«Au secours, mon salaire ne me permet plus de m’en sortir!»
Olivier Schmouker|Publié le 05 juillet 2022Un stress que partagent 38% des Québécois... (Photo: 123RF)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «J’en ai perdu le sommeil, j’y pense souvent au travail et maintenant je commence vraiment à paniquer. Les prix du gaz et de la nourriture battent des records, mais mon salaire, lui, fait du surplace. Encore quinze jours comme ça, et je ne vais pas réussir à boucler la fin de mois.» – Fiona
R. — Chère Fiona, les quelques éléments que vous me communiquez m’incitent à vous confier que vous ne vivez peut-être pas là un «stress financier» classique — des soucis d’argent qui gâchent votre bien-être quotidien —, mais quelque chose de plus complexe qu’on appelle un «traumatisme financier». Il s’agit d’un trouble psychologique lié à l’argent, dont les symptômes s’apparentent à ceux du syndrome du stress post-traumatique (SSPT): difficulté à bien dormir, difficulté à se concentrer, sentiment de danger imminent, etc.
Des semaines de stress financier intense peuvent mener au traumatisme financier. Et l’inflation que nous subissons ces temps-ci est malheureusement propice à la multiplication des cas de traumatisme financier. D’autant plus que le stress financier est aujourd’hui ce qui sape le plus le moral des Canadiens, selon une récente étude du Conseil des normes en planification financière, FP Canada. Les Canadiens sont 38% à dire que l’argent est ce qui les stresse le plus, loin devant la santé (21%), le travail (19%) et les relations interpersonnelles (18%).
Comment faire face à un tel danger? Pour commencer, il peut être bon pour vous, Fiona, de faire le point sur l’état de vos finances. L’Association canadienne de la paie, en collaboration avec le Laboratoire canadien sur le bien-être financier de l’Université Western, à London (Ontario), a justement conçu un Évaluateur de santé financière, qui est accessible en ligne, en français et en anglais.
Il suffit de répondre à 12 questions pour qu’un algorithme détermine si l’on est «à l’aise financièrement», «ni à l’aise ni stressé» ou «financièrement stressé» pour pouvoir ensuite obtenir des outils et des ressources adaptés à notre situation. L’objectif affiché est d’aider à «prendre de meilleures décisions financières» et à «faire de petits pas significatifs vers la résilience financière».
Ensuite, Fiona, il convient de prendre davantage le contrôle de vos finances personnelles, grâce notamment à trois trucs pratiques dénichés dans différents livres récents sur le sujet, à l’image de l’incontournable «As-tu réglé ça? S’occuper de ses affaires avant que le trouble» du planificateur financier Dany Provost.
1. Analyser ses factures numériques
La majorité de nos factures sont numériques, si bien que nous n’y jetons même plus un œil. Or, nous gagnerions à le faire sur une base régulière, en nous posant des questions du genre: «N’y aurait-il pas un forfait plus avantageux pour mon cellulaire?» ou encore «N’y aurait-il pas un fournisseur Internet moins cher que celui que j’ai actuellement?» À la clé, des dizaines, voire des centaines, de dollars d’économie par mois.
2. Changer de stratégie pour régler ses dettes
Un bon nombre d’entre nous avons le réflexe de régler nos dettes les plus petites, histoire d’en finir rapidement avec elles. Ça nous donne l’impression d’être efficaces, en ayant de moins en moins de dettes.
Le hic, c’est qu’une telle stratégie ne permet pas vraiment de diminuer ses dettes, à tout le moins dans leur globalité. Non, le mieux est de s’attaquer en premier à la dette qui a le taux d’intérêt le plus élevé. Un calcul rapide va vous en convaincre:
– Imaginez que vous voulez consacrer 500 $ au remboursement de vos dettes.
– À votre avis, vaut-il mieux dédier ce 500 $ à une dette de 2 000 $ dont le taux d’intérêt est de 15% ou bien à une autre de 500 $ dont le taux d’intérêt est de 5%?
– La réponse saute aux yeux: le premier cas vous permettra de perdre moins d’argent en intérêts que le second cas.
3. Arrêter de célébrer sa paie
Certains ont pris l’habitude de fêter leur chèque de paie, en savourant un bon repas au restaurant, en payant leur tournée, en s’offrant une nouvelle paire de chaussures. Ce faisant, ils ne réalisent pas que ces dépenses sont, d’un point de vue purement financier, inutiles. D’où l’idée de mettre le holà sur ces dépenses-là, à tout le moins jusqu’à ce que le stress financier soit moins intense qu’il ne l’est à présent.
Voilà, Fiona. J’espère que tout cela contribuera à atténuer votre stress financier, et surtout à vous éviter un traumatisme financier. Sans parler du sommeil paisible, que j’espère que vous retrouverez sous peu. Car, comme l’a dit l’écrivain québécois Yves Thériault dans «Le Grand Roman d’un petit homme», «L’insomnie est mauvaise conseillère ; surtout, elle exagère les images. Elle transforme facilement l’inquiétude en effroi, l’effroi en épouvante».