Louis Légaré-Lapointe, président de Can-Explore (Photo: courtoisie)
Un texte de Louis Légaré-Lapointe, président de Can-Explore
COURRIER DES LECTEURS. Je me suis senti comme un père de famille qui voit son enfant quitter la maison! En juin dernier, j’ai conclu avec mes partenaires la vente de Tensio à Groupe Canam, un fleuron québécois. Spécialisée dans la surveillance autonome des toitures de bâtiments, Tensio était une division de Can-Explore. La décision de vendre n’a pas été prise à la légère et j’étais personnellement très attaché à cette division de notre entreprise. Nous avons capitalisé sur une opportunité inattendue, ce qui nous a ensuite permis d’augmenter nos efforts de commercialisation pour notre solution d’inspection d’égout, la ZIPCAM 360, aux États-Unis.
La période de transition qui a précédé la vente m’a fait réfléchir sur un défi crucial qui touche un grand nombre d’entrepreneurs : la validation de marché pour une technologie qui change les façons de faire. Aujourd’hui, la majorité des subventions disponibles sont allouées à la recherche et au développement technologique, laissant souvent de côté la validation précoce du marché. Pourtant, cette étape est cruciale et indispensable pour toute PME.
Est-ce que le produit, notre innovation, que nous nous apprêtons à commercialiser répond à un besoin? Connaissons-nous bien les attentes de notre marché? La taille de ce même marché ? Une validation de marché, menée en parallèle et dès les premières phases de développement, permettrait de s’assurer que les projets sont alignés avec les besoins réels des clients et les attentes du marché. En conséquence, les entreprises pourraient rapidement identifier les projets qui ne satisfont pas ces attentes et soit les adapter, soit les abandonner, économisant ainsi du temps, de l’argent et des ressources précieuses.
Et nos décideurs ont leur responsabilité et un rôle crucial à jouer. Je crois fermement que la répartition des subventions devrait mieux refléter cette réalité. En encourageant une validation de marché précoce, nous pourrions orienter les fonds publics vers les projets ayant un réel potentiel commercial. Ce faisant, nous pourrions accélérer le développement des innovations prometteuses tout en limitant les ressources gaspillées sur des technologies sans avenir commercial.
De plus, nous sommes confrontés aux programmes actuels pour le financement de la commercialisation qui sont non seulement limités, mais également très complexes à obtenir. Les démarches administratives et les critères d’éligibilité découragent souvent les entreprises, particulièrement les plus petites et les start-ups, qui souhaitent tester rapidement leurs innovations sur le marché.
Il faut simplifier l’accès aux mesures incitatives pour permettre aux entrepreneurs de valider plus rapidement leurs produits et d’adapter leurs stratégies en fonction des retours du marché. Nos innovateurs doivent innover et non pas perdre leur temps à remplir des papiers! Plus de rapidité et moins de formalités dans l’aide gouvernementale seraient nécessaires.
Nous l’avons vécu avec la commercialisation de Tensio, la route peut être périlleuse. Les défis spécifiques liés à la mise sur le marché de nouvelles technologies sont nombreux et requièrent des investissements majeurs. Ce sont plusieurs ressources chez Can-Explore qui ont dû être mobilisées pour en faire un succès. Et ce ne sont pas tous les projets qui ont la chance d’être supportés de cette façon. En tant qu’entrepreneurs, on est amenés à faire des choix difficiles.
Aux entrepreneurs, je dis : persévérez. Les obstacles sont nombreux, mais avec une vision claire, de la détermination et des partenaires stratégiques, il est possible de surmonter ces défis et de réussir.
Mon message aux décideurs publics et aux organismes de soutien à l’innovation : dans le contexte économique actuel, bien que vous êtes déjà présents, il est indispensable de réévaluer l’approche de financement. Les entrepreneurs doivent être mieux soutenus dans la validation de leurs idées et la commercialisation de leurs produits. C’est ce qui fera la différence pour créer un Québec plus innovant, plus dynamique et plus prospère.
