Elle contestait la convention de partage des pourboires imposée par son employeur.
Une serveuse de restaurant qui contestait la convention de partage des pourboires imposée par son employeur, qui l’avait contestée en portant plainte à la CNESST et qui avait été congédiée, vient de gagner sa cause devant le Tribunal administratif du travail.
Le tribunal vient d’annuler son congédiement et ordonne à son employeur, une franchise du restaurant Le Festin du capitaine, à Montréal, de la réintégrer dans son emploi. De plus, le tribunal lui ordonne de lui verser, à titre d’indemnité, l’équivalent du salaire et des autres avantages dont elle a été privée par son congédiement.
La serveuse avait déposé une plainte à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) parce qu’elle estimait que la convention de partage des pourboires était imposée par l’employeur. Cette convention stipule un partage 70-30 % ; 70 % pour les employés qui ont travaillé ce jour-là et 30 pour cent qui est versé aux employés de la cuisine.
Or, la Loi sur les normes du travail stipule que le pourboire versé par un client appartient en propre au salarié et que si l’employeur le reçoit, il doit le remettre entièrement au salarié, à moins qu’il y ait une convention de partage des pourboires conforme à la loi.
« Cette loi interdit en outre aux employeurs d’imposer un partage des pourboires ou même d’intervenir de quelque manière que ce soit dans l’établissement d’une convention de partage des pourboires, laquelle doit résulter du seul consentement libre et volontaire des salariés qui ont droit aux pourboires », écrit la juge administrative Mylène Adler dans sa décision.
L’enquêteur de la CNESST avait conclu que le partage des pourboires effectué par l’employeur ne respectait pas la loi. Il avait remis au gérant un formulaire de convention de partage publié par la CNESST en lui rappelant qu’il revient aux salariés d’en discuter et que « l’employeur ne doit pas s’en mêler », écrit la juge administrative.
L’employeur soutenait qu’en signant leur contrat d’embauche, tous les salariés consentent librement au partage des pourboires selon le principe du 70-30 et que la serveuse ne pouvait le remettre en question après coup.
Mais la preuve a démontré que le contrat de travail a été imposé par l’employeur à la serveuse après qu’elle eut débuté son emploi, écrit la juge administrative Adler.
La serveuse avait donc refusé de signer la convention de partage des pourboires et avait décidé de garder pour elle les pourboires reçus au restaurant lorsqu’elle était la seule serveuse en poste.
L’employeur affirmait l’avoir congédiée pour manque de loyauté, à cause de commentaires qu’il estimait diffamatoires qu’elle avait publiés sur Facebook concernant la politique de partage des pourboires du restaurant. Il avait aussi soutenu que sa décision de conserver tous les pourboires ne constituait « ni plus ni moins un vol ».
Finalement, le tribunal conclut qu’il y a eu « concomitance troublante » entre son congédiement et son refus de signer la convention de partage des pourboires « imposée par le franchiseur ». Son commentaire sur Facebook au sujet du partage des pourboires « apparaît donc comme un prétexte pour se départir des services d’une serveuse qui refuse d’avaliser la politique du franchiseur », écrit la juge administrative Adler.
La juge souligne aussi que « l’employeur ne peut lui reprocher d’avoir conservé les pourboires qui lui revenaient en application de la Loi sur les normes du travail ».
Il annule donc son congédiement du 15 août 2017, ordonne de la réintégrer dans son emploi et de lui verser, à titre d’indemnité, l’équivalent du salaire et des autres avantages dont son congédiement l’a privée.