Comment apprivoiser la web caméra (et gagner en impact)?
Geneviève Desautels|Publié le 03 novembre 2020(Photo: Jornada Produtora pour Unsplash)
BLOGUE INVITÉ. Comme moi, entendez-vous à longueur de journée ces phrases répétées mécaniquement, qui visent à se plaindre des travers du télétravail? Ces phrases du genre:
«Il nous manque l’informel.»
«Je m’ennuie de mes collègues.»
«Je me sens seule.»
«J’haïs ça me voir à l’écran.»
«J’ai pas envie que mes collègues et les patrons voient comment je suis installé à la maison.»
«Ma connexion Internet n’est pas bonne, je dois fermer ma web caméra.»
«On utilise trop de bande passante, fermons tous notre web caméra.»
Je vous l’accorde, ce n’est pas évident de s’adapter à la réalité de travailler chacun à des endroits différents. Surtout dans le contexte de la pandémie et de ses enjeux sociaux et politiques, où il est sans cesse question de restructurations, de pertes d’emplois, ou encore de changements technologiques, culturels et organisationnels. Du coup, l’enjeu d’activer, ou pas, sa caméra lors d’une rencontre virtuelle peut paraître secondaire…
Toutefois, il est question d’intelligence émotionnelle lorsqu’on s’adresse à autrui par web caméra interposée. Et c’est là une question devenue primordiale au travail. Je m’explique…
Quand je dirigeais, avec mon associé Philippe Richard Bertrand, des programmes de formation sur l’intelligence émotionnelle dans le cadre des Événements Les Affaires, nous apportions avec nous un grand miroir. L’idée était que les participants puissent s’exercer à s’exprimer devant… eux-mêmes.
L’intention: prendre conscience de son impact et apprivoiser son propre regard en communiquant un message.
Cet exercice est difficile, mais on ne peut plus révélateur et formateur.
C’est que la web caméra de votre ordinateur est l’équivalent du miroir de notre exercice, sauf que cette fois, ce n’est pas dans le cadre d’un programme de formation mais bien dans la vraie vie que vous vous pratiquez. Vous comprenez maintenant pourquoi on entend toutes les excuses imaginables pour pouvoir fermer la web caméra…
Certes, c’est votre droit de le faire, mais permettez-moi de vous inviter à agir autrement, car il en va de votre impact, de votre influence, de vos relations humaines.
Comment surmonter votre gêne? Eh bien, imaginez que votre prochaine rencontre virtuelle avec votre patron ou avec vos collègues se déroule en face à face, mais… en pleine noirceur! Imaginez ça pendant une minute. Et maintenant, convenez avec moi que jamais vous ne feriez une telle chose! Et c’est pourtant exactement ce qui se passe lorsque votre web caméra est fermée…
Si vous demandiez à un artiste ce qui pourrait lui arriver de pire sur scène, il vous répondrait automatiquement que ce serait de ne pas pouvoir voir et ressentir les réactions du public dans la salle. Car il en a besoin pour être bon, pour donner une performance remarquable.
Or, c’est exactement ce que vous imposez aux autres lorsque votre web caméra est fermée. Pis, vos collègues et patrons apprennent eux aussi à apprivoiser la web caméra et à travailler en ligne…
Voilà pourquoi un peu de compassion et de bienveillance est de mise. S’il vous plait, ouvrez votre web caméra lors de votre prochaine réunion virtuelle, en tenant compte des quelques conseils suivants:
– À ceux qui ne veulent pas montrer le décor de leur lieu de télétravail, je vous invite à étudier les fonctionnalités de l’outil que vous utilisez afin de mettre un faux décor derrière vous (lequel peut être rigolo ou corporatif, selon ce qui est de mise).
– À ceux qui ont des réels enjeux de connexion Internet, d’équipement informatique ou de bande passante, arrangez-vous pour obtenir de meilleurs outils de travail auprès de votre employeur. Comme vous le feriez si vous aviez du mauvais matériel au bureau.
– À ceux qui se sentent intimidés par la web caméra, je vous invite à vous pratiquer devant le miroir, à apprivoiser votre regard sur vous-même, à contrôler vos tics nerveux, vos béquilles langagières, vos petites rides et votre sourire. (Offrez-vous par la même occasion le plus beau des cadeaux: votre propre bienveillance et indulgence.)
À la clé, plus d’assurance dans votre quotidien au travail. Et également plus de tolérance à l’égard des autres, qui peinent eux aussi dans ces nouvelles conditions de travail (même s’ils essaient de le cacher).