1 télétravailleur québécois sur 2 y a pris goût... (Photo: Cayley Nossiter/Unsplash)
BLOGUE. Certains employés de Twitter ne reviendront jamais au bureau. Parce que leur PDG, Jack Dorsey, les y a autorisé dans un courriel envoyé mardi : «Si vous le souhaitez, vous pouvez à partir de maintenant travailler de chez vous de manière permanente, y compris lorsque la pandémie du nouveau coronavirus sera terminée», y est-il indiqué en substance.
Certes, des emplois nécessitent d’être physiquement au bureau – par exemple, ceux qui consistent à assurer la maintenance des serveurs informatiques -, et ne sont donc pas concernés par cette directive inédite. Toutefois, la très grande majorité des employés de Twitter sont vraiment libres de choisir de remettre un jour les pieds au bureau, ou pas. Et quiconque optera pour le télétravail permanent bénéficiera d’une allocation de 1.000$ US.
Dans son courriel, Jack Dorsey annonce qu’il est «peu probable» que Twitter rouvre ses bureaux «avant septembre». Il précise également qu’il n’y aura plus aucune réunion en personne «pour le reste de l’année», et que rien n’est encore décidé à ce sujet pour 2021. De plus, tous les voyages d’affaires sont «annulés jusquà l’automne», à quelques rares exceptions près.
Twitter a encouragé ses employés à se mettre au télétravail dès le début du mois de mars, et a été l’une des premières entreprises technologiques de la Silicon Valley à agir en ce sens lorsque la COVID-19 a pointé le bout de son nez aux États-Unis. Elle a vite été imitée par d’autres, dont Microsoft, Google et Amazon.
La décision radicale de Jack Dorsey n’est pas une si grande surprise que ça. En effet, des signes annonciateurs du changement à venir avaient vu le jour ici et là ces derniers temps, notamment par l’entremise de déclarations de Jennifer Christie, directrice, ressources humaines, de Twitter, à différents médias américains.
«(Notre entreprise) ne sera probablement plus la même, une fois la pandémie passée, avait-elle prévenu. Nous travaillerons sûrement autrement. Parce que nombre d’employés qui étaient réticents à travailler depuis la maison vont y prendre goût, après avoir constaté combien il était possible de s’épanouir ainsi. Quant aux managers qui croyaient être incapables de piloter une équipe à distance, ils auront une nouvelle perspective sur ce point, une perspective susceptible de les faire changer d’idée. Tout ça fait que je suis convaincue que demain matin nous ne travaillerons plus comme hier.»
Twitter fait-elle ainsi figure de pionnière? Les gens prennent-ils vraiment goût au télétravail, au point de songer à ne plus jamais remettre les pieds au bureau? Et nombre d’entreprises vont-elles devoir emboîter le pas afin de garder à elles les personnes les plus talentueuses?
Il se trouve que le firme de recherche Angus Reid a justement regardé ce point précis pour le compte du cabinet de ressources humaines ADP Canada. Et il en ressort que le sujet mérite bel et bien toute l’attention d’un grand nombre d’employeurs au Québec:
– Un véritable engouement. La moitié des télétravailleurs québécois (51%) disent qu’ils préféreraient travailler à distance «sur le long terme». Ce que personne n’aurait pu imaginer au début de 2020. Cela étant, une grande minorité (42%) indiquent qu’eux, ils ont «hâte» de retourner au bureau.
– La même quantité d’heures de travail. La moitié des télétravailleurs québécois (52%) travaillent le même nombre d’heures qu’avant la pandémie. Ils ne sont que 18% à travailler davantage d’heures. Et 30% reconnaissent qu’en vérité ils travaillent moins.
– La même qualité de travail. La moitié des télétravailleurs québécois (53%) affirment que leur nouveau mode de travail n’affecte en rien la qualité de leur travail. Mieux, ils sont 23% à dire que le télétravail a permis d’améliorer la qualité de leur travail.
– La même productivité. Pas loin de la moitié des télétravailleurs québécois (40%) disent que leur productivité est demeurée inchangée. Et ils sont 29% à estimer que celle-ci en a été carrément boostée.
Autrement dit, 1 télétravailleur québécois sur 2 a pris goût à ce nouveau mode de travail. Car cela leur a permis, en général, d’afficher une même productivité qu’au bureau; et pour un tiers d’entre eux, de voir celle-ci croître. Si bien que l’employeur n’était alors aucunement perdant en quantité et en qualité de travail effectué.
Quant aux autres, ils ont rencontré certaines difficultés qui ont gâché leur expérience:
– Connexions. 56% des télétravailleurs québécois disent souffrir de l’absence de contact véritable avec leurs collègues.
– Distractions. 40% des télétravailleurs québécois disent peiner à rester concentrés sur leur travail, en raison des distractions inhérentes à la maison.
– Pauses. 25% des télétravailleurs québécois disent ne pas arriver à prendre des pauses comme ils le devraient, ce qui les use.
Que retenir de tout cela? Ceci, à mon avis:
> Qui entend séduire les talents d’aujourd’hui et de demain se doit de planifier le télétravail à long terme au sein de son organisation. Il lui faut tirer les leçons de l’expérience de télétravail vécue par chacun – les bons coups comme les mauvais coups. Puis, il doit anticiper la forte demande en télétravail qui surgira immanquablement lorsque le retour «à la normale» surviendra; il se pourrait que 1 employé sur 2 en fasse la demande, si jamais ils sentaient une ouverture en ce sens.
En passant, l’écrivain français Christian Bobin a dit dans Geai : «Certaines choses et certains êtres ont besoin de la distance qui les sépare de nous, et que cette distance demeure infranchissable. Ils y puisent leur nourriture».
PLUS : «Télétravailleurs, voici 10 autocollants pour vous automotiver!»
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