Le PDG d’Akonovia, Philippe Hudon, verse 1 % de son chiffre d’affaires à des causes environnementales. (Photo: Martin Flamand)
PDG DE L’ANNÉE 2024. Le terme «1 %» a surtout une connotation négative en raison des inégalités auxquelles il réfère, mais le fondateur d’Akonovia, Philippe Hudon, lui redonne un tout autre sens.
En effet, le patron de cette PME de conseils stratégiques et techniques en décarbonation verse 1 % de son chiffre d’affaires à des causes environnementales.
Celui qui a créé son entreprise il y a dix ans a également lancé un organisme sans but lucratif appelé Décarbone+, qui vise à sensibiliser les organisations publiques et privées à la réduction de leurs émissions de carbone. Cet OSBL a notamment pour objectif de diffuser les bonnes pratiques afin d’atteindre la neutralité carbone. « Puisque je voyage beaucoup en Europe, je voyais un décalage entre les entreprises d’ici et de là-bas et je percevais un risque pour le système économique québécois, explique le lauréat du prix PDG de l’année 2024 — Petite entreprise, en entrevue. L’idée est que les entreprises doivent s’adapter et investir pour réduire leur bilan de carbone, mais par où commencer, comment le faire, comment se doter d’outils ? Il y avait un besoin de coaching. »
Akonovia accompagne justement les entreprises qui souhaitent se décarboner. En plus d’être bonne pour la planète, cette démarche est essentielle pour rester concurrentielle, selon Philippe Hudon.
« On sait que de plus en plus d’entreprises cotées en Bourse et même les règles financières vont changer dans les prochaines années, souligne-t-il. Il va y avoir une pression accrue à ce niveau-là et une transition vers une sobriété carbone ne se fait pas en deux ou quatre ans, ça s’inscrit dans une vision à long terme. Donc, si les entreprises ne démarrent pas aujourd’hui, elles risquent de perdre des clients à l’international juste à cause de ça. »
Parler le bon langage
Philippe Hudon confie qu’il a commencé à rêver d’efficacité énergétique lorsqu’il fréquentait le cégep. Après des études à l’ETS, il a travaillé comme ingénieur spécialiste en simulation énergétique et en géothermie. « Je sentais que les clients avaient besoin d’un meilleur accompagnement pour les aider à passer à l’action, dit-il pour expliquer la création de son entreprise en 2014. Cela consiste à comprendre la réalité financière et technique du client, de saisir les non-dits et de voir comment on peut lui apporter de la valeur. »
Une des clés de son succès, c’est de parler le langage des chiffres. Ses études énergétiques vont bien sûr permettre d’évaluer le rendement de l’investissement, mais aussi d’examiner d’autres paramètres financiers, de produire des analyses de risque tout en faisant des liens avec les différentes parties prenantes pour réaliser les projets.
Une seconde force qu’il souligne est de se spécialiser en efficacité énergétique et de ne pas s’éparpiller dans d’autres domaines, puisque environ 85 % de son chiffre d’affaires provient de services techniques.
Cette expertise se reflète dans la qualité de son équipe, dont il vante l’excellence. Dans un marché où la pénurie de main-d’œuvre est bien réelle, le patron est fier que sa philosophie basée sur la bienveillance et la collaboration porte ses fruits.
« La somme de plein de petits gestes a permis de réduire notre taux de roulement, soutient-il. Si les gens quittent l’entreprise, c’est généralement pour changer de domaine. »
Implantée l’an dernier, la semaine de quatre jours fait partie des mesures pour offrir de la flexibilité à ses employés. « Il n’y a aucun livrable le vendredi, affirme-t-il. Les employés peuvent également refuser des rencontres. Cela enlève une certaine pression. On peut se concentrer sur nos dossiers et partir la tête libre pour le week-end. »
En outre, il s’assure que les employés reçoivent des formations et peuvent progresser au sein de l’organisation. Des réunions sans ordre du jour pour simplement savoir si les employés vont bien sont aussi organisées.
« On investit beaucoup dans notre marque employeur, mentionne-t-il. Notre culture interne est forte. J’essaie toujours d’amener le niveau décisionnel le plus bas possible dans l’organigramme. Notre équipe de direction est en croissance, les zones des divergences sont faibles et on n’est pas dans une culture de microgestion. »
Croissance solide
Bien que le ralentissement économique et une certaine remise en cause aux États-Unis de mesures pour lutter contre le réchauffement climatique constituent des vents contraires, Akonovia poursuit néanmoins sur sa lancée.
« Les entreprises n’ont pas abandonné leurs projets, mais elles ont mis un peu sur pause plusieurs investissements en attendant de voir où cela va se placer au point de vue politique, croit-il. Le marché change, mais pas notre volume d’affaires. »
Il affirme que la croissance de sa PME est d’environ 30 % cette année, contrairement à une expansion de 60 % en 2023. Puisqu’elle travaille avec des industries aussi variées que les alumineries, le pharmaceutique ou l’immobilier, Akonovia n’est pas à la merci des caprices d’un secteur en particulier.
Selon lui, les entreprises se concentrent davantage, pour le moment, sur des investissements dans lesquels il y a une rentabilité à court terme. « On aide un peu tout l’écosystème à essayer de capter la valeur de la décarbonation à l’aide d’analyses financières et des risques plus poussées », explique-t-il.
Après avoir conquis le Québec, la PME s’est implantée en France et en Ontario il y a un an. Elle fait ainsi rayonner son expertise pour le plus grand bien de la planète.