Notre gestion des courriels est, en général, dangereusement chronophage. (Photo: Christin Hume pour Unsplash)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «Chaque jour, je reçois plus de courriels que je n’arrive à en gérer. J’ai la sensation de me noyer. Comment réussir à sortir la tête de l’eau?» – Audrey
R. – Chère Audrey, il est vrai que les courriels peuvent vite inonder notre boîte si l’on ne les traite pas avec constance et rigueur. Et même là, cela peut ne pas suffire, car certains jours – allez savoir pourquoi – nous coulons littéralement sous les flots incessants de courriels.
Que faire? Ça me paraît simple: recourir à des trucs simples et efficaces adoptés par des champions de la gestion des courriels. À l’image de Matt Plumer, le PDG et fondateur du cabinet-conseil en productivité Zarvana, qui a analysé la façon dont la plupart d’entre nous gérons nos courriels, identifié nos mauvaises habitudes en la matière et trouvé des solutions visant à corriger le tir.
Erreur numéro 1: nous checkons tout le temps nos courriels
Si l’on additionnait les minutes que nous consacrons chaque journée à consulter, lire et traiter nos courriels, nous serions horrifiés: cela peut aisément représenter une ou deux heures, voire davantage. Imaginez ce que ça peut être à l’échelle d’une année…
Selon les travaux de M. Plumer, nous consultons notre boîte de courriels professionnels en moyenne 15 fois par jour, soit une fois toutes les 37 minutes. Nous prenons alors plusieurs minutes pour traiter ce qui doit l’être sans tarder. Et une fois cela fait, il nous faut, en général, 64 secondes pour nous remettre mentalement en état de reprendre le collier, révèle une étude de l’Université de Loughborough, en Grande-Bretagne.
On le voit bien, notre façon de faire est dangereusement chronophage.
Le problème vient du fait que notre gestion est chaotique: nous réagissons au quart de tour quand une notification surgit dans un coin de notre écran, même si le courriel n’est pas important; nous prenons de longues minutes à donner une belle réponse juste parce que le courriel vient du boss, et nous ne mettons pas autant d’efforts – faute de temps, nous justifions nous inconsciemment – dans la réponse à la question d’un client; etc.
La solution prônée par Matt Plumer est à la fois double et radicale:
– Supprimer une bonne fois pour toutes les notifications. Les courriels ne peuvent plus ainsi saboter notre travail en cours.
– Ne consulter notre boîte de courriels qu’une fois par heure. Et ne lui dédier alors que 7 ou 8 minutes maximum, jamais plus. De fait, cela nous forcera à aller à l’essentiel, et donc à être efficace dans notre traitement.
Erreur numéro 2: nous archivons, encore et toujours
Que faisons-nous lorsqu’un courriel n’est pas urgent? Nous le classons dans un dossier, dans l’optique d’y revenir plus tard, quand nous aurons un instant à nous.
Grave erreur! Car cela nous forcera à le lire une seconde fois (perte de temps), à un moment où nous culpabiliserons parce que le dossier en question est rempli de courriels non traités alors qu’ils auraient dû l’être depuis un bon bout de temps (charge mentale).
Le mieux est de régler le courriel lu dans l’instant même, en lui consacrant le moins de temps possible, estime M. Plumer. Et donc, de mettre un terme à notre réflexe de classer tout et n’importe quoi.
Selon ses travaux, nous avons en moyenne 37 dossiers de courriels sous la main. Et nous nous y perdons forcément, maladroits que nous sommes dans notre façon de rechercher tel ou tel courriel: en général, on clique sur un dossier et on scrolle jusqu’à ce qu’on finisse par tomber sur celui qui nous intéresse; ce qui se traduit par des minutes et des minutes perdues tous les jours.
Le truc? Matt Plumer préconise l’utilisation systématique du moteur de recherche. Par mots-clés (ça va 9% plus vite que de scroller une boîte de courriels). Ou bien par opérateurs courants (par exemple, « from:redaction@lesaffaires.com ») (gain de temps estimé à 50%).
Erreur numéro 3: nous tolérons les courriels non pertinents
Selon les données de Sanebox, 62% des courriels que nous recevons ne sont pas pertinents. Il peut s’agir, disons, de courriels indésirables, mais que nous parcourons tout de même, par pur professionnalisme; ou encore, d’infolettres auxquelles nous sommes abonnés, mais que nous n’ouvrons presque plus (les travaux de M. Plumer montrent que nous n’en ouvrons en général qu’une sur cinq!).
Là encore, cela représente une perte de temps considérable.
D’où l’intérêt d’agir sans pitié à leur égard:
– Filtrer automatiquement les infolettres que nous ne lisons presque plus, mais auxquelles il faut que nous soyons abonnés.
– Se désabonner des infolettres et autres messages d’entreprises que ne sont absolument plus pertinents pour nous.
– Bloquer systématiquement les expéditeurs qui nous envoient un courriel indésirable. Sans leur laisser de seconde chance.
En recourant à ces trucs, Audrey, vous devriez voir fondre de lui-même le nombre de courriels que vous recevez dans la journée, comme par magie.
En passant, le sociologue français Dominique Wolton aime à dire: «Dans la communication, le plus compliqué n’est ni le message, ni la technique, mais le récepteur».