L'une des astuces consiste à passer du «Oui, mais...» au «Et si...». (Photo: Tim Mossholder pour Unsplash)
«J’ai réalisé qu’à la job tout le monde n’arrêtait pas de chialer, parfois pour de vrai problèmes, parfois pour pas grand-chose, voire pour rien. Et ça me met le moral à zéro…» – Manon
R. — Chère Manon, vous comme moi et nous tous, nous souffrons plus ou moins d’un biais cognitif particulier, le biais de négativité. C’est-à-dire que nous avons tendance à plus voir le négatif que le positif. Par exemple, nous retenons davantage les souvenirs liés à des émotions négatives que positives, ou encore la perspective d’une perte financière nous affecte davantage que la perspective d’un gain financier. Un détail ne trompe pas : le vocabulaire pour décrire la souffrance est plus riche que celui pour décrire la satisfaction.
Résultat? Dès lors qu’il nous faut raisonner, juger ou agir, le négatif l’emporte très souvent sur le positif. Comme vous l’indiquez, Manon, les remarques négatives fusent plus aisément que les commentaires positifs, en particulier au travail : le boss qui nous tanne, le client que se prend vraiment pour le roi, etc. De manière générale, nous usons aisément du «Oui, mais…» et rarement du «Et si…».
Comment, donc, mettre moins de négatifs et plus de positif dans notre quotidien au travail? Pour répondre à cela, je vais m’appuyer sur une partie de la conférence que la coach Annie Boilard a récemment donnée à l’occasion du 20e anniversaire du Groupe entreprises en santé. La chroniqueuse du journal Les Affaires y parlait de résilience et a justement présenté différents trucs pouvant permettre de changer notre perception des situations négatives. Regardons ça ensemble.
- Modifiez votre narratif
Pour apporter un peu plus de positif dans sa journée de travail, l’idéal est de commencer par être soi-même un peu plus positif. Cela nous fera du bien et donnera l’exemple aux autres.
D’où l’intérêt de systématiquement chercher le positif dans ce qui survient, et de l’exprimer à voix haute afin d’aider les autres à voir les choses autrement. Par exemple, au lieu de continuellement chialer sur la météo (temps frisquet, petite pluie, etc.), pourquoi ne pas plutôt souligner le magnifique rayon de soleil qui vient de réussir à percer la couche nuageuse?
Mine de rien, cette façon de positiver peut finir par changer la vie.
- Instaurez une routine de gratitude
L’idée est simple : à l’issue de votre journée de travail, prenez un petit moment à vous et, à l’aide d’un stylo et d’un carnet, notez vos trois satisfactions de la journée écoulée. Notez-les à la main. Soigneusement.
Ça peut être de petites satisfactions comme de grandes réussites. Peu importe. Ce qui compte, c’est d’en avoir plusieurs, au moins trois.
Vous verrez que les pages de votre carnet vont vite se remplir. Et rien ne vous empêche, lorsque vous avez un coup de blues, de le feuilleter et de relire au hasard différentes pages. Ça devrait regonfler votre moral d’un seul coup!
- Apprenez à gérer vos dialogues internes
Chacun de nous a une petite voix intérieure qui lui parle continuellement. Nous passons ainsi notre temps à dialoguer avec nous-mêmes. Pour tout et rien. C’est notre façon de penser, de réfléchir, de progresser.
Le hic? C’est qu’il nous arrive d’avoir des pensées négatives récurrentes, de revivre en boucle des moments pénibles, de broyer du noir. À cause de cette petite voix intérieure qui y revient tout le temps, semble-t-il malgré nous.
À cet égard, Annie Boilard a une question fascinante : «Vous êtes-vous déjà demandé pourquoi vous avez telle ou telle pensée négative qui vous revient sans cesse à l’esprit?» Une question qui fait réfléchir, n’est-ce pas?
Sa réponse est tout aussi subjuguante : «Et si c’était parce que votre cerveau entrait ainsi en mode solution…» Autrement dit, il nous appartient de mettre fin à la boucle, de prendre le temps de nous arrêter franchement sur la pensée qui nous taraude et d’y trouver une réponse ou une conclusion valable. Oui, valable, en ce sens qu’elle apporte une solution pratique et efficace, susceptible de mettre fin au problème en question.
Bref, il convient d’apprendre à gérer nos dialogues intérieurs, en nous attardant véritablement sur ceux qui sont négatifs au point de nous pourrir la vie. Pour ce faire, vous pouvez vous inspirer du cheminement mental préconisé par le coach français Adrian Dutertre, spécialisé dans l’accompagnement de sportifs de haut niveau :
- Pensée. Formulez mentalement la pensée qui vous nuit, ou mieux, notez-la dans un carnet. Pour un champion, ça peut être : «Je sais que je ne vais pas réaliser une bonne performance lors de ma prochaine compétition».
- Imagination. Imaginez un ou plusieurs scénarios d’échec liés à cette pensée négative, puis notez-les succinctement dans le carnet. Pour notre exemple, ça peut revenir à craindre une blessure, ou bien redouter le fait que les autres concurrents soient devenus plus performants.
- Émotions. Considérez les émotions négatives qui vous assaillent lorsque vos songez aux différents scénarios d’échec. Et notez-les dans le carnet.
- Comportement. Considérez maintenant les qualités que vous avez et qui peuvent vous permettre d’éviter le pire lors des différents scénarios d’échec. Pour notre champion, ça peut être sa rapidité, qui est sans égal, ou presque. Ou sa puissance musculaire qui a pris de l’ampleur ces derniers temps. Ou encore, sa faculté exceptionnelle à élaborer des tactiques et des stratégies qui désarçonnent ses adversaires.
- Performance. Dressez différents scénarios positifs dans lesquels vos qualités propres entrent en jeu et vous permettent de réussir là où vous pensiez échouer. Des scénarios réalistes, pratiques, pertinents. Et accompagnez chacun d’eux des émotions positives qui vous viennent rien qu’en y pensant. Pour notre champion, ça peut notamment correspondre au recours à son intelligence du jeu pour déstabiliser un adversaire réputé coriace et pour finir par l’emporter. Son émotion clé est dès lors la satisfaction d’avoir été plus malin que l’autre.
Et voilà comment on peut passer du négatif au positif! «Toutes les pensées négatives et interrogatives, acceptez-les et modifiez-les vers quelque chose de constructif et de motivant, résume Adrian Dutertre dans un billet de blogue. Faites une habitude de chercher le positif à travers le négatif. Car une pensée et une imagination à la fois constructives et positives sont la clé vers le bien-être et la performance.»
À vous de jouer, donc, Manon!