La dévitalisation du centre-ville de Rimouski
Initiative de journalisme local|Publié le 17 octobre 2024En 2023, la Ville de Rimouski a mis en place un plan d'action pour revitaliser son centre-ville, mais les résultats peinent à se faire sentir. (Photo: Mathieu Perchat, Initiative de journalisme local)
Le centre-ville de Rimouski fait face à une dévitalisation alarmante, marquée par un taux d’inoccupation de 13,1% sur la rue Saint-Germain, selon une étude récente menée par la firme spécialisée en recherche immobilière, Côté Mercier. Ce taux, le plus élevé parmi 63 artères commerciales du Québec, illustre un phénomène préoccupant pour la vitalité économique et sociale du centre-ville.
Les causes de la dévitalisation
L’étude attribue principalement cette situation à la concurrence des zones commerciales périphériques, comme l’avenue Léonidas et la montée Industrielle-et-Commerciale. Ces secteurs affichent un taux d’inoccupation plus proche de la moyenne provinciale, attirant de fait une partie des activités économiques, au détriment du centre historique.
En 2023, la Ville de Rimouski a mis en place un plan d’action pour revitaliser son centre-ville, mais les résultats peinent à se faire sentir. Parmi les mesures mises en place, une taxe pour les locaux inoccupés instaurée en septembre 2023 n’a pas réussi à inverser la tendance. Des voix, comme celle de Jean-Nicolas Marchand, expriment même des craintes quant à l’impact que l’ouverture d’un Costco pourrait avoir sur les efforts de revitalisation de la rue Saint-Germain.
Un modèle de réussite à l’étranger : le cas de Pontevedra
L’étude soulève également un débat sur l’accessibilité en voiture dans les centres-villes. Alors que certains prônent l’idée de maintenir une certaine accessibilité automobile pour relancer la fréquentation, d’autres, notamment dans le domaine de l’urbanisme, défendent une approche plus radicale : la piétonnisation.
L’exemple de Pontevedra, en Espagne, offre une solution inspirante. Cette ville, confrontée à des problématiques similaires de dévitalisation, a pris la décision audacieuse de bannir les voitures de son centre-ville. Le résultat a été immédiat : une fréquentation accrue, un allongement du temps passé par les piétons, et une augmentation des revenus pour les commerces locaux. La piétonnisation a permis de recentrer les activités humaines et sociales dans le cœur de la ville, en éloignant les consommateurs des grands centres commerciaux périphériques.
Adapter le modèle à Rimouski : Le défi climatique
Bien que le climat de Rimouski puisse sembler un frein à la création d’un centre-ville piéton, il est essentiel de ne pas sous-estimer l’attrait des espaces extérieurs pour la population locale. L’engouement des Rimouskois pour les activités en plein air, qu’il s’agisse de promenades au bord du fleuve ou de sports d’hiver, démontre que le froid n’est pas un obstacle insurmontable.
L’aménagement d’infrastructures adaptées, favorisant la flânerie et le repos, pourrait transformer le centre-ville en un lieu de rencontre et de vie, et non plus seulement en un lieu de passage. En ce sens, l’idée de libérer le centre-ville de la voiture pourrait offrir une nouvelle dynamique sociale et économique.
Le choix politique : repenser l’accessibilité
Le modèle de Pontevedra illustre que la piétonnisation n’est pas seulement une question d’urbanisme, mais également une décision politique. Privilégier la voiture dans un centre-ville en crise signifie continuer à rendre cet espace inhospitalier pour les piétons. Les voitures encombrent l’espace, diminuent le confort et l’attractivité, et renforcent l’idée que le centre est un lieu de transit, et non un espace à habiter.
D’autant plus que Rimouski possède déjà une double voie parallèle qui longe le fleuve, mais qui, paradoxalement, n’est pas des plus agréables pour les promenades à pied. Il serait alors logique d’au moins libérer la rue Saint-Germain de la circulation automobile, permettant ainsi une première étape vers une revitalisation durable et cohérente.
La revitalisation du centre-ville de Rimouski passe par une réflexion approfondie sur l’utilisation de l’espace urbain. Plutôt que de chercher à attirer davantage de voitures, il semble plus pertinent de créer un environnement propice aux piétons et aux rencontres, comme l’a montré l’exemple de Pontevedra. Le défi climatique, loin d’être un obstacle, pourrait être surmonté par une conception intelligente des infrastructures. Il est temps que le centre-ville devienne un véritable lieu de vie, adapté aux réalités d’aujourd’hui, pour que Rimouski retrouve son dynamisme.
Par Mathieu Perchat, Initiative de journalisme local, Le Mouton Noir