L'idée, c'est d'inspirer confiance autrement... (Photo: Marius Ciocirian/Unsplash)
Bon. J’ai une triste nouvelle à partager avec vous, aujourd’hui. Et avant de vous la communiquer, j’aimerais que vous preniez le temps de bien vous asseoir, de respirer calmement afin d’apaiser votre rythme cardiaque. Car, autant vous le dire tout de suite, cette nouvelle risque de vous donner un choc…
Prêts? Parfait. La voici : le cabinet-conseil en ressources humaines ADP a mené une étude dans 19 pays, dont le Canada, concernant l’engagement des employés envers leur travail, et il en ressort qu’en moyenne seulement 16% des employés sont «pleinement engagés» dans leur quotidien au travail et que 84% ne font, eux, qu’«acte de présence» au travail.
[Sources: ADP & HBR, 2019]
Qu’en est-il, au juste, du Canada? La situation n’est guère reluisante : 17% sont pleinement engagés; et donc, 83% se contentent d’aller travailler parce qu’il le faut bien.
Un point intéressant : le simple fait de travailler au sein d’une équipe – ce qui est le cas de 72% des Canadiens en âge de travailler – augmente les chances d’être engagé dans son travail. Ainsi, 20% des Canadiens qui travaillent dans une équipe sont engagés, tandis que ce n’est le cas que pour 8% de ceux qui ne travaillent pas dans une équipe. Les chances sont donc deux fois et demie plus élevées.
Ce n’est pas tout. Un élément peut, à lui seul, changer la donne : le niveau de confiance que les membres de l’équipe ressentent envers leur leader. En effet, lorsque les employés qui font partie d’une équipe éprouvent une «profonde confiance» envers leur boss, alors, en moyenne, 45% d’entre eux sont pleinement engagés dans leur travail. Oui, 45%. Presque 1 sur 2.
Bref, vous sentez du mou dans votre équipe? C’est simple, il vous suffit de corriger le tir en boostant le leadership de vos managers.
D’accord, me direz-vous, mais c’est facile à dire. Et puis, «booster le leadership» de quelqu’un, qu’est-ce que ça signifie concrètement?
Pour vous répondre, laissez-moi, s’il vous plaît, faire preuve d’un peu d’originalité. D’avance, un grand merci.
Je suis plongé ces temps-ci dans une lecture fascinante, à savoir Les Fragments d’un journal intime de l’écrivain suisse Henri-Frédéric Amiel, et j’ai écarquillé les yeux lorsque je suis tombé sur certains passages de son journal de l’année 1848. Il se trouve que, cette année-là, l’Europe a été éberluée par la révolution qui avait éclaté en France, laquelle s’était terminée par le renversement de la monarchie et par la proclamation de la Deuxième République. Les Européens en sont venus à s’interroger sur la légitimité de leurs leaders, et de manière plus générale, à réfléchir sur le leadership (même si, bien entendu, ce terme n’existait pas encore). Et Amiel n’a pas échappé au phénomène.
L’écrivain suisse se questionne ainsi sur ce que se doit d’être un bon leader, et va même plus loin en se demandant dans quelle mesure il peut lui-même devenir un bon leader, à sa modeste échelle, c’est-à-dire dans son simple quotidien. Voici ce que ça donne, à travers quelques extraits de son journal :
«Fais de bonnes œuvres, rends les autres heureux et meilleurs.»
«Tu dois faire droit aux autres. Le moyen, c’est de penser toujours que chacun t’est supérieur par quelque endroit, et de lui reconnaître cet avantage, en t’effaçant, en le mettant sur ton terrain. Intéresse-toi vraiment aux autres, c’est le moyen de leur inspirer de l’intérêt. Pas de hauteur, de raideur, d’orgueil. Attache-toi à ce que chacun a de bon, de meilleur, et non à son côté faible. Cherche à donner du plaisir, du bonheur aux autres; que l’on aime à se trouver avec toi; l’amabilité est un reflet de l’amour.»
«– Sois juste. Respecte l’individualité de chacun; respecte ses opinions, ses lumières; écoute-le avec égard, consulte-le et ne t’impose pas.
– Sois bon. Cherche à faire du bien, à éclairer, à intéresser, soulager, aider, etc.
– Sois flexible. Ne demande pas à quelqu’un ce qu’il n’a pas. Prends chacun comme il est; ne demande pas amitié de ce qui n’a que de l’esprit, de l’esprit de celui qui a surtout des connaissances. Apprends à te plier aux caractères. C’est le savoir-vivre. Résigne-toi et assouplis-toi. La souplesse, qui vient de la bonté et non de la ruse, n’est pas un défaut, mais une qualité.
– Sois vrai. C’est ce que tu es un peu exclusivement. (…) Sois vrai dans tes manières, c’est-à-dire simple. Sois toi-même, au lieu de paraître. Tâche de ne pas paraître plus sot ou plus railleur que tu ne l’es. Mesure, naturel, convenance sont des qualités très importantes; convenance surtout, car elle est l’expression du vrai, le tact du juste.»
«L’homme ne devient homme que par l’intelligence, mais il n’est homme que par le cœur. Savoir, aimer et pouvoir, c’est là la vie complète.»
Lumineux, n’est-ce pas ? Tout cela date d’un siècle et demi, et pourtant, on croirait entendre un penseur contemporain. Chacun de ses traits file droit dans la cible. À la clé, un mode d’emploi pour devenir une meilleure leader en ce début de 21e siècle. Ni plus ni moins.
Voilà. Chers employeurs, vous savez désormais ce qu’il vous faut entreprendre pour booster le leadership de vos managers, voire le vôtre. Oui, ce qui doit être fait pour redonner le goût à vos employés de remettre l’épaule à la roue et d’ainsi redonner leur 110%. À vous de jouer!
En passant, Henri-Frédéric Amiel disait : «Ce n’est pas ce qu’il a, ni même ce qu’il fait, qui exprime directement la valeur d’un homme : c’est ce qu’il est».
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