Ça rapporte d’investir dans des organismes communautaires
Emmanuel Martinez|Publié le 24 janvier 2022«Un investissement dans le communautaire, c’est aussi investir dans notre économie et dans d’autres entreprises», souligne Marie-Line Audet, directrice générale de la Table nationale des corporations de développement communautaire. (Photo: courtoisie)
Investir dans les organismes communautaires est bon pour l’économie, selon une étude de la firme AppEco, dévoilée lundi par la Table nationale des corporations de développement communautaire (TNCDC) qui l’a commandée.
D’après cette recherche, 100 millions de dollars ($) investis dans le domaine communautaire génèrent un PIB de 110 millions $, tout en maintenant ou en créant 1900 emplois.
«C’est mieux que la moyenne, car pour l’ensemble de l’économie, 100 millions $ dépensés se traduisent par 94 millions $ en PIB», affirme Pierre Emmanuel Paradis, économiste et président d’AppEco en entrevue avec Les Affaires. Les dépenses dans le communautaire restent davantage au Québec et ont un effet structurant pour l’économie.»
Il ajoute que pour 100 millions $ dépensés dans le secteur social, des retombées de 183,7 millions $ sont engendrées, soit 45,2 millions $ de plus en production auprès des fournisseurs, et 38,5 millions $ en dépenses de consommation par les travailleurs.
Cet effet de levier s’explique par le fait que l’argent destiné au communautaire est surtout versé en salaire, et peu en machines ou équipements provenant de l’étranger. Les fonds octroyés par l’État à ce secteur ont donc tendance à rester dans la province et à être injectés dans d’autres pans de l’économie.
«Investir dans le milieu communautaire, c’est payant non seulement socialement, mais également sur le plan économique pour l’État québécois, a déclaré Marie-Line Audet, directrice générale de la TNCDC. C’est intéressant de savoir qu’on a un impact positif, car on dépense dans nos communautés. Les groupes communautaires ont des politiques d’achat local qui font vivre des fournisseurs de biens et services.»
Accroitre l’aide de l’État
Marie-Line Audet, espère qu’à la lumière de ces données, le gouvernement québécois augmentera le financement des corporations de développement communautaire. Elle fait valoir que cette recherche d’AppEco montre que l’argent versé par l’État aux CDC a chuté de 12 % en dollars réels de 2001 à 2020.
«Le manque d’indicateurs quantitatifs et économiques probants a été un des enjeux soulevés par le gouvernement pour repousser une hausse du financement des CDC, dit-elle. Nous espérons que cette étude, qui confirme tant l’impact économique que le sous-financement des CDC, incitera le gouvernement à débloquer les sommes attendues.»
Les 67 CDC représentant plus de 2500 organismes dans la province sont au bout du rouleau, selon elle. Elles sont plus nombreuses qu’avant et elles livrent davantage de services que par le passé, mais ses moyens ne suivent pas.
«La pandémie a exacerbé certains enjeux comme l’insécurité alimentaire, la santé mentale ou le logement, mentionne-t-elle. Plusieurs gens se ramassent dans le communautaire, ce qui provoque une charge de travail supplémentaire. Mais on n’a pas plus de ressource, donc il y a beaucoup d’épuisement chez nos employés.»
Elle ajoute que les groupes communautaires vivent aussi des problèmes de main-d’œuvre. Les enveloppes budgétaires ne sont pas indexées pour contrer l’inflation ou les hausses des salaires, ce qui rend plus difficile le recrutement, surtout que la rémunération est traditionnellement faible dans ce secteur.
Le réseau des CDC exige donc un financement additionnel de 8,7 millions $ pour 2022-2023.
«Un investissement dans le communautaire, c’est aussi investir dans notre économie et dans d’autres entreprises», souligne Marie-Line Audet.