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«Revenir au bureau? Non merci, ça coûte trop cher!»

Olivier Schmouker|Publié le 26 mai 2022

«Revenir au bureau? Non merci, ça coûte trop cher!»

Un coûteux «retour à la normale»... (Photo: Jan Barborak pour Unsplash)

MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudisVous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca

Q. – «Je suis dégoûtée. Notre employeur a imposé le travail hybride, ce qui lui a permis de tuer le 100% télétravail qui est, dit-il, “la pire des plaies pour l’esprit d’équipe”. Ce qu’il refuse de voir, c’est que le retour partiel au bureau a un coût énorme pour les employés: l’essence, le stationnement, le café du matin, le food court du midi, etc. Résultat? Je me cherche un nouvel employeur…» – Lya

R. — Chère Lya, après deux années de télétravail, vous avez réalisé qu’une journée passée au bureau pouvait avoir un impact certain sur votre portefeuille — et que l’inflation actuelle aggrave la situation. Considérons juste le transport entre le domicile et le bureau. À Montréal, le temps de trajet moyen est de 30 minutes pour se rendre de l’un à l’autre en voiture, selon les données prépandémie de Statistique Canada. Dans le cas d’une voiture compacte, le calculateur de CAA indique que cela représentait à l’époque un coût moyen en carburant de 1,39 $ par trajet, et aujourd’hui de… 2,21 $. Rien qu’en carburant, on est ainsi passé d’un budget annuel de 700 $ à 1100 $.

Usure du véhicule, assurances, tickets… Avant la pandémie, les travailleurs nord-américains dépensaient un montant total évalué entre 2600 $ et 6400 $ pour effectuer en voiture tous leurs trajets entre le domicile et le bureau d’une année, selon une étude du site de recrutement de pigistes Upwork. Je n’ose faire le calcul pour 2022, avec l’inflation que nous subissons à présent…

C’est clair, aller au bureau représente un coût conséquent pour les travailleurs. Des coûts qui avaient disparu dès l’avènement du télétravail, et donc, des coûts qui sont devenus autant d’économies dans nos finances personnelles. D’où la difficulté que nous avons, vous et moi, à nous en défaire maintenant.

Faut-il nous résigner à dépenser comme nous le faisions auparavant pour aller travailler au bureau? Nous remettre à dépenser une petite fortune en transport? À claquer notre argent en lunchs à l’extérieur du bureau, de temps à autre? À dilapider nos sous en cafés quotidiens achetés auprès de grandes chaînes de restauration rapide parce qu’ils sont plus buvables que ceux de la distributrice du bureau?

Ou vaut-il mieux protester, quitte à menacer de changer d’employeur?

Lya, sachez que de grandes entreprises se soucient vraiment de ce nouvel enjeu de la vie au travail. Aux États-Unis, le groupe financier Bloomberg attribue depuis peu une indemnité de déplacement de 75 $ US (96$ CAN) par jour, que chaque employé dépense comme il l’entend, sans avoir à présenter de facture. En Grande-Bretagne, le cabinet-conseil PwC verse un montant annuel de 1000 £ (1600 $) pour dédommager les travailleurs qui doivent venir au bureau, tandis que la banque Goldman Sachs offre gratuitement le déjeuner et le lunch.

Certes, tous les employeurs n’ont pas les reins aussi solides que ces grandes entreprises d’envergure internationale, mais bon, il est raisonnable de s’attendre à ce que les employeurs fassent un geste envers leurs employés qui se retrouvent contraints de payer pour travailler selon les conditions qui leur sont imposées. Un geste financier comme, par exemple, celui de rembourser l’abonnement mensuel aux transports en commun, quand cela est envisageable. Autre exemple: une prime spéciale indexée sur l’inflation.

C’est que, de toute évidence, il ne faut surtout pas que les travailleurs se sentent «perdants» à revenir à leur vie d’avant…