Le vieillissement de la population, la vigueur du marché de l’emploi et un contexte macroéconomique plus défavorable sont montrés du doigt pour expliquer ce déclin. (Photo: 123RF)
Malgré la croissance de la population canadienne, il y a près de 100 000 entrepreneurs de moins qu’il y a 20 ans au pays, selon une étude de la Banque de développement du Canada (BDC), publiée lundi.
Réalisée en collaboration avec le Centre d’innovation de l’Université de Montréal et Millénium Québecor, cette recherche montre que seulement 1,3 personne sur 1 000 a lancé une entreprise l’an dernier, comparativement à 3 sur 1 000 en 2000. «Cette tendance est préoccupante parce que l’entrepreneuriat est crucial pour l’économie et alimente l’innovation et la croissance économique», a affirmé Pierre Cléroux, vice-président Recherche et économiste en chef à BDC.
Le vieillissement de la population, la vigueur du marché de l’emploi et un contexte macroéconomique plus défavorable sont montrés du doigt pour expliquer ce déclin. Pour ce dernier facteur, «les pénuries de main-d’oeuvre, les perturbations technologiques et la hausse des coûts créent un environnement d’affaires plus complexe où il est plus difficile pour les petites entreprises de faire concurrence aux plus grandes».
Mal outillés
S’appuyant sur trois sondages, ce rapport souligne que l’esprit d’entreprise est bien vivant au Canada, puisque 140 personnes sur 1000 affichaient des intentions entrepreneuriales en 2022. Cependant, il existe un fossé entre les désirs et l’action, car seulement 1,3 de ces 1000 personnes font le saut.
Parmi les entreprises qui voient le jour, le tiers meurent moins de cinq ans après leur naissance. Cette réalité affecte donc la confiance de ceux qui songent à se lancer en affaires. Elle montre aussi que les entrepreneurs sont mal outillés pour cette aventure.
«Les personnes souhaitant devenir propriétaires d’entreprise affichent un manque important de connaissances pratiques pour gérer les activités d’une entreprise», déclare le recteur de l’Université de Montréal Daniel Jutras.
Ce document a identifié quatre groupes de compétences distincts qui sont essentiels pour réussir:
1 – Ténacité et compétences relationnelles
Il s’agit de la résolution de problème, de la résilience et de l’adaptabilité pour organiser l’entreprise, gérer la charge psychologique, développer des relations avec la clientèle et les fournisseuses et fournisseurs, etc.
2 – Compétences en marketing et en finance
Le positionnement et la croissance de la PME reposent ici sur la gestion de la présence en ligne, la mobilisation des capitaux, l’établissement du budget, le développement de produits, etc.
3- Leadership et relations humaines
La gestion du capital humain, le rendement du personnel, ainsi que son perfectionnement sont maximisé par des qualité de leadership, de motivation des autres et de capacité à déléguer des tâches.
4 – Compétences en administration opérationnelle
Les compétences en administration, la gestion de la trésorerie et d’autres savoir-faire juridiques et financiers permettent de maintenir l’efficacité de l’entreprise.
En plus de ces quatre points, il est bon de noter que le rapport souligne que plusieurs propriétaires d’entreprise interrogés «ont exprimé un fort désir d’améliorer leur capacité à gérer le stress et leur charge psychologique».
Parmi toutes les qualités nécessaires, la ténacité est considérée comme la plus vitale.
« Même si les compétences techniques et l’expertise dans le domaine sont sans aucun doute essentielles, des compétences non techniques comme la résilience personnelle et la capacité d’établir des liens significatifs sont encore plus cruciales pour la réussite de l’entreprise, peut-on lire. La ténacité aide l’entrepreneure ou l’entrepreneur à conserver sa concentration, sa motivation et sa détermination face à l’adversité, ce qui lui permet de se remettre des échecs, de s’adapter à des circonstances changeantes et, en fin de compte, de réussir. »
Pour accroitre cette résilience, le rapport conseille de fixer des objectifs clairs et ambitieux, de cultiver une mentalité axée sur le développement, de développer un réseau de soutien, de faire preuve d’introspection, de mettre en pratique des activités de renforcement de la résilience avec de l’exercice physique ou de la méditation, et de célébrer les progrès et les petites victoires.
Vive la formation
Les compétences les plus importantes ne sont pas les mêmes selon le niveau de développement de l’entreprise. Celles en marketing et en finance sont cruciales au cours du stade de démarrage, tandis que celles en administration opérationnelle sont en tête à la sortie du démarrage. Finalement, le leadership et les relations humaines gagnent en importance au fur et à mesure que l’entreprise croît.
Grâce à ces données, les auteurs estiment que le taux de survie des entreprises pourrait être amélioré avec une meilleure formation des entrepreneurs. Cinq piliers sont mentionnés pour l’acquisition des compétences nécessaires afin de prolonger son voyage entrepreneurial :
1 – Encadrement et mentorat;
2 – Réseautage et développement de la communauté;
3 – Formation formelle;
4 – Lectures;
5 – Prendre soin de soi.
Avec une sensibilisation, une préparation et une formation améliorées, le doyen de l’Université de Montréal croit donc qu’il est fort possible de « libérer le potentiel des propriétaires d’entreprise en devenir et favoriser un environnement propice à l’innovation ».