Plus la journée avance, plus le cerveau ralentit. (Photo: 123RF)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «J’ai l’impression que les décisions que je prends en fin de journée sont presque toujours toutes croches. Est-ce parce que mon cerveau sature dans l’après-midi? Et dans l’affirmative, devrais-je me contraindre à faire des choix importants seulement le matin?» – Rebecca
R. — Chère Rebecca, votre intuition est juste: notre cerveau se montre plus efficient le matin que l’après-midi. Dans son livre «Le Bon moment» (Flammarion, 2018), le journaliste américain Daniel Pink parle, entre autres, d’une étude de l’économiste Nolan Pope portant sur les notes en mathématiques de deux millions d’élèves scolarisés à Los Angeles, laquelle montre que la moyenne des notes est «très supérieure» lorsque l’examen a lieu en matinée plutôt que l’après-midi. D’autres études similaires vont dans le même sens: plus l’heure de l’examen avance dans la journée, plus les notes baissent.
Ce phénomène ne concerne pas que les étudiants, ça va de soi. Une autre étude citée par Daniel Pink porte sur des données issues de l’hôpital universitaire Duke, à Durham, en Caroline du Nord. L’analyse de 90 000 opérations chirurgicales a mis au jour un fait troublant: la probabilité de rencontrer un problème lié à l’anesthésie est de 1% lorsque l’opération a lieu entre 9h et 10h et de 4,2% lorsqu’elle a lieu entre 15h et 16h. Autrement dit, le risque est quatre fois plus élevé l’après-midi par rapport à la matinée. Et ce, parce que «la performance cognitive analytique de l’être humain va en diminuant au fur et à mesure que la journée avance».
D’où l’intérêt, effectivement, de veiller à ne pas prendre de décision cruciale l’après-midi. Idéalement, il conviendrait de tenir les réunions importantes (budget, choix stratégique) avant le dîner, et celles qui le sont un peu moins (idéation, amélioration de l’expérience client) après le dîner. Car notre cerveau est, en général, plus en mode analyse le matin, et plus en mode créatif l’après-midi.
Bien entendu, tout cela n’est pas une règle absolue. Vous pouvez très bien avoir à prendre une décision importante en fin de journée et le faire à la perfection. Néanmoins, chère Rebecca, il semble que vous avez raison, il est plus avisé de tenir compte du fait que notre cerveau rechigne à donner son 110% après le dîner, dès lors qu’il s’agit de fournir un effort analytique intense.
En passant, le tragique grec Euripide a dit dans «Les Suppliantes»: «Le vrai courage, c’est la prudence».