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Une fondation pour faire rouler ses causes

Sophie Chartier|Édition de la mi‑novembre 2024

Une fondation pour faire rouler ses causes

Un favori de la stratégie philanthropique de l’entreprise Fuel est le sport féminin, source reconnue de sous-financement. L'entreprise a une collaboration avec le Cégep André-Laurendeau. (Photo: courtoisie)

PHILANTHROPIE. Selon l’Étude sur les tendances en philanthropie au Québec 2024, publiée par Épisode, 8 % des grandes entreprises sondées songent à créer leur propre fondation. Pour que l’alignement entre ses dons et ses intentions soit complet, l’entreprise québécoise de transports et de logistique Fuel l’a fait.

Le 18 septembre, Fuel Transport annonçait un don de 1 million de dollars à l’Hôpital de Montréal pour enfants, un geste philanthropique qui revêtait un parfum inaugural, puisqu’il représentait le premier don de la Fondation Papa George, une nouvelle entité philanthropique créée par l’entreprise de LaSalle.

« On voulait être un peu plus organisés dans notre façon de donner, dit Robert Piccioni, PDG de Fuel. Ça va nous aider à mieux nous aligner. Nos dons ont augmenté au fil des années, donc c’était devenu de plus gros budgets à gérer. Il fallait trouver une façon d’être plus efficaces dans nos aspirations, c’est pour ça qu’on a démarré la Fondation Papa George. Ça va pouvoir donner plus d’impact aux sous qu’on donne. »

La création de cette nouvelle fondation permettra également à l’entreprise dotée de bureaux à Toronto, Atlanta, Chicago, Colombus et Querétaro, au Mexique, de solliciter elle aussi des donateurs touchés par les causes qu’elle souhaite défendre, un avantage indéniable, croit Robert Piccioni. « Ça devient un mouvement, dit-il. Quand tu veux t’attaquer à de plus grands problèmes dans la
société, c’est plus facile. »

Soutenir les moins soutenus

L’appellation « Papa George » fait référence au défunt père de Robert Piccioni, décédé d’un cancer il y a six ans. « Notre mission à travers cette fondation, et même avant avec nos dons, c’est de financer des causes un peu moins sexy, moins populaires. C’était vraiment l’esprit de mon père : quelqu’un doit le faire, pourquoi pas moi ? Notre devise, c’est “funding the unfunded”, ou “financer le sous-financement” en français. »

Le don attribué à l’Hôpital de Montréal pour enfants doit en effet financer les tests cliniques de potentiels traitements pour l’unité de recherche en hémato-oncologie, un volet peu financé de la recherche sur le cancer au Canada. « C’est une portion très administrative qu’on est en train de soutenir, dit le PDG. Ce n’est pas la construction d’une aile dans l’hôpital ou l’achat d’une nouvelle machine hypertechnologique. Ce n’est pas quelque chose qu’on peut voir. Quelque part, c’est assez plate. Mais c’est l’esprit de notre fondation : cibler celui qui n’est pas le favori, mais qui mérite autant que les autres d’être soutenu. »

Un autre favori de la stratégie philanthropique de Fuel : le sport féminin, source reconnue de sous-financement. « On a une belle collaboration avec le cégep André-Laurendeau de ce côté-là, dit Robert Piccioni. J’ai moi-même trois filles qui jouent au hockey et au soccer, alors ça me tient beaucoup à cœur. Notre mission sera toujours liée aux jeunes dans la société pour augmenter leurs chances de réussite. »

Des défis

La création d’une fondation permet de mieux organiser son action philanthropique, certes. Cela ne signifie pas que cette démarche soit facile. L’entreprise travaille sur la mise sur pied de la Fondation Papa George depuis le début de 2023.

Faire rouler une entreprise prend déjà beaucoup de temps et d’énergie, et ajouter une fondation à tout cela est exigeant, dit Robert Piccioni. « C’est comme une minientreprise à l’intérieur de l’entreprise, dit-il. Le plus grand défi, c’est de trouver du temps. La concurrence en affaires est forte, on doit rester compétitif, on doit être performant. C’est difficile de trouver l’équilibre afin d’accorder à la philanthropie l’effort nécessaire, surtout sans embaucher
de personnel pour cette nouvelle organisation-là. Le dévoilement qu’on a fait à l’hôpital au mois de septembre, ç’a représenté des mois de travail de notre équipe marketing, de notre équipe exécutive, et de plusieurs autres personnes. Ça devient plus grand que simplement l’argent qu’on y met. »

Malgré les défis, Robert Piccioni encourage les entrepreneurs qui songent à augmenter leur action philanthropique à ne pas hésiter à se lancer. « L’important, c’est de commencer quelque part, dit-il. Chaque année, réservez une portion de votre budget à la philanthropie et trouvez une donnée sur laquelle baser votre calcul. Nous, on a choisi de se baser sur la performance de l’entreprise. Si on fait beaucoup de revenus, on donne beaucoup. »

Il suggère également d’ajouter des effets de levier auprès des employés et des partenaires, comme doubler les dons ou soutenir les efforts individuels. « Comme ça, tu ne fais pas que signer un chèque, tu motives d’autres personnes dans ta cause, et ça les encourage. Ça devient un meilleur investissement pour la philanthropie. »