«Le Québec part avec une longueur d'avance grâce au français et l'absence de passé colonial.»
Au moment où Québec souhaite diversifier ses marchés d’exportation, une étude de l’Institut du Québec (IdQ) suggère de regarder du côté de l’Afrique francophone, où la langue de Molière constitue un atout pour les entreprises d’ici.
Il y a toutefois beaucoup de travail à faire, souligne le document publié jeudi, étant donné que les 17 pays de cette région n’ont représenté que 287 millions $, ou 0,34 pour cent des exportations québécoises en 2017, qui ont totalisé 85 milliards $.
Mais puisque les Nations unies estiment que 950 millions d’Africains seront francophones en 2060, ce qui constitue une hausse de 258 pour cent par rapport à 2015, mieux vaut commencer à se préparer, suggère l’IdQ.
«En plus de la croissance démographique, le Québec part avec une longueur d’avance grâce à sa connaissance du français et l’absence de passé colonial, contrairement à la France et à la Belgique», a expliqué Jean-Guy Côté, coauteur de l’étude et directeur associé du groupe de réflexion.
Selon lui, la dernière année, marquée par la modernisation de l’Accord de libre-échange nord-américain, a démontré que les États-Unis ne sont pas toujours des partenaires commerciaux privilégiés.
Ainsi, après la conclusion du Partenariat transpacifique global et progressiste et de l’Accord économique et commercial global, il est temps de faire du démarchage en Afrique francophone, croit M. Côté.
Selon l’IdQ, l’accord de libre-échange avec l’Union européenne devrait se traduire par une hausse des retombées de 324 millions $ pour le Québec d’ici 2022. L’institut ne s’est toutefois pas prêté au jeu des prédictions pour l’Afrique francophone, étant donné qu’il s’agit d’un travail de plus longue haleine.
Selon le classement général de l’IdQ, le Maroc, l’Algérie et la Tunisie occupent le haut du classement, alors qu’à l’inverse, le Burundi, le Tchad ainsi que la Guinée se retrouvent plutôt en queue de peloton. Dans tous les cas, trois indicateurs — l’économie, les institutions ainsi que la connectivité — ont été évalués.
Le document évoque par exemple les industries de l’aérospatiale et du transport au Maroc, où Bombardier est présente, les infrastructures, les transports ainsi que les télécommunications en Côte d’Ivoire et l’énergie au Sénégal.
Des limites
S’il est possible de réaliser des gains au chapitre de l’exportation des biens, c’est néanmoins le secteur des services qui offre des perspectives plus alléchantes, croit M. Côté.
«On peut penser au service-conseil, à l’ingénierie et la formation, a-t-il dit. Par exemple, dans certains pays, des grandes mines voient le jour. Ici, nous avons une spécialité dans des cégeps entourant la formation minière. Ce sont des connaissances qui s’exportent facilement.»
Les progrès risquent également d’être inégaux puisque les défis varient d’un pays à l’autre, a rappelé le coauteur de l’étude.
Au Maroc, entre autres, il n’y a pas d’accord de promotion et de protection des investissements avec le Canada, alors que d’autres pays, comme le Burkina Faso, ont certains défis en ce qui a trait à leur situation géopolitique.
Ainsi, l’IdQ suggère notamment de «compléter et renforcer» les ententes commerciales et les accords visant à protéger les investissements privés avec l’ensemble de l’Afrique francophone.
L’étude souhaite également l’intégration de l’Afrique comme lieu géographique à développer au sein de la stratégie québécoise des exportations, qui vient à échéance en 2020 — et dans laquelle le mot «Afrique» n’est mentionné qu’à huit reprises.
«Il y a une réflexion qui devra s’amorcer, a dit M. Côté. Puisque le gouvernement devra bientôt arriver avec une nouvelle stratégie, j’imagine que le début de cette réflexion se fait actuellement.»
Le gouvernement québécois devrait également cibler des entreprises locales ayant un «fort potentiel de développement» sur le continent africain ainsi que celles ayant une plus grande expertise technique, étant donné que cela répond davantage aux besoins de l’Afrique francophone.