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Tout part de la planche à dessin pour réduire l’emballage

Emmanuel Martinez|Publié le 20 octobre 2022

Tout part de la planche à dessin pour réduire l’emballage

«Les problématiques environnementales sont plus complexes qu’on pense», affirme Geneviève Dionne, directrice, écoconception et économie circulaire, chez Éco Entreprises Québec. (Photo: Courtoisie)

À première vue, éliminer ou réduire les emballages ne serait qu’une question de volonté et de coûts pour les entreprises.

Mais cet objectif visant à protéger l’environnement et éviter le gaspillage de ressource est souvent beaucoup plus difficile à atteindre que prévu et il faut donc que les entreprises d’un même secteur travaillent ensemble pour trouver des solutions communes.

«Les problématiques environnementales sont plus complexes qu’on pense, affirme Geneviève Dionne, directrice, écoconception et économie circulaire, chez Éco Entreprises Québec. Si on prend par exemple les céréales, on ne doit pas seulement regarder la boite dans laquelle elles sont vendues. Il faut examiner les composantes de l’emballage, d’où viennent les matériaux, la conception, le transport, la mise en marché…»

Afin de démystifier toutes ces facettes, elle a créé un documentaire en compagnie de Sylvain Allard, professeur à l’École de design de l’UQAM, qui s’intitule «Tout déballer». Il sera possible de le visionner gratuitement sur le web le 21 octobre à www.toutdeballer.uqam.ca.

Miser sur la planche à dessin

Un des points sur lesquels Geneviève Dionne insiste est d’oeuvrer en amont.

«Environ  80 % des coûts sont déterminés à la table de conception. Donc mieux vaut prévenir que guérir. L’emballage devrait être façonné dans le cadre d’une réflexion environnementale», dit celle qui travaille pour l’organisme qui représente des compagnies qui doivent payer pour mettre en marché des contenants, des emballages et des imprimés.

«Dès les bancs d’université, il faut se poser des questions sur le design du produit, sur les enjeux d’analyse de cycles de vie pour voir l’impact sur l’empreinte environnementale, ajoute-t-elle. C’est pour cela qu’on est content d’avoir travaillé avec l’UQAM.»

Une entreprise doit examiner d’une manière globale sous quel format son produit est vendu ainsi que les matériaux servant d’emballage.

«Tout part de la planche à dessin où les erreurs peuvent évitées, précise-t-elle. Il n’y a pas que la conception sur laquelle il faut réfléchir, mais aussi la distribution, la mise en marché, le système de collecte sélective et le comportement du citoyen. C’est une approche globale.»

Elle met en garde contre les « fausses bonnes idées ». Par exemple, dans l’industrie agroalimentaire, certains emballages permettent d’allonger la durée de vie des aliments. En les supprimant, il y pourrait y avoir davantage de perte. D’autres solutions ne font que déplacer le problème. Par exemple, renforcer des boites dans lesquelles sont placés des contenants qui sont devenus plus fragiles, car leur paroi a été réduite.

Par contre, elle reconnait qu’il existe parfois des idées simples comme celle prônée par la Société des alcools du Québec dont de nombreuses bouteilles vendues sont un tiers plus mince qu’auparavant.

«Elles offrent la même protection du vin et sont aussi solides pour les consommateurs, note-t-elle. Le verre constitue un emballage énergivore qui très pesant, donc cet amincissement permet de réduire les coûts de production, de transports et de manipulation.»

Collaboration entre entreprises

À l’emploi d’Éco Entreprises Québec depuis 12 ans, Geneviève Dionne estime qu’une meilleure collaboration entre entreprises d’un même secteur est essentielle afin de réduire les emballages ou favoriser leur recyclage.

«À la base, ce n’est pas processus naturel, car ce sont des compétiteurs», précise-t-elle. On pousse beaucoup pour que les entreprises travaillent sur des solutions sur une base consensuelle. Et travailler ensemble, ne veut pas nécessairement dire que tout le monde fait pareil.»

Les entreprises pourraient par exemple faire des achats groupés, collaborer pour trouver ou faire vivre un fournisseur local, ainsi que mutualiser les livraisons, qui sont autant de moyens de réduire leur empreinte environnementale.

«Elles sont toutefois beaucoup plus sensibles aux questions liées à l’emballage et à l’environnement qu’avant», fait valoir Geneviève Dionne.

Parmi des exemples à suivre, elle cite le panier de fraises avec une poignée en carton qui a été largement adopté au Québec après qu’un producteur eut montré la voie.

Il y a aussi l’industrie du cannabis qui se retrouvait avec toutes sortes de formes de contenant et de bouchons, de type de plastique et de colles différents, des encres diversifiées…,bref une complexité qui constituait une barrière énorme à la revalorisation de ces emballages. Toutefois la Société québécoise du cannabis a émis des recommandations pour uniformiser le tout auprès des fabricants.

Elle sait que «changer les mentalités prend du temps», mais elle constate qu’il existe un mouvement mondial vers des emballages durables ou qui peuvent être revalorisés après utilisation.

Mais au-delà de toutes ces préoccupations, elle tient à rappeler que le consommateur «n’achète pas des emballages, mais des produits emballés». Les entreprises ne devraient pas perdre cela de vue.