Comment vraiment améliorer la santé mentale de vos employés?
Olivier Schmouker|Publié le 31 janvier 2023Trop d'employés ont l'impression d'évoluer dans le flou, sans vrai soutien de leur employeur... (Photo: Kilarov Zaneit pour Unsplash)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «Depuis deux ans, nous avons fait beaucoup d’efforts pour améliorer la santé mentale de nos employés: travail hybride, allègement de la charge de travail pour chacun, etc. Et pourtant, nous n’avons pas noté d’amélioration significative de certains indicateurs, comme les taux d’absentéisme et de roulement du personnel. C’est à se demander si ces mesures sont vraiment efficaces…» – Caroline
R. — Chère Caroline, si cela peut vous rassurer, votre constat ne va pas — malheureusement — à contre-courant: une récente étude menée par le cabinet-conseil McKinsey auprès de quelque 15 000 employés œuvrant dans 15 pays différents a mis au jour le fait qu’en dépit de toutes les mesures visant à améliorer la santé mentale des employés qui ont été mises en place ici et là, 59% des employés disent souffrir, ou avoir dernièrement souffert, de maux liés à la santé mentale (sautes d’humeur intenses, chutes d’énergie, vagues d’anxiété, etc.). Oui, vous avez bien lu, cela concerne encore aujourd’hui 3 employés sur 5.
Les impacts de cette persistance des maux en lien avec la santé mentale sont multiples et conséquents pour les organisations, selon les experts de McKinsey:
– Cela multiplie par 4 le risque que les employés souffrants cherchent à changer d’employeur.
– Cela multiplie par 3 le risque qu’ils se disent insatisfaits au travail.
– Cela multiplie par 3 le risque qu’ils disent pâtir d’un management toxique.
– Cela multiplie par 2 le risque qu’ils se sentent moins engagés dans leur quotidien au travail.
Comme vous le voyez, Caroline, tout cela valide votre constat: les mesures que vous avez adoptées ne semblent pas avoir eu d’impact notable sur le bien-être psychologique des employés au sein de votre organisation.
Cela signifie-t-il pour autant qu’il faut baisser les bras et laisser tomber toutes ces mesures en raison du peu d’efficacité qu’elles semblent avoir? Non, bien entendu.
Dans son étude, McKinsey a regardé quelles mesures étaient les plus prisées par les employés en proie à des troubles de santé mentale. Cela lui a permis d’identifier celles qui étaient, par conséquent, les plus pertinentes, par ordre d’importance:
– Le soutien des pairs. Ce type de programme permet à l’employé concerné de discuter régulièrement, dans un lieu sécurisant, avec un collègue ayant lui-même connu des maux en lien avec la santé mentale. Le rôle du pair aidant est d’écouter avec bienveillance, de donner de l’espoir et d’inviter à demander une aide professionnelle.
– Le service de téléconsultation. Le principe est simple: bénéficier d’une série de rencontres en ligne avec un conseiller en santé mentale.
– Les ateliers en ligne sur la santé mentale. Il s’agit ici d’en apprendre davantage sur la santé mentale, sur ses principaux symptômes et sur les stratégies permettant d’y remédier au mieux.
– Le conseil personnalisé. L’idée est de bénéficier de l’aide d’un conseiller en santé mentale. Les rencontres se font en personne, et à l’occasion en visio ou sur simple appel téléphonique.
– La ligne d’urgence. L’objectif est d’avoir la possibilité, à tout moment, de signaler son état de détresse et d’obtenir immédiatement de l’aide.
Que ressort-il de tout cela? Qu’il ne suffit pas de tenter de prévenir les troubles liés à la santé mentale, comme le font aujourd’hui nombre d’organisations, comme la vôtre, Caroline. Qu’il faut également agir en fonction du fait qu’un grand nombre de vos employés sont à présent en souffrance sans le dire, même si vous avez du mal à le croire. Oui, qu’il faut impérativement offrir, en fonction de vos possibilités financières, un programme de soutien des pairs, des ateliers virtuels, ou encore un abonnement à une application dédiée à la santé mentale. Car telles sont les mesures vraiment souhaitées par les employés.
Un dernier mot: les experts de McKinsey soulignent dans leur étude un point qui me semble important, à savoir qu’il convient de considérer l’argent consacré à la santé mentale non pas comme une dépense, mais comme un investissement. Oui, un investissement, car lorsqu’il est bien placé, cela peut rapporter gros, surtout en ces temps de pénurie de main-d’œuvre.