À quand un jumeau numérique pour Montréal, Québec ou Sherbrooke?
Emmanuel Martinez|Mis à jour le 18 juin 2024«Le Québec a tout ce qu’il faut pour se positionner pour être central dans l’univers du métavers», dit Florian Saugues, directeur de projet chez Numana. (Photo: Numana)
Afin d’aider l’industrie de la réalité étendue à se développer au Québec, un rapport dévoilé par Numana recommande d’accoucher d’un «jumeau numérique» d’une grande ville de la province.
«L’idée est de scanner une ville pour créer une copie conforme en 3D, incluant tout le réseau souterrain avec les fils électriques et les égouts, explique Florian Saugues, directeur de projet chez Numana, en entrevue. Une fois qu’on a ce jumeau numérique avancé, on peut par exemple effectuer des simulations très précises pour des cas de catastrophe dans les exercices de sécurité publique. On peut aussi s’en servir en urbanisme pour des consultations publiques, ainsi que pour créer des jeux vidéo ou une scène de film.»
Devant être financé en grande partie par l’État, ce «bac à sable» numérique serait accessible à tous les acteurs de la chaîne de la réalité étendue («XR» en anglais, qui inclut la réalité virtuelle, augmentée et mixte). Cette initiative permettrait d’inventer et tester des outils et d’inciter la mise en commun de ressources et de projets.
Le document produit par l’OSBL, qui se décrit comme un «macro-catalyseur d’écosystèmes technologiques», préconise ainsi le financement de projets d’expérimentation et de prototypage dans ce jumeau numérique. Numana espère par conséquent favoriser l’émergence d’initiatives structurantes en réunissant plusieurs partenaires.
Ce lieu de rencontre virtuel offrirait l’occasion à des acteurs qui ne sont pas nécessairement dans la réalité étendue de tester certaines applications. Par exemple, des entreprises dans le milieu du tourisme, dans le secteur de la santé, du marketing, pour des formations, en éducation et dans le domaine manufacturier.
«Le Québec a tout ce qu’il faut pour se positionner pour être central dans l’univers du métavers, dit Florian Saugues. Il faut toutefois structurer l’écosystème.»
C’est pour cette raison que le rapport recommande la mise sur pied d’un comité transversal des acteurs XR et de mandater une organisation existante pour fédérer l’écosystème.
En plein essor
Le marché de la réalité étendue devrait atteindre 456,3 milliards de dollars américains (G$US) d’ici à 2030, estimait Research Future l’an dernier. De son côté, la firme Verified Market Research évaluait que le marché mondial du métavers passerait de 30 G$US en 2022 à plus de 800 G$US de dollars en 2030.
En 2023, la réalité virtuelle était le segment le plus dominant, mais les analystes croient que celui de la réalité augmentée connaitra la croissance la plus soutenue.
La réalité étendue était surtout concentrée dans le divertissement en 2023, mais elle progresse rapidement dans les soins de santé, l’aérospatiale et la défense.
Ayant vu le jour grâce à des fonds du ministère de l’Économie et de l’Innovation du Québec, ce document fait valoir que le Québec pourrait tirer parti de son statut bilingue, notamment dans la francophonie, un marché appelé à grossir en raison de la forte natalité en Afrique.
Toutes ces promesses ne pourront cependant pas se réaliser avec les bandes passantes existantes. «Elles ont besoin d’être modernisées, explique Florian Saugues. Un métavers ne peut pas être supporté avec les infrastructures en place.»
C’est pour cette raison que le rapport exhorte à investir dans les réseaux de télécommunications. Il souligne que la connexion moyenne a un débit d’environ 180 Mbit/s au Canada contre 240 Mbit/s aux États-Unis. «Nous sommes donc en arrière pour assurer un développement des technologies qui demandent une large bande passante, comme l’intelligence artificielle et la réalité étendue», peut-on lire.
Avec son expertise dans le jeu vidéo, les effets spéciaux cinématographiques et en IA, le Québec d’excellents atouts pour faire sa place en réalité étendue.
«On a de super belles entreprises au Québec, affirme Florian Saugues. Quand je dis qu’on a tout ce qu’il faut ici, ce ne sont pas des blagues, mais cela prend un meilleur cadre pour consolider notre pôle d’innovation.»