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Apprendre à vivre le moment présent, aussi terrible soit-il

Geneviève Desautels|Publié le 29 juillet 2020

Apprendre à vivre le moment présent, aussi terrible soit-il

Quand on observe, on s'observe... (Photo: Theodor Vasile/Unsplash)

BLOGUE INVITÉ. Depuis quelques semaines j’observe et je m’observe. Je lis beaucoup. Des journaux, des textes scientifiques, des textes d’analyse, ou encore des commentaires laissés ici et là sur les médias sociaux.

Avec mes lunettes, ma propre perception du monde, je tente de décrypter la situation, le marché, l’écosystème, l’évolution de notre société, et d’en tirer des conclusions. Mais chaque fois, ces «conclusions» sont déboulonnées quelques jours plus tard par de nouvelles informations qui viennent bousculer mes croyances et ma compréhension de la situation.

Résultat? Je me suis rarement trouvée aussi longtemps dans une période où – comme me l’avait dit une ancienne patronne alors qu’on était à une étape cruciale de négociation – « il est urgent de ne rien faire ».

Cela ne veut pas dire pour autant qu’il convient de sombrer dans la léthargie, de se laisser aller… Bien au contraire, cela nécessite d’être attentif à ce qui se passe ici et maintenant, de ressentir le chaos en nous et autour de nous en ce moment précis. Un chaos qui n’est pas franchement dû à un ou plusieurs changements technologiques ou organisationnels, mais plutôt à la mutation de notre monde, de notre société, résultant directement et indirectement de la pandémie du nouveau coronavirus.

Or, le chaos est nécessaire au changement. Car pour pouvoir entrer pleinement dans le «nouveau normal», pour espérer bientôt vivre au sein d’une société améliorée (tant au niveau de notre vision de la performance que celui de nos valeurs), ça prend une période de chaos.

Toutes les équipes le vivent périodiquement. Après une période de «lune de miel», il y a immanquablement cette période où les négociations, les conflits, les enjeux relationnels et les jeux de pouvoir surgissent. C’est normal. C’est même sain et nécessaire pour pouvoir passer à la prochaine étape, qui consiste à être en synergie et en confiance les uns avec les autres jusqu’à ce que naisse une véritable collaboration.

Dans notre évolution vers le «nouveau normal», mes observations m’amènent à penser et à voir du beau dans ce qui, à l’échelle micro, est triste et parfois pathétique. Sans avoir des lunettes roses, j’en déduis que nous sommes collectivement, pour la première fois de notre existence, tous confrontés simultanément à une multitude de changements et de transformations dans plusieurs des sphères de nos vies sur lesquelles nous avons peu ou pas de contrôle.

La femme d’action que je suis est rendue à l’étape d’observer et d’accepter ce qui est…

Je n’ai pas de contrôle sur la potentielle seconde vague de COVID-19, ni sur toutes les autres surprises que la nature nous réserve, ni sur le futur vaccin, ni sur le redémarrage de l’économie, ni sur la prochaine rentrée scolaire, ni sur ce à quoi ressemblera le «nouveau normal» dans 5 ans, ni même sur l’impact qu’aura tout cela sur ma vie personnelle et sur celle de ma famille.

Toutefois j’ai du contrôle sur la manière dont je réagis au fait de ne pas avoir le contrôle. J’ai du contrôle sur le «quoi», sur mon intention, sur mes pensées et sur mes actions.

En vérité, je n’ai jamais eu de contrôle sur le «quand» et le «comment», même si, pourtant, je le croyais. Ce n’était qu’une illusion due au fait que les choses évoluaient lentement et dans une sphère de ma vie à la fois…

À présent, j’apprends à apprendre. Je découvre une façon différente de vivre. Une façon de percevoir le monde qui, au lieu de m’amener à tenter de contrôler l’incontrôlable (ce qui m’épuise mentalement et physiquement), me permet de percevoir ce qui est comme un processus dont le chaos et l’incertitude font partie.

Mon truc pour y arriver et rester un tant soit peu zen dans ce chaos collectif? Je me pose la question suivante plusieurs fois par jour: «Si je n’avais pas peur, je penserais quoi? je dirais quoi? je ferais quoi?»

Je compare cette période inédite de ma vie à un voyage; et je me dis que la préparation, l’expérience elle-même, les rencontres et les anecdotes sont toujours plus importantes que la destination…