Logo - Les Affaires
Logo - Les Affaires

Le secteur des services personnels peine à recruter

Catherine Charron|Publié le 22 novembre 2019

«Le défi est très grand, particulièrement au Québec, mais aussi dans le reste du pays», constate Simon Gaudreault.

Pendant près de six mois, la propriétaire du salon Pure Glam Coiffure, Annie Dubé-Audet, a tenté de dénicher une paire de mains supplémentaires pour répondre à la demande croissante de sa clientèle dans Hochelaga-Maisonneuve.

La coiffeuse qui est dans les affaires depuis 7 ans n’est pas la seule à éprouver des difficultés à trouver des employés; l’industrie des services personnels est celui où les sociétés peinent le plus à embaucher depuis la fin de 2016 selon le rapport Les postes vacants dans le secteur privé au T3 2019 de la Fédération canadienne des entreprises indépendants (FCEI).

Dans ce document, on apprend notamment que pour un huitième trimestre consécutif, la province de Québec se hisse au sommet du palmarès des taux de postes vacants au Canada. C’est 4,9% de ceux-ci qui se trouvent dans le secteur des services personnels.

«Le défi est très grand, particulièrement au Québec, mais aussi dans le reste du pays», constate Simon Gaudreault, le directeur principal de la recherche nationale de la FCEI.

Citant les observations de son collègue Ted Mallet, vice-président et économiste en chef, parus dans son papier du 21 novembre 2019, il explique que ce problème est plus commun dans les secteurs comme celui des services personnels, qui sont essentiellement composés de micros et de petites entreprises.

Et contrairement à d’autres, comme le manufacturier et le transport où la robotisation peut parvenir à masquer les effets du manque de main-d’œuvre, celui des services personnels peut difficilement se passer du contact humain. «Peut-être que le nettoyeur de vêtement peut automatiser certaines choses […], mais les gens vont vouloir continuer d’interagir avec des êtres humains».

Étant donné que la paie de ces salariés se reflète directement dans le prix des services offerts, les employeurs ne peuvent augmenter drastiquement les salaires puisque leur modèle d’affaires «ne fonctionnerait tout simplement pas», constate Simon Gaudreault de la FCEI. «C’est un secteur très compétitif […] Les gens ne voudront pas dépenses des sommes onéreuses pour nettoyer leurs vêtements».

Annie Dubé-Audet rappelle que dans sa profession, c’est la taille de la clientèle qui importe principalement lorsqu’il est question de revenu. L’intérêt des clients est tel que pour attirer un travailleur qualifié, elle a préféré user de patience plutôt que de bonifier le salaire.

Comme pour la majorité des secteurs, l’économie qui se porte bien et le vieillissement de la population pèsent sur ces entreprises pour qui la demande est croissante, mais dont les ressources sont limitées.

«Les gouvernements doivent trouver une multitude de solutions pour [les] aider», croit Simon Gaudreault, qui sent une volonté de leur part à collaborer.

Ce n’est pas que par l’immigration que le , bien qu’il faille l’encourager chez les entreprises des services personnels, n.

Sans avoir de données précises pour le secteur des services personnels, la FCEI a pu constater, après avoir sondé ses membres, que pour y parvenir, les entreprises tentent d’améliorer leurs conditions de travail.

En effet, les employeurs prévoyaient hausser leurs salaires en moyenne de 2,3%, alors que ceux qui n’ont pas de difficulté à embaucher les augmenteraient de 1,4%.

La flexibilité des horaires de travail est aussi dans leur mire.

Sylvain Camirand, directeur général du Comité sectoriel de la main-d’œuvre des services de soins personnels, qui soutient les artisans de la coiffure, de l’esthétique et de la massothérapie, observe un autre phénomène. Au Québec, les travailleurs salariés que son association épaule migrent vers l’autonomie.

«À mon avis, il ne manque pas de coiffeurs au Québec. Ce sont les salons de coiffure qui cherchent des salariés qui ont des problèmes. En massothérapie, ce sont les spas, comme les spas nordiques, qui ont des difficultés à recruter».

C’est ce qu’a vécu Annie Dubé-Audet, qui accueille chez Pure Glam Coiffure un travailleur autonome depuis peu.

Valoriser ces métiers

Il estime aussi que ça passe par la valorisation des différentes professions de ce secteur, qui englobe les cordonniers comme les services funéraires, pour augmenter le nombre d’étudiants sur les bancs d’école. Des propos qui font échos à ceux de Sylvain Camirand.

«On note qu’il y a moins d’inscriptions, mais il y a surtout moins de diplômes à la fin. C’est vrai pour la coiffure et l’esthétique, mais ce l’est aussi pour plusieurs autres programmes professionnels».

«Il y a des raisons pour lesquels ces métiers ont perduré dans le temps, c’est de toute évidence parce qu’il y a un très grand besoin, et ça rend service aux gens», affirme le directeur de la recherche national de la FCEI.