Le meilleur moyen d’anticiper un problème susceptible de handicaper un employé est de lui offrir une véritable écoute. (Photo: 123RF)
MAUDITE JOB! est une rubrique où Olivier Schmouker répond à vos interrogations les plus croustillantes [et les plus pertinentes] sur le monde de l’entreprise moderne… et, bien sûr, de ses travers. Un rendez-vous à lire les mardis et les jeudis. Vous avez envie de participer? Envoyez-nous votre question à mauditejob@groupecontex.ca
Q. – «Je viens de découvrir avec effarement qu’un membre de mon équipe à des problèmes d’argent. Cela lui pourrit la vie et nuit à sa performance au travail. Comment faire en sorte que je sois averti plus tôt de ce genre de problème? Et donc, comment être en mesure de prendre le mal à la racine, pas une fois qu’il est immense comme un arbre?» – Laurier
R. — Cher Laurier, c’est bien connu, il vaut toujours mieux prévenir que guérir. Voilà pourquoi je vous invite à vous inspirer des mesures concrètes qu’entend adopter Ubisoft au cours de l’année 2022, justement dans l’optique d’ôter les petits graviers des chaussures de certains de leurs employés avant qu’ils ne les empêchent de marcher.
Le studio de jeux vidéo à la tête des séries Watch Dogs et Assassin’s Creed s’apprête à lancer le programme «Bien-être global», qui englobe le bien-être physique et mental des employés, mais aussi le bien-être financier et social. Ainsi, chacun va être encouragé à se rendre régulièrement à un gym, à participer à des cours virtuels de yoga ou encore à appeler anonymement une ligne d’assistance téléphonique en cas de souci pour sa santé mentale.
Mais ce n’est pas tout. Ubisoft va agir plus en profondeur en permettant aux équipes d’ajuster elles-mêmes leur rythme de travail dans le but «d’assurer un meilleur équilibre travail-vie personnelle», indique Andrew Saidy, vice-président, talent global, d’Ubisoft. Autre mesure allant en ce sens: le droit à la déconnexion, c’est-à-dire l’interdiction aux employés de répondre à un courriel ou à un appel téléphonique en dehors des heures de travail, et surtout, aux gestionnaires de chercher alors à entrer en contact avec les employés dont ils ont la responsabilité.
Dans le même ordre d’idée, des mesures vont être prises pour simplifier le travail de chacun. Par exemple:
— Les rôles et les responsabilités de chacun vont être clarifiés, car certains se retrouvaient à assumer des tâches «par défaut».
— Chaque employé pourra librement décider de travailler désormais à temps partiel, si cela fait son affaire.
— Le «tunnel des réunions» va être condamné. L’enchaînement de réunions les unes après les autres se révèle une pratique «contre-productive».
«L’idée, c’est de permettre à chacun de respirer, de réfléchir et de faire son travail en temps opportun», dit Andrew Saidy. L’objectif est de «diminuer la charge mentale» et de «réduire le niveau de stress».
Enfin, une attention toute particulière va être apportée aux problèmes financiers et sociaux. Chacun pourra obtenir de l’aide et des conseils auprès d’une foule d’experts en tous genres: ergonomes, entraîneurs sportifs, professionnels de la santé mentale, professionnels de la finance, coachs de vie et autres. «Car ce qui a un impact sur la vie a un impact sur le travail», dit le vice-président d’Ubisoft.
Vous le voyez bien, mon cher Laurier, le meilleur moyen d’anticiper un problème susceptible de handicaper un employé est de lui offrir une véritable écoute. Comme bon nombre de problèmes personnels sont tabous au travail — dette, drogue, divorce et autres —, l’idéal est d’offrir une écoute à la fois compétente et externe. Car cela permettra à l’employé concerné d’y faire face tôt, avant que cela ne devienne un grave problème pour lui-même et pour ses collègues.
Pour revenir au cas qui vous préoccupe, un dernier mot: vous feriez bien, je pense, de commencer par vous attaquer aux problèmes de finance personnelle que rencontrent sûrement d’autres de vos employés. Car il s’agit bel et bien d’un problème généralisé que personne n’ose regarder en face. Selon Statistique Canada, le tiers des Canadiens (31%) estiment aujourd’hui qu’ils ont «trop de dettes». Ce qui signifie qu’il y a toutes les chances que 1 employé sur 3 de votre organisation souffre du même mal, sans rien dire à personne.