Une étude montre que le travail effectué le vendredi est, en général, minimal, et pourrait être réparti sur les autres jours de la semaine. (Photo: Paulette Wooten pour Unsplash)
MAUDITE JOB! Q. — «Je me suis toujours posé la question, sans bien entendu en parler à qui que ce soit: à quoi ça sert de travailler le vendredi? Chez nous, j’en vois plus d’un qui lèvent le pied comparativement aux autres journées, en particulier les boss…» – Amir
R. — Cher Amir, sachez que votre interrogation, vous n’êtes pas seul à vous la poser. Loin de là. Car la réalité que vous décrivez est quasiment généralisée. J’en veux pour preuve les résultats d’un récent sondage mené en France par Flashs, une firme spécialisée dans le traitement et l’analyse de données, pour le compte d’Hostinger, une société d’hébergement web. Regardons ça ensemble.
Après avoir interrogé mille salariés ainsi que mille hauts dirigeants et gestionnaires représentatifs de l’ensemble des travailleurs français, il en ressort plusieurs faits on ne peut plus intéressants:
– Une journée plus détendue que les autres. La moitié (50%) des salariés trouvent que le vendredi est, en général, une journée «plus détendue» que les autres. C’est surtout vrai auprès des jeunes salariés: le pourcentage monte à 56% pour les 18-24 ans et même à 61% pour les 25-34 ans. Et – tenez-vous bien – c’est particulièrement vrai pour les hauts dirigeants et les gestionnaires, le pourcentage étant pour eux de 61%.
– Une journée moins chargée que les autres. Le quart (28%) des salariés planifient leur semaine de telle sorte qu’ils ont peu de tâches à accomplir le vendredi. Les 18-24 ans sont 35% à le faire.
– Une journée propice à la procrastination. Les deux tiers (67%) des salariés avouent, sous le couvert de l’anonymat, qu’ils ont pris l’habitude de reporter au lundi des tâches qu’ils auraient pu effectuer le vendredi. C’est juste que, le vendredi, ils n’avaient pas le goût de donner le coup de collier nécessaire pour ça. Mais surtout – tenez-vous encore mieux – c’est également le cas pour… 81% des hauts dirigeants et gestionnaires. Oui, vous avez bien lu: ils sont 4 sur 5 à reporter au lundi une partie de ce qu’ils auraient dû faire le vendredi.
– Une journée propice aux maladies imaginaires. 1 salarié sur 5 (18%) a déjà simulé une maladie pour ne pas aller travailler un vendredi. Cette pratique concerne surtout les hommes (21%) et les jeunes (33% des 18-24 ans; 23% des 25-34 ans).
Autrement dit, personne n’en fait lourd le vendredi. Ni les salariés ni les boss. C’est effectivement à se demander s’il est si utile que ça de bosser le vendredi.
D’autant plus que ce sondage n’est pas le premier du genre. L’an dernier, l’organisme 4 Day Week Global a regardé comment s’en sortaient une cinquantaine d’entreprises qui avaient adopté la semaine de 4 jours.
Toutes avaient adopté la même stratégie: les travailleurs bénéficiaient d’un jour de congé payé par semaine, en échange de quoi ils s’engageaient à ne pas diminuer leur volume de travail. La plupart du temps, ça revenait pour chaque travailleur à ajouter moins d’une heure et demie de travail par journée travaillée.
Résultat? La quasi-totalité des travailleurs a parfaitement réussi à s’adapter à ces journées plus longues en contrepartie d’une journée de congé par semaine. Mieux, ils ont réalisé qu’en maximisant leur travail en fin de journée, ils n’avaient pas besoin de faire une heure et demie de plus pour faire tout ce qu’ils devaient faire: les 7 heures du vendredi, réparties sur les autres journées de la semaine, ne sont ainsi devenues plus que 3 heures!
La conclusion saute aux yeux: vous comme moi, nous pourrions fort bien nous passer du vendredi à condition de répartir un total de 3 heures de travail supplémentaires dans les autres journées de la semaine. Eh oui, le vendredi ne sert presque à rien! (Et c’est aussi vrai pour les salariés que pour les boss.)
Voilà, Amir. Vous avez bel et bien raison, le vendredi ne sert pas à grand-chose. Et les dirigeants honnêtes devraient être les premiers à le reconnaître, eux qui procrastinent presque tous ce jour-là.
Si vous souhaitez ouvrir le débat à ce sujet au sein de votre PME, je vous invite à laisser traîner des copies de cette chronique à différents endroits stratégique, comme le babillard qui doit se trouver à proximité de la distributrice à café. Des boss ne manqueront pas de tomber dessus, et de se mettre à réfléchir quant à la pertinence de ce message qui leur est ainsi adressé. Qui sait? Ça pourrait peut-être bien faire bouger les choses chez vous…
En passant, l’écrivain français André Gide a dit dans «Les Faux-monnayeurs»: «Les bons travailleurs ont toujours le sentiment qu’ils pourraient travailler davantage».