuse pour autant. Paradoxalement, si tous les actifs avaient été déployés en gestion active au cours de cette période, il est possible que l’on soit arrivé à la même valorisation pour l’ensemble du marché, tout en appauvrissant les investisseurs par le biais de frais plus élevés pour payer les services plus onéreux des gestionnaires actifs. Je le rappelle (voir ce billet), la gestion active est au mieux un jeu à somme nulle. La majorité des investisseurs y perdent, c’est purement mathématique!
Le prix marginal
La valeur d’une action est déterminée par le dernier prix payé, soit le prix marginal. Peu importe ce qui s’est passé dans les mois ou les années précédentes, c’est la dernière transaction qui importe. Lorsqu’une nouvelle information qui change la valeur perçue d’une entreprise est publiée, par exemple, lors de la publication de résultats financiers, le prix en bourse change presque instantanément. Il n’est pas nécessaire pour tous les investisseurs de vendre pour que le prix s’ajuste, quelques nouvelles transactions suffisent pour que le prix de l’action reflète la nouvelle valorisation de l’entreprise.
Le fait qu’une partie de l’actionnariat d’une entreprise soit fait à travers des fonds passifs n’y change rien. Ce n’est pas parce que plus de capitaux sont dirigés en gestion passive que le mécanisme de découverte de prix des marchés disparaît. Il faudrait que la quasi-totalité des actions d’une entreprise soit détenue à travers des fonds indiciels pour que ça pose problème. Ça n’arrivera vraisemblablement jamais.
En mars 2000, au sommet de la bulle technologique, il y avait peu d’actifs indiciels par rapport à aujourd’hui. Cette réalité n’a pas empêché les marchés de valoriser certaines sociétés à des niveaux stratosphériques.
La capitalisation boursière aux États-Unis
L’ensemble du marché boursier américain vaut environ 32 billions (32 000 milliards). Le S&P500, représentant les 500 plus grandes entreprises et environ 75% du marché total américain, vaut environ 24,4 billions. Enfin, les entreprises du Russell 3000, qui représente 98% du marché, valent environ 31 billions. Même si plusieurs milliers d’entreprises trop petites pour être incluses dans le Russell 3000 sont sous-évaluées, l’impact sur la valorisation totale du marché sera faible.
Bref, de parler d’une bulle dans les fonds indiciels pour justifier une sous-évaluation de certains titres de petites capitalisations ou d’avancer que la croissance importante de l’investissement passif est un risque pour la stabilité des marchés ne reflète pas le fonctionnement réel des marchés. Les marchés semblent peut-être chers, mais il faut trouver la cause ailleurs. À suivre dans un prochain billet de blogue.
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