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Les professionnels de santé demandent au fédéral un plan

La Presse Canadienne|Publié le 06 avril 2022

Les professionnels de santé demandent au fédéral un plan

Les professionnels de la santé demandent au gouvernement fédéral un plan basé sur les données depuis une décennie. (Photo: La Presse Canadienne)

Ottawa — Le gouvernement fédéral doit déposer un budget jeudi dans un contexte de plusieurs urgences nationales et internationales et d’importants engagements financiers.

Parmi elles, les systèmes de soins de santé en déclin du Canada sont au bord du gouffre depuis deux ans en raison de la pandémie et continueront probablement de lutter sous le poids d’énormes arriérés chirurgicaux.

Alors que de nombreux problèmes que le gouvernement cherche à résoudre nécessitent des solutions de plusieurs milliards de dollars, des groupes représentant des professionnels de la santé épuisés affirment que leur principale demande est relativement bon marché: ils veulent un plan.

«Cette crise des ressources humaines en santé devient vraiment extrême et a un impact considérable sur notre capacité à prendre soin des gens», a déclaré la Dre Katharine Smart, présidente de l’Association médicale canadienne (AMC).

Les médecins, les infirmières et les autres travailleurs de la santé ont réduit leurs heures et quitté l’industrie en masse, selon leurs associations professionnelles, mais il n’y a pas de plan national pour déterminer exactement combien de personnes ont été perdues ou comment les remplacer.

Plusieurs groupes, dont l’AMC, se sont regroupés pour demander au gouvernement fédéral d’aller de l’avant avec une stratégie de ressources humaines, ou même une agence, qui comptabiliserait, suivrait, formerait et conserverait les professionnels de la santé pour maintenir les systèmes du Canada à flot.

«Cela n’a aucun sens qu’en 2022, nous ne sachions pas combien de préposés aux bénéficiaires nous avons dans ce pays. Nous ne savons pas combien d’infirmières prendront leur retraite», a déclaré Linda Silas, présidente de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers.

Les professionnels de la santé demandent au gouvernement fédéral un plan basé sur les données depuis une décennie, a indiqué Mme Silas.

«Nous les prévenions, “vous allez être frappé par une autre pénurie”, a précisé Mme Silas. Si nous voulons continuer à soutenir notre programme bien-aimé, nous devons soutenir sa main-d’œuvre.»

La Dre Smart a déclaré que le coût initial pour faire décoller l’idée ne serait que de 2 millions $ — une somme dérisoire dans le budget fédéral. Ce montant relativement faible pourrait signifier que le gouvernement en aura plus pour son argent plus tard et que les Canadiens obtiendront un meilleur système, a-t-elle déclaré.

«Vous pouvez le financer, le financer, le financer, mais quels sont les résultats que nous obtenons? Quelle est la qualité? Comment nous assurons-nous que notre système progresse de manière à ce que ces investissements rapportent réellement aux Canadiens?» a-t-elle questionné.

Cela ne veut pas dire que le gouvernement ne doit pas prévoir d’importantes dépenses pour faire face aux conséquences de la COVID-19 et à toute future vague de virus.

Le ministre de la Santé, Jean-Yves Duclos, a annoncé un montant forfaitaire de 2 milliards $ pour aider les provinces à surmonter les milliers de chirurgies et d’interventions qui ont été reportées pendant la pandémie.

Les provinces, bien que reconnaissantes pour l’argent ponctuel, ont réclamé une augmentation soutenue du transfert fédéral en matière de santé afin qu’elles puissent apporter des améliorations plus systémiques à leurs systèmes.

Les premiers ministres du pays ont demandé à plusieurs reprises au gouvernement fédéral de faire passer sa part des coûts des soins de santé de 22% à 35%, soit une augmentation d’environ 28 milliards $.

Ils ont également demandé des augmentations de financement minimales de 5% par an, arguant que les 3% actuels signifient que les transferts ne suivent pas le rythme des augmentations de coûts annuelles.

«Nous espérons que le budget fédéral contiendra un engagement plus fort pour nous aider à répondre aux exigences de notre système de soins de santé grâce à un financement fédéral accru, prévisible et durable du Transfert canadien en matière de santé», a déclaré Selina Robinson, ministre des Finances de la Colombie-Britannique.

On ne sait pas si le financement soutenu de la santé fera partie du budget, puisque le premier ministre Justin Trudeau a signalé par le passé qu’il prévoyait d’attendre la fin de la crise de COVID-19 avant d’ouvrir des négociations avec les provinces et les territoires.

Au lieu de cela, le parti au pouvoir a proposé des fonds plus ciblés, comme 250 millions $ lors des dernières élections pour élargir l’accès aux médecins de famille et aux équipes de soins primaires en 2022.

C’est le genre de fonds contre lequel les provinces se sont hérissées parce qu’il menace d’empiéter sur leur compétence.

Le ministre des Finances de l’Alberta, Travis Toews, s’est dit particulièrement préoccupé par les plans de soins dentaires et d’assurance-médicaments proposés par le gouvernement, qui pourraient être transférés aux gouvernements provinciaux.

«L’ensemble de l’initiative pourrait recommencer à s’imposer sur notre compétence provinciale et, en fin de compte, laisser les provinces être tenues responsables à long terme», a déclaré M. Toews.

Le gouvernement devrait faire un investissement substantiel dans les soins dentaires dans ce budget. Il s’agit d’une condition de l’accord des libéraux avec le NPD pour maintenir le gouvernement au pouvoir jusqu’en 2025. Les détails n’ont pas encore été publiés.

Le gouvernement doit réfléchir à l’avenir des soins de santé au Canada alors qu’il s’attaque à la COVID-19 tout en développant le système en même temps, a souligné la Dre Smart.

«Je pense que le souci est que vous continuez à ajouter, mais vous n’avez pas vraiment fixé la base», a-t-elle déclaré.

Jusqu’à présent, a-t-elle dit, le gouvernement semble comprendre que le Canada ne peut résoudre ses problèmes de soins de santé sans aborder la crise de la première ligne.

Elle a indiqué que de l’argent était nécessaire dans le budget de jeudi, car les professionnels de la santé ne peuvent pas être formés du jour au lendemain.

«Je pense que nous négligeons ces problèmes fondamentaux (et) ils reviennent en quelque sorte vous hanter plus tard», a conclu la Dre Smart.