Sylvain De Champlain, président-fondateur de De Champlain Groupe Financier, à Montréal (Photo: courtoisie)
Le 31 décembre approche à grands pas et c’est le moment pour les PME et les entrepreneurs de faire un ménage fiscal avant de commencer 2024.
« Après 10 mois, c’est toujours un bon moment de réviser ses états financiers, explique Sylvain De Champlain, président-fondateur de De Champlain Groupe Financier, à Montréal. S’il y a des immobilisations à faire, un investissement dans des biens ou dans de l’informatique, il vaut mieux les réaliser avant la fin de l’année, car on peut utiliser la déduction fiscale pour 2023 au lieu d’attendre un an. »
De manière générale, les spécialistes fiscaux recommandent d’agir pour jouir d’une déduction le plus rapidement possible et de reporter un gain qui entraînera un surplus d’impôt à débourser.
Profitez du C3i
Le crédit d’impôt pour investissement et innovation (C3i) est offert au Québec à toutes les entreprises concernant l’acquisition de biens, que ce soit du matériel de fabrication ou informatique, ainsi que certains logiciels. Même s’il sera toujours là l’an prochain, les exemptions sont plus avantageuses cette année.
« C’est beaucoup plus intéressant d’engager la dépense en 2023 qu’en 2024, car les taux du crédit sont deux fois plus élevés », explique Sylvain Gilbert, fiscaliste chez Raymond Chabot Grant Thornton (RCGT).
Il note que les biens amortissables acquis et mis en service en 2023 sont non seulement entièrement déductibles cette année, jusqu’à concurrence d’un plafond annuel de 1,5 million de dollars, mais qu’il existe aussi une bonification supplémentaire au Québec pour l’année suivante.
Pour les biens neufs admissibles, l’entreprise a droit à une déduction d’amortissement additionnelle de 30 % pour 2024, un atout qui disparaîtra l’an prochain.
« Pour un bien de 10 000 $, j’ai un plein amortissement de 10 000 $ en 2023 et un autre de 3000 $ en 2024, mentionne Sylvain Gilbert. C’est majeur. Donc, en raison du C3i plus avantageux en 2023 et de la déduction d’amortissement additionnelle de 30 %, vaut mieux acheter en 2023. »
Remboursement du CUEC
L’échéance pour rembourser le Compte d’urgence pour les entreprises canadiennes (CUEC) approche à grands pas. Les PME ont jusqu’au 18 janvier pour payer le gouvernement fédéral afin d’avoir droit à une exonération de 20 000 $ pour un prêt de 60 000 $. « Si on n’a pas les liquidités pour rembourser, il faut négocier un prêt ou une marge de crédit additionnelle, mais on doit s’y prendre rapidement, car l’analyse par l’institution financière peut être longue, surtout avec les congés des fêtes », fait remarquer Sylvain Gilbert.
Il souligne également que de jeter un coup d’œil à ses stocks constitue un bon réflexe. Leur valeur marchande peut avoir diminué, ce qui donne droit à une provision pour désuétude.
Même chose en examinant les comptes clients. Si la PME croit qu’elle ne reverra jamais la couleur des sommes dues, elle peut en déduire une certaine partie pour mauvaise créance.
Salaire ou dividende ?
Réviser la rémunération des dirigeants de PME est aussi un geste qui peut se révéler avantageux fiscalement.
« C’est une légende urbaine que de penser que se verser tout en dividende plutôt qu’en salaire est mieux pour un entrepreneur, dit Sylvain De Champlain. C’était le cas dans le passé, mais plus maintenant. C’est important d’évaluer l’équilibre maximal entre le salaire et le dividende. Chaque situation, toutefois, est différente. »
Dans cette analyse, il faut non seulement tenir compte du taux d’imposition de la PME, mais aussi de l’entrepreneur. Verser un boni constitue souvent une bonne idée, car, comme le salaire, il peut être déduit des revenus de la PME. De plus, il est possible de reporter l’encaissement du boni à l’exercice suivant. Pour l’entrepreneur, le boni permet également de contribuer davantage à son REER.
Pour les entrepreneurs à revenu élevé, les règles concernant le calcul de l’impôt minimum de remplacement seront moins avantageuses en 2024. Ceux qui réalisent des gains en capital importants, notamment lors de la vente d’action d’une société privée, auraient intérêt à le faire cette année.
En outre, un dirigeant qui a reçu une avance ou un prêt de son entreprise devrait s’assurer de le rembourser dans les délais prescrits pour éviter que cela ne soit considéré comme un revenu imposable.
Des cadeaux
Avec l’approche des fêtes, certains patrons auront peut-être un élan de générosité envers leurs employés afin de reconnaître des accomplissements. Des cadeaux et des récompenses peuvent être versés sans incidence fiscale pour les employés jusqu’à concurrence de 500 $ au fédéral et 1000 $ au provincial, selon RCGT. Évidemment, ces sommes peuvent être déduites par la PME de ses revenus.
Faire ses devoirs de fin d’année signifie également réfléchir à la prochaine année.
« La planification est trop souvent négligée, déplore Sylvain De Champlain. Les entrepreneurs travaillent 60 h par semaine et quand ils arrivent chez eux le soir, ils ne s’occupent pas de leurs affaires. Ils ne doivent pas seulement travailler dans l’entreprise, mais aussi sur l’entreprise. »