Quant vous allez au bureau, apportez-en moins avec vous. (Photo: 123RF)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «Le stress lié à la pandémie et le fait de télétravailler seule depuis chez moi m’ont fait reprendre la cigarette. Là, nous devons travailler de manière hybride et j’aimerais en profiter pour moins fumer. Y a-t-il un truc pour m’empêcher de fumer les jours où je suis au bureau?» – Mia
R. — Chère Mia, j’ai une bonne nouvelle pour vous: je crois bien avoir mis la main sur un petit truc qui devrait vous faire du bien. Une astuce à laquelle peut a priori recourir n’importe laquelle des 12% de personnes de 15 ans et plus qui fument des cigarettes aujourd’hui au Québec, selon les données de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ).
Je l’ai déniché dans une étude menée en 2015 par deux professeurs d’économie de la santé: Joachim Marti, de l’Université de Leeds (Grande-Bretagne), et Jody Sindelar, de l’Université Yale (États-Unis). Les deux chercheurs ont noté trois informations précises concernant le marché du tabac aux États-Unis:
— La norme veut que les paquets renferment 20 cigarettes.
— Un fumeur américain fume en moyenne 15 cigarettes par jour. (Au Canada, c’est 14, selon Statistique Canada.)
— Les fumeurs mesurent, en général, leur consommation en termes de paquets plutôt qu’en comptant le nombre de cigarettes.
La conjonction de ces trois faits leur a donné une idée d’une géniale simplicité: si l’on vendait des paquets plus petits (par exemple, 10 cigarettes par paquet au lieu de 20), cela entraînerait-il une diminution de la consommation de tabac?
Ni une ni deux, les deux chercheurs ont procédé à un sondage et à une petite expérience auprès de quelque 600 fumeurs adultes. Ce qui leur a permis de faire de belles trouvailles.
— Le tiers des fumeurs deviendraient des acheteurs de paquets de 10 cigarettes, car ils ont la conviction que cela les aiderait à avoir un meilleur contrôle sur leur consommation.
— Ces fumeurs-là seraient prêts à payer un peu plus pour pouvoir se procurer des paquets de 10 cigarettes. Vu que cela entraînerait des frais de production supplémentaires pour le fabricant, ils comprennent que le coût à l’unité de la cigarette (paquet de 10) soit un peu plus élevé que le coût actuel (paquet de 20).
— Les fumeurs qui disent vouloir «bientôt arrêter» de fumer adopteraient aussitôt les paquets de 10 cigarettes. (En passant, au Canada, 35% des fumeurs disent vouloir arrêter «d’ici les 30 prochains jours» et ils ne sont que 6% à y parvenir, selon un sondage annuel mené par Statistique Canada.)
La conclusion saute aux yeux. De toute évidence, les gouvernements gagneraient à imposer la fabrication de paquets de 10 cigarettes, car cela ferait chuter le tabagisme d’un seul coup. Mais il y a un hic, relevé par les deux chercheurs: d’autres études indiquent qu’un tel paquet, dont le prix d’achat serait presque moitié moins cher qu’un paquet de 20, inciterait un grand nombre de gens à devenir de nouveaux fumeurs. Ce qu’aucun gouvernement ne souhaite.
Bon. Revenons au petit truc que je vous ai promis, Mia. Peut-être avez-vous déjà deviné de quoi il s’agit.
C’est simple, il vous suffit de faire vous-même votre paquet de 10 cigarettes. Par exemple, procurez-vous une petite boîte métallique plate (on en trouve aisément en ligne ou chez les antiquaires) et rangez-y chaque matin très exactement 10 cigarettes. Pas une de plus.
En vérité, le nombre de 10 n’est qu’un exemple, l’idée principale étant de diminuer franchement votre consommation, disons du tiers, voire de la moitié si cela est envisageable. Quant aux jours où vous allez au bureau, peut-être pouvez-vous tenter d’en prendre encore moins avec vous. Tout cela devrait vous amener à fumer nettement moins, en particulier au bureau ; et par la suite, à envisager la possibilité de ne plus fumer du tout.