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Les prix des conteneurs ont triplé depuis mars

Emmanuel Martinez|Publié il y a 11 minutes

Les prix des conteneurs ont triplé depuis mars

Photo: Frank McKenna pour Unsplash.com

Les importateurs s’arrachent les cheveux ces temps-ci, car le prix du transport maritime par conteneurs a bondi récemment.

Les tarifs ont triplé depuis mars et ils sont 286% plus élevés qu’en juillet de l’an dernier, selon le Drewry Container Index qui recense les moyennes des prix pour les conteneurs de 40 pieds entre Shanghai et New York, Los Angeles, Gênes et Rotterdam, ainsi qu’entre New York et Rotterdam aux Pays-Bas.

Le coût du conteneur s’élevait à 1790 dollars américains ($US) en moyenne pour l’ensemble de ces destinations à la mi-mars alors qu’il est présentement à 5937$US. Même s’il est élevé, ce tarif est loin du pic de 10 377$US atteint en septembre 2021 durant la pandémie.

Cette hausse s’explique par la guerre menée par Israël à Gaza, selon Sébastien Suicco, vice-président de Synergie Canada, une entreprise québécoise spécialisée en logistique de transport de marchandises et en expédition de fret.

Par solidarité avec les Palestiniens, les attaques des Houthis contre des navires associés à l’État hébreu près du canal de Suez ont eu pour effet de détourner une bonne partie du commerce maritime.

«Les bateaux évitent cette voie et passent plutôt par le cap de Bonne-Espérance en Afrique du Sud pour relier l’Asie à l’Europe, dit-il en entrevue. Ce trajet augmente drastiquement le temps de transit: au lieu de 35 jours, cela prend 60 jours.»

Ces délais créent des déséquilibres dans le roulement des navires et des conteneurs pour transporter les marchandises partout dans le monde, estime cet expert. Un grand nombre de conteneurs maritimes reviennent vides vers l’Asie, où ils sont rechargés pour un autre voyage. Les retards ont par conséquent un effet sur les capacités de transport.

Il mentionne qu’une plus forte demande a aussi mis de la pression sur les transporteurs maritimes et a donc contribué à la hausse des prix. Selon les chiffres de Xeneta qu’il a consulté, la demande était de 9,2% plus élevée au premier trimestre de 2024  par rapport à celui de 2023.

«Après les problèmes d’approvisionnement engendrés par la COVID-19, la poussière était retombée, explique-t-il. Les importateurs avaient des inventaires élevés. En 2023, les volumes étaient donc faibles pour les importations. Toutefois, vers la fin de l’an dernier, les inventaires sont redevenus bas, ce qui a relancé les importations en grande quantité.»

Il ajoute que les débrayages ou menaces de grève aux ports de Montréal et Vancouver, ainsi que par les cheminots du CN et du CP ont eu pour effet de fragiliser l’industrie du transport.

«C’est la tempête parfaite, estime Sébastien Suicco. Les gens qui sont au courant de la situation économique en Amérique du Nord et des possibles conflits de travail ont commandé plus tôt que tard en cas de grève. Tout le monde a donc commandé plus tôt. »

Une autre augmentation cet automne?

Face à une hausse de la demande et à des délais de livraison accrus, les compagnies maritimes se sont ajustées en louant davantage de conteneurs et affrétant plus de navires, selon le dirigeant de Synergie Canada. Toutefois, ces décisions prennent des semaines avant de se matérialiser en mer.

Il note qu’un plafond semble avoir été atteint.

«Dans la dernière semaine, on a vu une accalmie, mentionne-t-il. Il y a même une légère diminution présentement de quelques centaines de dollars.»

«Par contre, on n’est pas en automne où la demande s’accroit en raison du temps des fêtes, poursuit-il. Est-ce que les entreprises ont importé assez pour Noël ou est-ce qu’elles vont recommencer à commander, ce qui va faire encore monter les taux dans les prochains mois?»

À moins de pouvoir attendre six à huit mois, il soutient que ce n’est pas une bonne idée pour une entreprise de ralentir ses expéditions en raison de la récente hausse des tarifs. «Souvent plus tu attends, plus cela monte et tu vas payer cher, croit-il. C’est mieux de vendre ton stock plus cher et faire des revenus que de ne rien avoir à vendre.»

Un apaisement au Proche-Orient et un retour à la normale pour la navigation dans la région du canal de Suez seraient évidemment accueillis avec soulagement par les importateurs.

Ce qui est certain, c’est que l’augmentation des prix de transport maritime sera refilé au consommateur, ce qui ultimement nuit à la lutte contre l’inflation.