Tite Frette offre un service personnalisé uniformisé dans ses 43 succursales à l'esthétique léchée. (Photo: Katia Tobar)
L’inflation et l’augmentation du coût de la vie pourraient bien entraîner quelques infidélités de la part des consommateurs au cours de la prochaine année. Pour les séduire, il faudra déclamer des mots d’économie, jongler avec les rabais et stimuler les sens en innovant.
Pour la première fois, l’attrait pour les réductions dépasse l’importance de l’expérience client, observe Michel G. Langlois, professeur au Département de marketing de l’ESG UQAM. «On assiste à un basculement», assure-t-il, appuyé par la dernière édition de l’indice de fidélisation des clients développé par la firme Emarsys. Ainsi, 58 % des 4008 répondants américains interrogés en août 2022 affirmaient être «plus fidèles aux détaillants qui proposent des rabais, des incitatifs et des récompenses», soit une hausse de 12 % par rapport à 2021, rapporte l’étude.
«Être partout»
Ce virage ne doit cependant pas pousser les marques à mettre de côté leurs investissements dans la création d’un lien émotif avec leur clientèle.
«Il faut être partout. Les détaillants doivent adopter une approche omnicanale et toujours garder l’aspect émotif en tête. Ils doivent personnaliser les offres, faciliter les retours, relancer les clients inactifs, offrir des rabais personnalisés», ajoute Michel G. Langlois. Cette approche a d’ailleurs permis à l’enseigne Tite Frette, spécialisée dans la vente de bières de microbrasseries québécoises, de se hisser en tête du palmarès WOW de Léger sur la mesure de l’expérience client.
«Chez nous, on veut connecter avec les clients», explique Karl Magnone, président fondateur de la bannière qui compte 43 franchises.
En plus d’offrir un service personnalisé uniformisé dans toutes les boutiques — grâce à la création d’une formation donnée par l’Académie Tite Frette — et de créer des boutiques à l’esthétique léchée pour encourager le magasinage, l’entreprise diversifie son offre étant donné l’inflation pour proposer des produits à prix compétitifs. Elle a également ajouté des paliers sur sa carte de fidélité afin d’augmenter la fréquence des rabais.
Un odorant outil de fidélisation
Au Centre sportif du Parc olympique de Montréal, on a misé sur l’innovation pour fidéliser la clientèle, en développant une signature olfactive en collaboration avec l’agence de marketing sensoriel Stimulation Déjà vu. «La gestion des odeurs est un outil très puissant dans la fidélisation [des clients], indique Michel G. Langlois. Plus on fait appel aux sens, plus on va envoûter les clients et créer un lien émotionnel.»
Onze diffuseurs ont été installés stratégiquement dans les aires d’accueil, à l’entrée et à la sortie des lieux, ainsi que dans les vestiaires, pas pour masquer les odeurs de bas imbibés de transpiration, mais pour procurer aux athlètes un sentiment de joie et encourager les réabonnements.
«On ne cherche pas ici à parfumer une pièce; on veut que ça sente la motivation», soutient Audrey Bernard, fondatrice de Stimulation Déjà vu, qui crée des expériences olfactives grâce à la récolte de données biométriques.
À quoi ressemble cette odeur de motivation? À une odeur de melon et de concombre fraîchement coupés qui, mêlée aux effluves persistants du chlore provenant des différentes piscines, rappelle les pique-niques estivaux et la crème solaire mal étalée.
L’agence a fait appel aux employés du centre sportif ainsi qu’à sa base de données montréalaise pour créer une odeur qui provoquerait une émotion positive et donnerait envie aux athlètes de revenir et même de ramener une partie de leur expérience d’entraînement à la maison, grâce à des déclinaisons sous forme de savons, shampooing et chandelles.
«On a réorienté les stratégies marketing sur la récupération et la rétention des abonnés, alors qu’avant, on misait beaucoup sur l’acquisition. Le marketing est alors devenu un instrument au service de l’innovation», assure Christina Pagé, directrice du marketing et de la commercialisation au Parc olympique. Le Centre sportif a aussi misé sur des atouts peu exploités avant la pandémie, comme la crédibilité de l’Institut national du sport du Québec, installé dans les locaux, «l’énergie de la place, assez unique», où on peut s’entraîner aux côtés d’athlètes olympiques, et la modernisation des équipements.
«On va accompagner nos athlètes dans la gestion des changements, plutôt que d’acheter une pub radio pour de l’acquisition de nouveaux abonnés», illustre Christina Pagé. Le centre sportif affiche aujourd’hui fièrement un taux de réabonnement de 70 %, et ce, un peu plus de deux ans après avoir dû désabonner l’intégralité de ses membres à la suite de la mise en place des mesures sanitaires pour lutter contre la pandémie de COVID-19.