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Contributions au Fonds des services de santé: les PME désavantagées

Emmanuel Martinez|Publié le 09 octobre 2024

Contributions au Fonds des services de santé: les PME désavantagées

«Les règles actuelles désavantagent les petites et moyennes entreprises des secteurs à forte intensité de main-d’oeuvre», affirme la chercheuse de l’IRIS, Anne Plourde. (Photo: courtoisie)

La façon de calculer les contributions des entreprises au Fonds des services de santé (FSS) désavantage les PME par rapport aux grandes entreprises, selon une étude de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS), publiée mercredi.

De 1999 à 2019, l’apport total des petites entreprises a bondi de 19% et celles des moyennes entreprises a grimpé de 26%, tandis que les grandes entreprises ont vu leur quote-part fondre de 23%.

L’étude de l’IRIS ajoute que si on évalue le financement des entreprises au FSS par rapport à leurs profits, la chute est aussi brutale. Ces ponctions représentaient 16% de leur revenu imposable en 1999 contre 8% en 2019. Cependant, la participation des entreprises au FSS se fait en fonction de leur masse salariale et non basée sur leurs profits, et par conséquent de leur capacité à payer.

«Les règles actuelles désavantagent les petites et moyennes entreprises des secteurs à forte intensité de main-d’œuvre qui ont, somme toute, contribué plus au réseau de la santé que les grandes entreprises du secteur financier», explique l’autrice de l’étude, Anne Plourde.

Elle souligne que les profits des grandes entreprises ont quadruplé durant la période 1999-2019, mais que leurs contributions ont baissé de 23%. En effet, les grandes entreprises ont vu leur masse salariale diminuer de 19% entre 1999 et 2019, tandis que leurs revenus imposables ont crû de 104% et leurs bénéfices nets de 307%.

Selon l’IRIS, cette manière de calculer prive l’État de revenus annuels supplémentaires allant de 5,1 milliards de dollars à 10 milliards de dollars.

«Pour récupérer les revenus fiscaux perdus depuis 1999, il faudrait moderniser les règles fiscales entourant les cotisations des entreprises au FSS de manière à faire contribuer davantage celles qui engrangent le plus de bénéfices», croit Anne Plourde.

Financiarisation de l’économie

L’IRIS explique cette baisse relative des contributions des entreprises au FSS par la financiarisation de l’économie.

Elle souligne que le taux de cotisation est demeuré le même depuis 1999 à 4,26% de la masse salariale des entreprises, sauf pour des PME des secteurs primaire et manufacturier ayant une masse salariale inférieure à 7,2 millions de dollars qui ont eu droit à une réduction de ce taux en 2015.

Toutefois, cette diminution de taux pour ces PME bien spécifiques n’est pas en mesure d’expliquer la baisse totale en pourcentage des contributions des entreprises, selon l’IRIS. L’étude montre du doigt la place de plus en plus prépondérante qu’occupent les entreprises du secteur des finances, des assurances et des services immobiliers dans l’économie québécoise.

Ces dernières empochaient 26% des revenus imposables et 24% des bénéfices nets totaux produits au Québec en 1999. Cependant, ces proportions ont bondi respectivement à 34% et 45% en 2019. Toutefois, leurs cotisations au FSS représentaient seulement 11% du total de la participation des entreprises québécoises en 2019.

«L’économie a beaucoup changé dans les dernières années. Il est temps que le Québec se dote d’une fiscalité qui soit adaptée à ces transformations afin de remédier au mal-financement des services publics», estime Anne Plourde.

Selon elle, ces évolutions économiques ont privé le système de santé d’un apport crucial de la part des entreprises. Il y a une vingtaine d’années, le FSS couvrait le quart des dépenses du ministère de la Santé et des Services sociaux, tandis que ce n’est plus que 14% aujourd’hui. Il faut toutefois noter que le financement de ce ministère a historiquement pris de plus en plus de place dans le budget de l’État en raison du vieillissement de la population et du coût des soins.