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Comment faire chuter votre taux de roulement?

Olivier Schmouker|Publié le 30 juillet 2024

Comment faire chuter votre taux de roulement?

Les travailleurs sondés soulignent que l’absence de dialogue avec leur gestionnaire a été l’un des facteurs les ayant incités à partir. (Photo: 123RF)

MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudisVous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca

Q. – «Un membre clé de mon équipe vient de partir pour la concurrence, selon toute vraisemblance pour empocher une meilleure paye. Je dois avouer que je ne l’avais pas vu venir. Comment éviter qu’une telle catastrophe ne se reproduise?» – Steve

R. – Cher Steve, je comprends que ce départ est un coup dur pour vous et que vous souhaitez ne plus en connaître d’autres de ce genre, mais permettez-moi de vous indiquer que la probabilité que cela se reproduise est élevée. Une récente étude du cabinet-conseil en management Gallup indique en effet qu’aujourd’hui un travailleur nord-américain sur deux (51%) recherche activement un nouvel emploi. Autrement dit, il y a de fortes chances que la moitié des membres de votre équipe soient prêts à aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs, et donc à vous quitter du jour au lendemain si jamais une occasion se présente à eux. 

Bon. Loin de moi l’idée de vous faire paniquer. D’autant plus que j’ai une bonne nouvelle pour vous. Il se trouve que 42% des départs sont évitables! Et que les mesures à prendre pour les éviter sont parfaitement accessibles à tout gestionnaire digne de ce nom. Explication.

Gallup a interrogé des travailleurs qui venaient de quitter leur employeur, histoire d’en savoir davantage sur ce qui poussait les gens à aller voir ailleurs en 2024. Il en ressort plusieurs enseignements précieux que je vais me faire un plaisir de partager avec vous.

Pour commencer, les travailleurs démissionnaires prennent leur décision rapidement. Pour 77% d’entre eux, leur départ est survenu dans les trois mois qui ont suivi le début de leur recherche active d’un autre employeur. Et ils n’en parlent à personne, ni à leurs collègues ni à leur gestionnaire immédiat. D’où la sensation de surprise, comme la vôtre, Steve.

Ensuite, ces travailleurs soulignent justement que l’absence de dialogue avec leur gestionnaire a été l’un des facteurs les ayant incités à partir. Ils sont 45% à indiquer que dans les trois mois avant leur départ leur gestionnaire n’avait eu aucune discussion avec eux concernant, entre autres, leur satisfaction professionnelle, leur performance ou leur avenir au sein de l’organisation.

Parmi ceux dont le gestionnaire s’est entretenu avec eux au cours des trois mois précédant leur départ, seulement trois sur dix ont eu une conversation sur leur avenir professionnel (29%) ou sur leur satisfaction au travail (28%). Et encore moins, une conversation en lien avec ce qu’il leur faudrait faire pour être efficaces dans leur travail (18%) ou ce qui les inciterait à rester au sein de l’organisation (17%).

On le voit donc bien, il y a là un défi de communication entre le gestionnaire et les membres de son équipe. Cela se vérifie dans les réponses qu’ont données les travailleurs démissionnaires à la question: «Qu’est-ce qui aurait pu vous retenir au sein de votre précédente organisation?»

Sans surprise, la réponse la plus courante (30%) concerne la rémunération et les avantages sociaux: il aurait suffi d’une meilleure paye, voire d’une prime conséquente, pour les retenir. Mais les autres réponses sont on ne peut plus éclairantes concernant la communication:

– 21% d’entre eux auraient aimé avoir des interactions personnelles plus fréquentes et plus positives avec leur gestionnaire;

– 13%, des discussions sur la résolution de problèmes organisationnels frustrants;

– 11%, des échanges sur la progression de leur carrière;

– 9%, des discussions sur l’amélioration de leurs conditions de travail (redistribution des tâches, flexibilité, etc.).

Comme les gestionnaires ne répondent pas à ces besoins, les employés ont le réflexe de se tourner vers un autre employeur pour y répondre. D’où l’intérêt, selon les experts de Gallup, d’établir des discussions régulières avec chacun des membres de leur équipe et d’en profiter pour aborder des sujets préoccupants pour l’employé en question. En voici deux récurrents:

1. Lien employé/gestionnaire

Lorsqu’un gestionnaire a une conversation significative par semaine avec chaque membre de son équipe, les employés sont quatre fois plus susceptibles d’être «très engagés», qu’ils travaillent entièrement sur place, en mode hybride ou entièrement à distance. À noter qu’une étude de Gallup montre que ces conversations individuelles sont plus significatives lorsqu’elles se concentrent sur les objectifs et les priorités de l’employé en question, sur la reconnaissance de son travail effectué récemment, sur l’utilisation des points forts de l’employé, ou encore sur la collaboration au sein de l’équipe. Une telle discussion peut ne prendre que 15 à 30 minutes. 

2. Points de friction

Lorsque les gestionnaires ne résolvent pas les problèmes inhérents au quotidien au travail, ceux-ci deviennent des obstacles à la fois à la performance organisationnelle et à la fidélisation des employés. Il est donc essentiel d’identifier les points de friction, de discuter de la manière dont ils affectent chacun et de s’y attaquer tous ensemble. Car si rien n’est fait, les frustrations vont aller grandissantes, ce qui peut mener droit à l’épuisement professionnel. 

Rappelons que près du quart du roulement de personnel pourrait être évité si les gestionnaires résolvaient les problèmes d’organisation du travail (13%) ou les problèmes de personnel, de charge de travail ou d’horaires (9%).

Bref, Steve, je ne sais pas comment vous communiquez avec les membres de votre équipe, mais je suis convaincu que vous, comme d’autres gestionnaires, gagneriez sûrement à vous inspirer des recommandations des experts de Gallup. L’idée principale à retenir qu’avoir une discussion individuelle significative tous les trois mois, ou plus, c’est beaucoup trop long. Il faut que le lien soit nourri et renforcé de manière continue, sans aucune interruption. Car cela influence la satisfaction, la performance et même l’avenir des travailleurs au sein de l’organisation. Ni plus ni moins.

En passant, le philosophe grec Pythagore disait: «Qui parle sème; qui écoute récolte».