La santé mentale: un actif stratégique pour l’économie de l’innovation
Le courrier des lecteurs|Mis à jour le 10 octobre 2024(Photo:123RF)
Un texte de Louis-Félix Binette, Directeur Général, Mouvement des accélérateurs d’innovation du Québec (MAIN) et Pierre Graff, Président et Directeur général, Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJCCQ)
COURRIER DES LECTEURS. À l’occasion de la journée mondiale de la santé mentale, le Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec (RJJCQ) et le Mouvement des accélérateurs du Québec (MAIN) font le constat commun que la santé mentale continue d’être un enjeu majeur pour les jeunes professionnels et les entrepreneurs du Québec.
Au-delà d’une préoccupation individuelle, un enjeu économique majeur.
Les enjeux de santé mentale pèsent lourdement sur l’économie canadienne. Chaque année, la perte de productivité et les absences liées aux problèmes de santé mentale coûtent environ 51 milliards de dollars à notre économie, en incluant les soins médicaux, les absences prolongées et la baisse de productivité au sein des entreprises. Il est donc crucial de reconnaître que la santé mentale est aussi un enjeu économique majeur. Une étude de Deloitte montre clairement que les entreprises qui investissent dans le soutien à la santé mentale de leurs employés ne font pas qu’améliorer le bien-être de leur personnel – elles renforcent également leur compétitivité. En effet, chaque dollar investi dans des initiatives de soutien rapporte en moyenne 4,20 $ en gains de productivité.
Du côté des entrepreneurs, un sondage de la BDC montre que le score moyen de bien-être mental des entrepreneurs, selon l’indice WHO-5, est de 59 sur 100, juste au-dessus du seuil de 50 indiquant un faible bien-être. L’équilibre travail-vie personnelle est d’ailleurs l’un des principaux facteurs de stress, suivi par l’inflation en ces temps de ralentissement économique. Lorsqu’un entrepreneur est en crise, en détresse ou fait face à l’épuisement, les répercussions sont nombreuses et pas seulement pour le projet entrepreneurial ou leur entreprise. C’est toute une communauté de familles, de proches, d’employés, d’accompagnateurs, d’investisseurs et tout son réseau qui est impacté.
Les résultats du sixième et dernier sondage du projet Travaillons Ensemble, réalisé par le RJCCQ entre 2021 et 2024, dressent un portrait préoccupant de la santé mentale des jeunes professionnels et entrepreneurs âgés de 18 à 35 ans. Ces résultats révèlent que plus d’un répondant sur 2 considère les mesures actuelles de soutien à la santé mentale comme insuffisantes. C’est pourquoi la sensibilisation, tout comme l’accès aux ressources de soins de santé sont aussi importants.
La santé mentale comme atout stratégique dans le parcours professionnel et entrepreneurial.
Bien que la prise de conscience au sujet de la santé mentale augmente, le chemin est encore long pour changer les perceptions sur ce sujet. Encore aujourd’hui, le mythe de l’entrepreneur super-héros invincible face à tous les obstacles tout comme la culture de la performance dans les organisations sont encore bien présents. Certes, les jeunes professionnels et entrepreneurs connaissent beaucoup de stress et portent beaucoup de poids sur leurs épaules, mais leur parcours ne devrait pas être souffrant. Briser ces illusions est impératif pour créer un environnement où chacun peut se montrer sous son vrai jour, avec ses forces, mais aussi avec ses vulnérabilités.
La santé psychologique mérite d’être reconnue et traitée avec soin. Elle est un baromètre précieux de la santé globale qui inclut plusieurs paramètres dont la santé physique, émotionnelle, sociale, financière. Si la santé mentale de l’individu est au beau fixe, alors l’individu sera plus propice à porter un projet professionnel ou entrepreneurial avec succès, ou à rebondir rapidement après un échec. Dans son cheminement, il saura ainsi mieux faire face à l’inconnu dans son quotidien, être résilient en cas de difficultés, mettre en place de saines habiletés de gestion avec ses collaborateurs, sa future équipe et contribuer ainsi positivement à l’économie et la société.
Ensemble, travaillons à bâtir un écosystème entrepreneurial plus humain et résilient.
Un mouvement ne se crée pas seul. Le réel travail de fond pour changer le paradigme au sujet de la santé mentale réside ici. La MAIN et le RJCCQ, engagés auprès des jeunes professionnels et entrepreneurs, constatent les efforts croissants pour améliorer le bien-être psychologique au sein de la communauté entrepreneuriale. En mai dernier, une enquête menée par la BDC a révélé une hausse significative du recours à l’aide professionnelle chez les entrepreneurs, accompagnée d’une volonté accrue de rendre les initiatives de soutien en santé mentale plus accessibles. Ces résultats montrent des signes prometteurs d’amélioration générale dans ce domaine.
À cet égard, nous saluons également les investissements majeurs consentis par les gouvernements fédéraux et provinciaux dans leurs plus récents budgets respectifs. Ces engagements témoignent d’une prise de conscience globale sans cesse grandissante des enjeux de santé mentale.