Veiller à avoir un impact toujours positif. (Photo: Redd pour Unsplash)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «J’entends beaucoup parler de “leadership bienveillant”. C’est quoi ça, au juste? Une nouvelle mode managériale? Ou bien une approche du rôle du gestionnaire vraiment valide? Je suis curieux: ça pourrait m’intéresser, mais si c’est pour me faire marcher sur les pieds, c’est non!» – Louis-Charles
R. — Cher Louis-Charles, le leadership bienveillant n’est pas vraiment une nouveauté. On en parle depuis le début des années 2000 dans les milieux universitaires, et l’une des études les plus marquantes à son sujet vient du Québec!
En 2010, Fahri Karakas était doctorant à la faculté de gestion Desautels de l’Université McGill, à Montréal. Celui qui est aujourd’hui professeur de leadership et de gestion des affaires à l’Université d’East Anglia de Norwich (Grande-Bretagne) avait alors réfléchi sur la définition la plus précise possible qu’on puisse donner à ce concept novateur, et le résultat de ses réflexions lui a permis de remporter cette même année le prestigieux prix international Emerald/EFMD du meilleur rapport de thèse sur le leadership.
Sa définition du leadership bienveillant fait à présent autorité. Elle considère qu’il s’agit d’«un cercle vertueux qui encourage, initie et met en œuvre des changements positifs au sein d’une organisation», et ce à l’aide de quatre leviers.
– Éthique. Les décisions sont éthiques et les actions justes.
– Inspirationnel. L’esprit d’équipe est développé et le travail a du sens.
– Positif. L’espoir est cultivé et chacun est invité à apporter une contribution positive au collectif.
– Durable. L’optique est d’avoir un impact positif durable sur l’ensemble de la communauté (les membres de l’équipe, les partenaires d’affaires, les clients, et autres).
Autrement dit, le leader bienveillant n’est pas celui qui dit «oui» à tout et à n’importe quoi, en particulier aux caprices de certains membres de son équipe. Ce n’est pas, comme vous le craigniez, le gestionnaire qui se fait marcher sur les pieds. Non, le leader bienveillant est plutôt celui qui fait preuve d’éthique dans chacune de ses décisions, qui trouve des missions tripantes pour chacun comme pour l’ensemble de l’équipe, qui inspire tout le monde à donner son 110% et qui veille à agir pour le bien commun. Tout ça à la fois.
Bon. En théorie, tout cela est bien beau. Mais sur le terrain, ça donne quoi?
Dorota Grego-Planer est professeure de gestion des affaires à la faculté des sciences économiques et de management de l’Université Nicolas-Copernic, à Torun (Pologne). Dans une récente étude, elle a regardé un point très précis, à savoir si le leadership bienveillant avait la moindre incidence sur l’engagement des employés, ou pas.
La chercheuse polonaise a analysé des données à ce sujet concernant 415 employés dont le leader agit de manière bienveillante. Cela lui a permis de mettre au jour le fait que plus un gestionnaire applique et maîtrise le leadership bienveillant, plus les employés sous sa responsabilité sont engagés dans leur quotidien au travail. Oui, plus ils sont motivés, efficaces et productifs. Rien de moins.
«Plus un leader a le souci d’apporter des changements positifs et constructifs, plus il favorise l’émergence du meilleur de chacun dans son travail, pour le plus grand profit du collectif», résume Dorota Grego-Planer dans son étude.
Ça me paraît donc clair, mon cher Louis-Charles, il est de toute évidence payant d’adopter le leadership bienveillant. D’autant plus que cela a un impact indirect on ne peut plus intéressant, en ces temps de pénurie de main-d’œuvre. «Les employés dont le leader fait preuve de bienveillance s’identifient davantage que les autres aux valeurs de l’organisation, et ce lien renforcé les incite à rester plus longtemps que les autres au sein de cette même organisation», note la chercheuse polonaise. Comme quoi, ça renforce de surcroît la fidélité.