Les détracteurs s'inquiètent des conséquences qu’une telle attitude peut avoir sur la carrière des jeunes qui aspirent à un «lazy girl job». (Photo: 123RF)
RHéveil-matin est une rubrique quotidienne où l’on présente aux gestionnaires et à leurs employés des solutions inspirantes pour bien commencer leur journée. En sirotant votre breuvage préféré, découvrez des astuces inédites pour rendre vos 9@5 productifs et stimulants.
RHÉVEIL-MATIN. Après le «quiet quiting» et le «bare minimum Monday», voilà qu’un nouveau mot-clic prend d’assaut les réseaux sociaux afin d’appeler à un meilleur équilibre entre travail et vie personnelle : le «lazy girl job».
N’avalez pas votre gorgée de café de travers.
Non, ces «emplois pour filles paresseuses», peut-on librement traduire, n’est pas un terme péjoratif d’après celle qui l’a popularisé, la créatrice de contenu américaine de 26 ans Gabrielle Judge.
L’expression fait plutôt référence à un poste qui permet de payer ses factures et d’avoir un équilibre de vie si sain qu’il donne pratiquement l’impression de faire preuve de paresse, explique-t-elle dans une vidéo.
Pied de nez à la «hustle culture», ce mouvement encourage plutôt d’occuper des postes «non techniques en technologie» pour lequel on peut travailler à distance, avoir un horaire de travail flexible et une rémunération globale attrayante. Gabrielle Judge fait référence à des libellés de poste tel «chargé de projet en marketing, gestionnaires de comptes, ou responsables du succès client».
Ce type d’emploi dont elle fait ici la promotion ne s’adresse d’ailleurs pas qu’aux femmes, ajoute-t-elle, ni ne remet en question la valeur des personnes qui les occupent. « Tout ce dont je fais la promotion [soit de trouver un équilibre entre le boulot et sa vie personnelle en respectant ses limites] est considéré comme paresseux si on compare à ce qui est attendu des environnements de travail toxiques», nuance la créatrice de contenu.
Si elle a choisi une telle expression pour décrire ce mode de vie dont elle fait la promotion, c’est aussi pour son potentiel viral. Et les réactions sur les réseaux sociaux semblent lui donner raison. De nombreux médias américains rapportent que des vidéos auxquels on a apposé ce mot-clic ont généré plus de 18 millions de vue depuis la mi-mai.
D’après la professeure de gestion de la Stern School of Business de l’Université de New York, Suzy Welch, cette tendance est une autre preuve du refus de certains membres de la jeune génération de s’épuiser à la tâche comme l’on fait leurs aïeules.
«Ils se disent “Je ne vais pas attendre toute ma vie pour atteindre un équilibre entre travail et vie personnelle et remettre à plus tard mon bonheur. Je ne sais pas si en suivant les règles du jeu, je vais gagner la partie”», a-t-elle expliqué à la chaîne de nouvelles américaine CBS.
Le danger d’un tel mot-clic
Prendre soin de trouver un équilibre entre travail et vie personnelle est une chose. S’afficher ouvertement comme une personne qui a un «lazy girl job» en est une autre. Même Gabrielle Judge ne recommande pas de se vanter d’avoir un tel emploi, car la connotation négative associée au terme peut entraîner de malheureuses conséquences dans leur milieu de travail.
Les détracteurs s’inquiètent aussi des conséquences qu’une telle attitude peut avoir sur le développement de la carrière des jeunes travailleurs qui y adhèrent, rapporte-t-on dans le Wall Stree Journal.
Dans le Washington Post, la chroniqueuse Megan McAdle se demande si d’adopter une telle philosophie au début de sa carrière n’est pas une mauvaise idée à long terme.
Les membres de la génération Z, qui semblent être ceux qui adhèrent le plus au «lazy girl era», n’ont connu qu’un marché de l’emploi où il y a davantage de postes à pourvoir que de travailleurs, observe-t-elle. Or, le vent peut tourner, et pas qu’à cause d’un ralentissement économique, mais aussi des perturbations que les nouvelles technologies peuvent générer.
Et ce qu’ils ne savent pas, mais que les milléniaux et les X ont déjà pu constater, c’est que ce sont justement ces postes attrayants qui sont les plus à risques d’être coupés. «Lorsqu’une récession approche, qui l’employeur laissera-t-il partir en premier? Le “quiet quitters”, “la deuxième personne la moins efficace dans son équipe” (une stratégie qu’encourage Gabrielle Judge les travailleurs à adopter dans une de ses vidéos), ou la personne qui travaille à distance et qu’on connait à peine?», demande-t-elle.